Une débutante armée
Mélanie Bonnet
Une diversité d’accompagnements pour une première expérience.
Nouvellement arrivée dans le métier suite à une reconversion, je ne m’imaginais pas enseigner comme on me l’enseignait : préparer des programmations à l’année avant même de connaitre les élèves, des séquences, des séances détaillées en notant ce que je vais dire et ce que les élèves devront répondre… Tant de prévisibilité, tellement peu d’inconnu ! Cela pourrait peut-être fonctionner avec des élèves en intelligence artificielle… En tout cas, avec des humains, tout ça m’a toujours paru impossible. Donc je me « réoriente » dans un métier que je ne veux pas faire comme on me dit de le faire. Ça s’annonce complexe.
Heureusement que j’ai pu avoir entre les mains quelques livres qui m’ont permis d’identifier des possibilités : les pédagogies dites critiques, sociales, coopératives, institutionnelles, alternatives, Korczak, Freinet, Oury, Summerhill… Tant de possibles dans l’impossible !
Rencontrer la pédagogie Freinet
Comment commencer ? Je décide de saisir les occasions quand elles se présentent : je fonce dans la première, un service civique dans une école Montessori. Une année scolaire au quotidien pour mieux appréhender ce qui me fascine, mais aussi ce qui me questionne : la confiance accordée dans la capacité des enfants à penser par eux-mêmes, à forger leur propre « parcours » en suivant leur motivation et leurs enthousiasmes, à s’enrichir des autres ; l’adulte respectueux, qui observe, se tient à disposition, accompagne quand un besoin émerge. Mais d’autres points me déplaisent et cela vaudrait bien un article entier.
Deux autres opportunités se présentent : un stage de l’ICEM37 et des rencontres nationales des Cahiers pédagogiques avec une semaine d’atelier autour du plan de travail. Deux opportunités complémentaires qui me permettent de mieux cerner la pédagogie Freinet et (une once de) la pédagogie institutionnelle. Mais quel plaisir ! Je n’ai pas encore commencé mon Master MEEF1, ni passé mon concours, je n’ai jamais eu de classes, mais je me retrouve déjà entourée d’enseignants et d’enseignantes – du primaire, mais pas seulement – qui me montrent que c’est possible, puisqu’ils et elles le font au quotidien. Je remplis mon sac de toutes les expériences qu’on me narre, je siphonne la moindre étincelle pédagogique pour me blinder avant d’entamer les deux ans de Master MEEF. Soyons clairs, ce n’est pas l’INSPE2 qui m’a permis de débuter en pédagogie Freinet.
Un nouvel élément entre ensuite dans mon bagage avant mes premières expériences de classe : l’OCCE3. Quelle chance d’avoir une association départe-mentale calée dans la thématique qui m’inspire le plus : le conseil coopératif. J’exploite chaque filon et quel plaisir !
Enfin, libre comme l’air...
J’entame alors ma première année en tant que professeure des écoles dans une petite école rurale où je suis la seule enseignante, libre comme l’air. Mais entourée de collègues motivants et vivifiants grâce à l’ICEM37, l’OCCE37, mais aussi aux rencontres des Cahiers pédagogiques. En « débutante armée », je tâtonne doucement dans la mise en place d’un fonctionnement qui me convient, avec le conseil comme base de ma pédagogie puis avec le journal comme support pour « faire ensemble » (sortir, rencontrer, chercher, lire, écrire).

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Deux petites années d’expé-rience plus tard, j’en suis là. Un gros bout de coopération, pas mal de projets d’enfants, des bouts de texte libre, pas assez de Méthode naturelle… Mais ça viendra !

1MEEF : Master « Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation ».
2INSPE : Institut National Supérieur du Professorat et de la Formation.
3OCCE : Office Central de Coopération à l’École.