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Le Nouvel Educateur
Documents n°218
Supplément au numéro 21
de septembre 90

 

Pratiques pédagogiques
en maternelle

par le secteur "Maternelle"
de l'ICEM

 

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Sommaire

  Une pédagogie centrée sur l'enfant
 
A l'écoute de ses besoins fondamentaux
  Respect du besoin de sécurité
  La coopération, l'entraide
  Une éducation pour la réussite
  S'exprimer librement

  Accès à l'autonomie
 
Des conditions pour la réussite
  Aménagement de l'espace et du temps
  Motivation
  Part du maître
  Tâtonnement expérimental       
 
- en sciences
  - à travers des exemples de la vie quotidienne : livre de vie - correspondance -journal quotidien

 

Ont collaboré à ce dossier

Jean Astier - Sylvie Becchino - Jacqueline Benais - Nicole Beme - Laurence Destrade Solange Durand -Émilie Faure - Paulette Germain - Jean Roucaute - Denise Roux - Florence Sabathé - Annie Solas -Claire Vuillequez et l'équipe de l'école maternelle des Béalières 38 - Meylan.

 Photographies : p. 3 : P. Bensa - p. 13 : Sylvie Becchino - p. 16 et 18 : École des Béalières.

 


Introduction

 Quel être essayons-nous de former dans nos classes ?

 Un homme global, capable de s'adapter dans un monde en perpétuel changement. Capable d'acquérir des connaissances par lui-même. Capable d'autonomie et de coopération. Un homme qui tolère et respecte les autres, qui s'estime, qui s'aime, qui est capable de choix, d'imagination, de création, de conceptualisation et d'esprit critique.

 Partant de l'idée que l'enfant est « sujet et objet de sa propre éducation », nous essayons, dans ce dossier, de mettre en évidence notre rôle d'enseignant : être garant de cette formation dans les domaines suivants :

 satisfaction des besoins fondamentaux des enfants

 • sécurité affective et matérielle

 • aptitude à coopérer au sein d'un groupe

 • apprentissages en situation de réussite

 • accès à l'expression libre et à la communication.

 A travers quelques exemples concrets pris dans notre pédagogie quotidienne et dont la liste n'est pas exhaustive nous montrons, dans la première partie du dossier, ce que nous mettons en place pour que le développement de la personnalité de chacun se fasse dans les meilleures conditions, tout en sachant que nous ne sommes pas les seuls à participer à ce développement nécessairement global.

 Dans une seconde partie, nous essayons de montrer, en nous appuyant toujours sur nos pratiques quotidiennes et en y ajoutant l'éclairage de la théorisation, comment nous parvenons à aider l'enfant dans la structuration de sa personne.

 Si, comme on l'affirme « tout se joue avant six ans », alors nous avons un rôle particulièrement créatif à partager avec tous les partenaires éducatifs et les parents en particulier pour aider l'enfant à grandir. 


Une pédagogie centrée sur l'enfant

 A l’écoute de ses besoins fondamentaux

Rythmes biologiques

 Le restaurant scolaire : une expérience, des pistes de travail

 Année scolaire 1988/1989 : Une école maternelle à deux classes, en milieu favorisé, dans la banlieue grenobloise travaillant en parallèle avec une école primaire à trois classes. Douze à quinze enfants de maternelle regroupés avec des enfants de primaire fréquentent tous les jours le restaurant scolaire. Soixante enfants au total se retrouvent dans un local prévu initialement pour trente, au maximum. Quatre personnes assurent le service (une ASEM* et trois employées communales). Deux services ont été mis progressivement en place, à cause du bruit et de l'énervement qui s'ensuivait.

 Courant avril 1989, les enseignants alertent les parents sur la fatigue survenant à l'interclasse de midi, aggravée par le manque d'encadrement. Cela concerne la moitié de nos effectifs. Pour les petits, une salle de repos a bien été installée, mais la sieste ne commence qu'à 13 h 30, pour attendre tout le monde, y compris ceux qui mangent chez eux. Désirant améliorer l'accueil pour tous et en particulier pour les plus jeunes, un groupe de travail, constitué de parents, enseignants, personnel communal et représentants de la municipalité, se met en place.

Il en résulte que, dans un premier temps, les repas seront servis en deux lieux distincts. Une salle qui sert d'atelier pour le primaire et qui est située dans les locaux de la maternelle (c'est l'ancienne salle de jeux coupée en deux, une partie pour le repos, une partie pour le primaire) servira de restaurant pour la maternelle. Ainsi les petits passeront directement de l'école à ce restaurant, puis ils feront la sieste à 12 h 30 dans la nouvelle salle de jeux attenante aux anciens locaux. Le second local de sieste déjà en service sera occupé à 13 h 30 par les enfants n'ayant pas dormi chez eux. Cela rend possible les arrivées échelonnées de ceux qui préfèrent dormir chez eux. Les enfants qui ne veulent pas dormir, y compris certains CP, sont pris en charge après le repas par l'ASEM pour des activités calmes, histoires, dessins... L'ASEM est totalement déchargée du ménage, une autre personne s'occupe de la sieste de 12 h 30.

* ASEM : assistante d'école maternelle.

 A la rentrée 1989, le docteur Delormas, spécialiste de la santé de l'enfant à l'ADESSI (Association départementale de l'Education sanitaire et sociale de l'Isère), fait une conférence en soirée (annoncée par le bulletin municipal), à partir des travaux de Montagner, pour sensibiliser les parents aux problèmes des rythmes biologiques. On envisage alors un changement d'horaire pour tous : reprise à 14 h 30 l'après-midi pour permettre un réel temps de repos. Un sondage est fait, une évaluation financière également. Un problème de recrutement de personnel se pose, en particulier pour l'encadrement des enfants de primaire.

Cela n'aboutira pas, faute de moyens financiers mais le projet reste à l'étude. Parallèlement, notre expérience de coucher les enfants tout de suite après le repas comme le préconisait le docteur Delormas n'est pas une réussite. Salle trop grande ? Pas assez sombre ? Nous revenons à une sieste à 13 h 30 dans le local initial.

 Pour les petits, le fait d'avoir séparé les lieux de repas en deux lieux distincts a été indéniablement une réussite. Nous constatons en maternelle une nette amélioration de l'état d'écoute des enfants et une fatigue moindre l'après­midi. A partir de 11 h, nous proposons des activités calmes (contes, musique, poésie) et une reprise en douceur à13 h 30 avec des activités activités individuelles reposantes en ateliers, jusqu'à 14 h 45 où des activités plus toniques sont alors possibles (psychomotricité chez les grands).

Quitte à revoir nos positions, respecter les rythmes biologiques des enfants (alternance repos-mouvement) a été possible grâce à la participation de tous les partenaires de l'école et cela dans une structure non figée s'adaptant avant tout à l'enfant.

 La mise en place d'un groupe de réflexion associant les parents (67 % des personnes se sont exprimées, 84 % des familles sont favorables au changement) a permis de faire comprendre qu'il ne faut pas réveiller un enfant, qu'il y a peut-être des choix à faire pour lui.

 Même si, en pratique, les difficultés restent entières et, en particulier, le problème du financement du personnel supplémentaire pour assurer l'interclasse jusqu'à 14 h 30, nous gardons bon espoir de voir aboutir ce projet.

 

Besoins affectifs

Rémi

 Rémi arrive dans notre école début janvier 1990. Son père est venu nous présenter le problème : il est divorcé, Rémi lui est confié une semaine par mois. Le reste du temps, il le passe avec sa mère à Toulon, dans le Var.

 Nous en parlons avec les enfants, au moment de l'entretien, avant et après son arrivée :

 « C'est comme mon pépé et ma grand-mère. Grand-mère habite à Monaco et pépé en Suisse » me dit Emmanuelle.

 « Moi aussi, dit Damien. Mamie, elle est seule dans sa maison. Mon papi habite ailleurs... »

Benjamin écoute, lui, dont les parents vont peut-être se séparer.

Rémi arrive donc. Intégration facile. Je propose une correspondance avec la maîtresse de Toulon.

Que puis-je faire d'autre, sinon apporter des repères à cet enfant qui ne sait guère où il habite ? Je conseille au père de fournir à Rémi un agenda personnel, où il cochera quand il est à Toulon et quand il est à Herbeys. C'est reconnaître sa situation difficile. Nous montrons que nous le comprenons.

La correspondance proposée n'aura aucun écho auprès de la maîtresse de Toulon. Rémi s'adaptera, comprenant que tous les adultes n'ont pas les mêmes façons de travailler.

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Respect du besoin de sécurité

Celle qui ne trahissait pas

 « J'étais celle qui ne trahissait pas. » C'est cette phrase qui m'a le plus frappée dans le livre de C. Pochet.(L'année dernière j'étais mort, signé Miloud, C.Pochet, F.Oury - Matrice éditeur). Moi, au contraire, j'avais l'impression d'être celle qui trahissait :

 - en racontant aux collègues qui n'ont pas toujours la même optique que moi les problèmes « psychologiques » de certains enfants... sous prétexte de les aider ;

- en rapportant à un enfant, devant sa mère, les griefs que celle-ci avait eus contre lui à un moment précis... essayant « d'arranger » les choses et... outrepassant ainsi mon rôle d'institutrice pour me substituer à celui de la mère, enlevant par là-même un espace de liberté à l'enfant qui ne m'avait jamais montré cet aspect de sa personnalité.

 Bien décidée à ne plus continuer dans ce type de trahison, je veille.

 Ainsi, quand un jeudi, la maman de Pierre est arrivée en disant, devant tous les enfants « Il paraît que Pierre et Julien ont fait des bêtises à l'école », j'ai demandé des explications, flairant le danger.

Au papa de Julien, qui, le mardi soir précédent, me demandait comment se comportait son fils, j'avais pris soin de dire, devant celui-ci, que je le trouvais dispersé, avec des tendances à beaucoup se dissiper (Noël peut-être... ) et que je lui demandais de faire un petit effort.

 Qu'a-t-il pu se passer à la maison pour que Pierre, qui n'était en rien concerné, se retrouve accusé avec Julien d'une hypothétique bêtise ? Mystère des communications successives...

 Je m'en tiens au fait. L'hypothétique bêtise n'a pas perturbé la classe ce mardi-là. Donc, je n'en veux rien savoir. Affaire classée.

 Soyons clairs : d'un côté, l'école où « en tant que maîtresse » j'ai des droits. De l'autre, la maison où les parents, eux aussi, ont des droits. Mais qu'on ne mélange pas tout. Un lieu pour chaque chose. Alors, avec les enfants, nous avons décidé que ce qui se passe à l'école n'a pas à être forcément raconté à la maison et vice-versa. Et j'ai continué à mettre en place des structures de vie coopérative, des repères pour qu'ils s'y retrouvent et des espaces de liberté pour que ces enfants, dont j'ai la charge et qui sont déjà tellement encadrés, surveillés, ficelés dans les normes sociales, puissent respirer.

 D'où la difficulté à trouver ce qu'il faut dire aux parents qui puisse aider l'enfant dans sa vie scolaire, sans tout dire pour autant, au risque de l'étouffer.

 

Des règles de vie dans la classe

 Les règles de vie dans la classe ne sont pas imposées. L'enfant n'a pas à subir la loi de l'adulte, mais l'adulte est là, très présent pour aider l'enfant à y réfléchir. Ces règles naissent et s'élaborent dans la vie quotidienne. La classe est « la société » où l'enfant prend conscience de ses droits, de ses pouvoirs et du respect qu'il doit aux autres, à la vie.

 Chaque jour, ponctuellement, nous discutons à propos:

 - des incidents relationnels

- des problèmes affectifs

- de la gestion du travail

- de la gestion matérielle de la classe

- de nos projets.

 Dans un premier temps, nous écrivons les règles au fur et à mesure de leur découverte. Dans un deuxième temps, nous les classons par thème. Les enfants y font référence toute la journée. Les parents s'y intéressent, aiment les connaître, savoir comment elles sont nées. Ils remarquent combien les enfants y attachent de l'importance et en parlent. Pour quelques parents, je crois que cela fait aussi évoluer leur façon de concevoir l'éducation de leurs enfants.

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La coopération, l'entraide


Préparons la visite de nos correspondants

 Quelques jours avant les vacances de printemps, nos correspondants (classe enfantine) nous annoncent la date de leur visite fixée dix-huit jours après la reprise des classes.

 Dès la rentrée et pendant plusieurs jours, nous discutons de cette rencontre. Nous cherchons la date sur le calendrier. Nous comptons les jours, puis chacun émet ses idées sur le contenu de la journée et j'en dresse la liste sur une grande feuille. Mon souhait était que les enfants prennent le plus possible en charge la journée. Mais comment faire devant la diversité des propositions ? La journée est courte (arrivée des correspondants vers 10 h, départ vers 16 h 30).

 Le lendemain, je propose aux enfants de faire avec leurs propositions d'activités un grand jeu de l'escargot, par équipes. Ce jeu ressemble au jeu de l'oie, avec des fiches décrivant l'activité à faire quand on tombe sur une case. Il y a une fiche par case. Nous avions déjà inventé deux jeux de l'escargot et nous en avions envoyé un à nos correspondants. L'idée plait aux enfants. Nous décidons de prévoir le jeu pour l'après-midi à passer ensemble.

 Nous établissons le programme de la journée petit déjeuner (gâteaux et boissons) à l'arrivée des copains, visite de l'école, puis du village (pour montrer nos maisons), avant d'aller au foyer communal ; les enfants mettront la table ; repas, grand jeu de l'escargot ; goûter avant le départ des correspondants.

Le repas sera entièrement réalisé par les enfants : salade de riz composée, gâteaux au jambon, glaces au chocolat et sorbets aux trois fruits. L'escargot sera peint sur du carton par les enfants. Chaque enfant tous niveaux confondus, réalise donc une ou plusieurs fiches correspondant à chaque case. J'écris le nom de l'activité (nécessité d'une bonne lisibilité), les enfants inscrivent le numéro correspondant et dessinent l'activité.

 Tout cela occasionne :

- un travail coopératif à tout moment : former des équipes différentes pour chaque projet, mise en commun des idées, élaboration collective du programme de la journée, du menu,

- une expression orale reconnue - un travail vrai ;

- un travail de lecture ; recettes, fiches d'activités ;

- un travail en mathématiques : calcul des quantités d'ingrédients nécessaires en fabriquant ceux-ci en pâte à modeler, numérotation des activités ;

- une approche de la gestion du temps : repères sur le calendrier, organisation de la journée, répartition pendant les dix-huit jours des travaux à faire, et pendant la semaine pour la préparation du repas ;

- un travail sur l'espace avec le repérage des maisons de chacun dans le village ;

- une expression plastique : peinture de l'escargot, dessin des activités sur les fiches.

Bilan : La préparation de cette journée a été une grande expérience pour tous. Les enfants ont eu la parole et ont proposé leurs idées. Chacun a participé, selon ses moyens, du plus jeune au plus âgé. Nous avons fait appel aux mamans pour nous aider, soit en s'investissant personnellement lors de la préparation, soit en apportant du matériel ou des ingrédients pour le repas. Le club du Troisième Age du village sollicité nous a prêté sa cuisine pour réaliser les gâteaux. La participation des mères d'élèves pour la préparation du repas et pour l'encadrement de la journée me paraît nécessaire, d'abord pour l'aide apportée, mais aussi parce que c'est l'occasion pour elles de porter un autre regard sur l'école et sur ce qu'on peut y faire. Regard qu'elles vont transmettre aux autres parents et qui pourra servir l'école. Il en est de même pour l'utilisation de la salle du Troisième Age : les membres de cette association sont souvent des grands-parents d'élèves. Les relations extérieures sont très importantes dans un petit village.

Il est difficile de demander à de jeunes enfants d'organiser seuls une journée (difficultés à mesurer le temps et les contraintes) et la part du maître reste importante avec des enfants de maternelle. Mais leur donner la parole, leur permettre d'exprimer leurs idées et essayer d'en tenir compte, leur expliquer pourquoi telle proposition n'est pas réalisable, n'est-ce pas un pas vers la démocratie et le respect de l'enfant ?

 

Correspondance avec la Roumanie

Début décembre 1989 : notre village a été jumelé avec un village roumain grâce à SOS Village roumain. Cela est paru sur le bulletin municipal. A un entretien du matin, je parle de la Roumanie et de mon voyage fait en 1982 dans ce pays. Je le situe sur le planisphère constamment exposé à la portée des enfants, dans le couloir. J'ai l'habitude d'y placer des repérages pour qu'ils situent les pays dont nous parlons et ce qui peut y être rattaché (la photo d'une camarade qui est retournée au Canada, un nid venant de l'île Maurice, une carte postale de Tunisie, envoyée par l'un d'entre eux, etc.).

 Que pourrions-nous faire pour ce village roumain ? Les enfants ont l'habitude de la correspondance :

- on devrait leur écrire,

- leur envoyer des dessins,

- des jouets...

 Comme Noël approche, nous préparons des cartes de voeux en aluminium repoussé et avec l'imprimerie, nous écrivons au dos :

 « Joyeux Noël, Bonne Année 1990, petits enfants de Roumanie. »

 Nous préparons une belle lettre pour situer Herbeys et leur demander comment est Botez.

 C'est alors que les événements que l'on sait s'accumulent. Aux entretiens du matin, juste avant Noël, nous parlons de la Roumanie. Nous en parlons encore plus à la rentrée de janvier. Une lettre nous arrive - anodine de Botez. Il faut réécrire ! Les enfants parlent de la Roumanie. Chez eux, certains ont vu, pendant les vacances de Noël, préparer des paquets de vivres, de médicaments.

 La Roumanie, ça ne leur est pas étranger

 S'ils vivent si intensément certains événements, c'est parce qu'ils ont eu des preuves tangibles qu'elle existe, qu'on y souffre et qu'il y a d'autres enfants comme eux dans ce pays lointain... moins loin toutefois que celui de Myriam repartie au Canada.

 

Une éducation pour la réussite

Illustration d'une histoire pour J Magazine

 La revue J Magazine, éditée par les PEMF (Cannes), fait illustrer certaines de ses histoires par des enfants. Ceux-ci reçoivent, en classe, le texte brut.

 Voici le témoignage d'une classe habituée à cette pratique :

 Quand je reçois une illustration à faire, c'est un peu comme pour la correspondance, on s'y met tout de suite : présentation aux enfants, recherches, techniques possibles, etc.

Les premiers jets se font souvent au stylofeutre. Parfois, nous faisons des recherches. Par exemple, la dernière fois, pour l'histoire de la grenouille : « Ben moi, j’sais pas dessiner une grenouille. »

 On cherche des livres où l'on voit des grenouilles, la BTJ sur les grenouilles par exemple. Description : gros yeux, verte ou brune, grosses pattes à l'arrière, palmées, etc.

 Après le premier jet, on passe au choix des personnages, à la décomposition et à la chronologie des différentes pages. D'autres équipes interviennent et surtout on se met à rechercher la technique à utiliser. Pour la grenouille : encre + eau (par exemple). Tout cela nous prend une quinzaine de jours avant d'arriver à une histoire présentable. Cela m'oblige à ouvrir des ateliers différents qui deviennent motivants pour les enfants.

 Quand les illustrations qui ne sont pas choisies nous reviennent, nous en faisons un album pour la classe et chaque enfant a son petit livre personnel dans son dossier. Il faut dire que, dès que l'on a une histoire éditée dans J Magazine... c'est un plaisir de voir les enfants découvrir leurs dessins publiés : ils sont fiers ! Et cela décuple la motivation pour la suite !

 

S'exprimer librement 

 

Un coin sonore

en section des petits

 Le coin sonore est un coin de la classe spécialement aménagé pour donner à chaque enfant la possibilité de découvrir et de produire des sons librement, seul ou par petits groupes.

 Conçu comme une «maison des sons », le coin est aménagé de la façon suivante:

 - des mobiles sonores fixés au plafond à différentes hauteurs permettent à l'enfant de produire des sons dans différentes positions (debout - assise - couchée). Il y a, par exemple, une flûte en plastique, une flûte à coulisse (Toucan Van de Velde), des tubes résonnants, un carillon chinois en métal, un carillon chinois en bois...

 - un meuble, sur lequel sont posés un piano électrique (Bontempi), un carillon métallique (jouet), permet d'entreposer divers objets sonores (moulins à musique, boîtes à musique, diapason, sifflets - farces et attrapes sachets en tissu remplis de graines, sable, éléments naturels, capsules métalliques, une valise « instruments à vent » (Fisher Price)... Les petits aiment disposer de matériaux sonores variés (utilisant le souffle, peaux, métaux, bois, carton, papier...) ainsi que des percutants de différentes natures (plastique, bois, main...). Chacun peut « approvisionner » le coin sonore en fonction de ses désirs ou de ses découvertes.

- un magnétophone permet l'enregistrement des productions sonores (voix, découvertes individuelles ou collectives...) ainsi que l'écoute de cassettes introduites par moi-même ou par les enfants. Cela donne à tous la possibilité d'aller à la rencontre du monde sonore : comptines, chansons enfantines, extraits musicaux divers (classique, jazz, folklore, opéra, musique contemporaine, variétés...) poésies, bruitages...

 Le coin a pour but

·          d'enrichir les perceptions auditives du « petit » en lui permettant de faire, au fur et à mesure de ses tâtonnements, des discriminations de plus en plus fines et de l'amener «naturellement » du SON vers la MUSIQUE, de la phase de découverte ou de défoulement à la phase d'expression musicale, de création ;

·          de permettre à l'enfant de découvrir et de différencier des sons produits par diverses sources sonores ;

·          d'aider le jeune enfant à se repérer dans le monde sonore;

·          de développer la créativité et l'expression (verbale-musicale) par le jeu libre, le tâtonnement, le plaisir.

 Les enfants peuvent se rendre au coin sonore pendant les activités en ateliers, le matin lors de l'accueil et après la récréation et l'après-midi après la sieste (le coin sonore étant situé dans le dortoir).

 Nous avons établi les règles de vie suivantes :

 - Pas plus de quatre à cinq enfants au maximum dans le coin sonore pour éviter de se gêner et de produire un volume sonore trop important pouvant gêner le reste de la classe.

 - Ne pas transporter les « objets sonores » dans un autre endroit de la classe, afin de pouvoir toujours les retrouver d'une part, et dans le souci de ne pas perturber les autres ateliers d'autre part.

 Cet atelier est installé dans un coin de la classe un peu retiré (dortoir) de manière à ne pas gêner les activités demandant d'être au calme (bibliothèque, puzzles) ou de la concentration (fiches de graphisme, attention visuelle, mathématiques) et afin de ne pas nuire aux enregistrements des productions sonores avec le bruit émanant des autres activités de la classe.

 D'autre part, il se trouve à proximité d'une prise électrique multiple pour faciliter le branchement du piano électrique et du magnétophone.

 

Accès à l'autonomie

Autonomie en maternelle :

un tableau pour les ateliers

 L'inscription des enfants dans les ateliers me posait beaucoup de problèmes, jusqu'à ce que je trouve l'idée de réaliser un tableau à double entrée.

 C'est un tableau dessiné sur un grand panneau comportant, au début de chaque ligne, les noms des enfants et, en tête de chaque colonne, sur des cartes mobiles fixées avec la gomme, les noms des ateliers (il y a autant de gommettes que de places offertes).

 Pour faciliter le repérage, chaque ligne est coloriée d'une couleur différente.

 Chaque enfant a une étiquette plastifiée portant son nom, qu'il colle avec de la gomme sur sa ligne personnelle et dans la colonne de l'atelier choisi.

 Une fois l'activité terminée, il remet son étiquette au début de la ligne et fait une croix au feutre Véléda dans le tableau.

 Le tableau est entièrement recouvert d'une feuille de plastique adhésif transparent pour permettre d'effacer les croix. 

Ce tableau présente plusieurs avantages :

1. grâce à lui, on voit d'un coup d'oeil la répartition des enfants dans les ateliers, et on ne perd plus de temps à savoir qui a choisi quoi ;

2. on n'a pas besoin de le refaire chaque fois que l'on change les ateliers, puisqu'il suffit d'effacer les croix et de recomposer son « programme » avec les cartes mobiles.

NB : en principe, pour effacer les croix, un simple coup de chiffon suffit. Toutefois, si elles ont séché, on peut utiliser du White Spirit ou de l'essence de térébenthine.

Dans notre classe, nous avons décidé ensemble d'une convention : si un enfant n'a pas terrniné son travail dans un atelier, il fait une croix au feutre rouge dans le tableau.

Le jour suivant, il doit se réinscrire obligatoirement dans cet atelier (il a priorité sur les autres enfants).

Une fois son travail terminé, il efface la croix rouge et la remplace par une noire.

Ce système permet de voir qui n'a pas terminé son travail et d'éviter que des travaux commencés ne soient jamais finis.

Nota : En haut du tableau des petits dessins que nous ne reproduisons pas ici illustrent les noms des ateliers.

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Des conditions pour la réussite

 Responsabilité individuelle de l'éducateur dans l'aménagement de l'espace et du temps


Bien que conscients de la limitation de la marge de manoeuvre de l'éducateur due au système en place (faiblesse de ses crédits, pressions diverses) nous l'estimons suffisamment libre pour le rendre partiellement responsable de l'organisation de sa classe. Sans imputer la pauvreté des écoles françaises aux seuls éducateurs, nous pensons qu'un effort d'imagination et d'actes peut démarrer des changements substantiels au sein de l'école. Sans aller jusqu'à déclarer que l'Éducation est un état d'esprit, nous considérons qu'une certaine tournure d'esprit peut largement améliorer des conditions matérielles défaillantes.

 Ainsi, dans sa classe, l'éducateur est responsable du matériel et de l'organisation temporelle et spatiale. De plus, il détermine au départ, par les règles qu'il propose aux enfants, la façon de travailler et de vivre dans ce lieu. Il est le garant de l'évolution de cette organisation durant la période de fréquentation de la classe.

  * BTJ n°268 : Plus d'espace dans notre classe: une mezzanine - PEMF, Cannes

Construction d'une mezzanine

 Je manquais de place dans ma classe pour tout ce que je voulais y faire :

- 60 m² pour trente-cinq enfants de trois ans ;

- fenêtres de type « Jules Ferry » à 1,20 m de haut : pas de regard sur l'extérieur, pas de possibilité de mettre des plantations à hauteur des enfants. Un seul point lumineux : la portefenêtre réservée au coin-bibliothèque ;

- pas de place pour installer un coin-marionnettes permanent : les castelets installés provisoirement sont monopolisés par les plus hardis, et les timides qui en auraient le plus besoin n'y ont pas accès librement ;

- impossible d'installer un coin-magnéto : il y a trop de passage et d'agitation au sol...

 La solution que j'envisageais était de construire une petite mezzanine de 2 m x 3 m :

- gain de place au sol ;

- dégagement du seul espace lumineux à ras de terre, pour y installer élevages et plantations ;

- mise en hauteur, et au calme, de la bibliothèque et possibilité d'aménager au même endroit un coin-magnéto ;

- possibilité, grâce à un simple rideau disposé entre deux piliers, de disposer d'un coin marionnettes permanent et d'accès facile.

 Mais là encore se posait un problème matériel de taille : comment faire cette mezzanine ?

 La mairie s'opposait au projet. Elle a en charge vingt-deux classes maternelles et a peur des fantaisies pédagogiques de ces dames, surtout lorsqu'elles coûtent 10 000 F (estimation de la mairie), qu'elles peuvent devenir contagieuses, ou bien demandent un travail important de la part des rares employés municipaux capables de le réaliser.

 J'ai donc réuni les parents et leur ai proposé mon projet :

- plan d'une mezzanine en bois inspiré de la BTJ n°268* ;

- projet de financement basé sur la vente de calendriers imprimés par les enfants (sérigraphie, papier à la cuve...). Si chaque famille arrivait à vendre dix calendriers à 10 F, j'aurais les 3 000 F nécessaires à l'achat du bois ;

- appel aux bonnes volontés et aux diverses compétences pour travailler le bois et monter la mezzanine.

L'accord fut général, et un papa a proposé les services bénévoles d'un copain menuisier... Inattendu !

 A ce jour, la mezzanine est faite. Elle est belle et solide, elle aère la classe et n'a coûté que 2 400 F alors que j'ai recueilli près de 3 500 F. Le reste servira à regarnir les rayons de la bibliothèque, à acheter un aquarium supplémentaire (eau de mer), des casques pour le coin-écoute, du tissu pour les rideaux, que sais-je encore ?...

 Les enfants sont ravis ; que ce soit dessus ou dessous, ils découvrent une nouvelle dimension : la hauteur, et ils ont leur cabane dans la classe.

 En trois jours, les nouvelles règles de vie étaient acquises : se déchausser pour monter (moquette), mettre un collier spécial avant de monter : il y en a six qui matérialisent le nombre de places disponibles.

 Et nous avons terminé, les enfants et moi, par la préparation d'une petite fête (fabrication de biscuits et gâteaux) pour que se réjouissent ensemble tous les participants du projet :

- le papa bricoleur avec son ami menuisier,

- les parents qui ont vendu les calendriers et aidé aux finitions (poncer, traiter le bois, placer un filet de protection et la moquette),

- les enfants qui ont fabriqué les calendriers. 

 

Motivation


La motivation est un ressort humain. Elle conditionne un apprentissage actif appuyé sur des situations vraies. Elle est responsabilisante et demande un effort personnel. Elle est liée à la notion de plaisir. Elle s'appuie sur un appétit naturel pour explorer le monde environnant et la connaissance de soi-même. En s'appuyant sur cet appétit, on est sûr de ne pas se tromper.

 La motivation est le dynamisme naturel qui définit la vie : tout être vivant tend à se maintenir en activité, ce qui implique pour le pédagogue une confiance fondamentale et positivante dans la nature de l'enfant.

 L'enseignant doit tenir compte de la globalité fondamentale de l'enfant. Sans motivation il n'y a pas de prise de conscience de soi-même et l'apprentissage reste illusoire car superficiel. Un exemple de travail vrai grâce à la motivation : le conte musical.

 Le conte musical

 En classe, nous inventons toujours beaucoup d'histoires : choc des hasards, binômes imaginatifs. Nous partons de deux mots pris au hasard. Plus les mots sont éloignés l'un de l'autre, plus ils sont porteurs et stimulants. (Grammaire de l'imagination, Rodari). Ainsi, au mois de novembre, les enfants sont déjà pas mal rôdés à ce jeu. Un jour, Emmanuel m'apporte un dessin fait à la maison : en dessinant le contour de ses ciseaux, il a inventé la silhouette d'un éléphant et d'une guitare. C'est le départ d'une recherche (qu'il animera lui-même) sur tout ce que l'on peut imaginer à partir de ces ciseaux : papillon, personnage, hélicoptère, etc.

 C'est aussi le départ rêvé d'une histoire à partir de ces deux mots : l'éléphant et la guitare. En voici la trame :

« Un joueur de guitare perdu dans la forêt vierge entend un éléphant qui s'approche : affolé, il s'enfuit en abandonnant sa guitare. L'éléphant la trouve, en joue, et tous les animaux de la forêt viennent l'écouter. Mais un perroquet jaloux s'en empare et l'emporte à travers ciel jusqu'à Paris où il finit avec elle dans un zoo. »

 Nous présentons cette histoire à la classe de ma collègue Maryse. Sentant qu'elle est porteuse de nombreuses pistes, je décide avec ma collègue de proposer aux enfants un projet : en faire un spectacle qui aura lieu en juin.

 Ce conte sera d'abord monté en album. Au coin bricolage, on trouve bientôt des marionnettes correspondant aux personnages.

 L'histoire devient le support d'explorations multiples dans tous les domaines. Les haltes du perroquet dans la forêt, dans un village africain, en Afrique du Nord dans une oasis, nous permettent de connaître ces pays, leur climat, leur végétation, leurs habitants et leur mode de vie.

 Les élèves nous apportent des objets, des musiques, des vêtements africains, des masques, tam-tam, etc.

 Nous écoutons les musiques, dansons sur leurs ryhtmes. Nous fabriquons des instruments, inventons des bruitages, des mélopées avec des onomatopées, un totem et des masques.

 Nous regardons des livres, des diapos...

 Avec l'Afrique du Nord, nous travaillons sur les écritures différentes : un élève apporte un journal arabe, nous apportons des journaux chinois, russes, israéliens...

Nous recevons d'un aveugle une lettre en braille et cherchons un moyen pour lui répondre (des dessins en relief, un essai en braille, un domino tactile ... ).

Nous travaillons en profondeur, sur l'accepta­tion des races différentes. Les petits Arabes mettront quinze jours à trois semaines avant d'apporter fièrement des photos, objets, vête­ments et musiques de chez eux.

Des mamans tunisiennes, marocaines, algé­riennes se mettent ensemble pour nous faire un gigantesque couscous.

Là aussi, nous dansons et écoutons musiques et chants arabes.

En peinture, après avoir travaillé la forêt, les gammes de vert, nous travaillons sur le désert, les gammes chaudes, ocre jaune...

Nous survolons la mer, le bleu et la France les vues d'avion, le plan, Paris...

Puis nous construisons des décors, masques, totems, arbres.

 Nous organisons des ballets, enregistrons le texte dit par les élèves, leurs bruitages, les musiques que nous avons choisies avec eux, les chansons que nous avons inventées ensemble.

 Des diapos agrandies de leurs peintures servi­ront de décor.

 Ce travail s'est poursuivi de novembre à juin. Les élèves se sont appropriés le projet, l'ont enrichi, ne se sont pas lassés. Chaque explora­tion était reliée à cet axe principal qui a sous­tendu notre année, et a donné lieu à un repor­tage approfondi dans notre journal trimestriel.

 Il nous a permis de travailler dans toutes les directions, de motiver des recherches diffé­rentes dans un projet global et cohérent.

 La créativité a sous-tendu tout ce projet et s'est exercée tous azimuts. Elle ne s'est pas limitée aux disciplines artistiques.

 Créativité pour les élèves avec interaction constante réel/imaginaire dans tous les domaines.

 Créativité pour les maîtresses pour intégrer les apports des élèves, les enrichissements et approfondissements apportés à ce projet de longue haleine. Le tout a abouti à un produit collectif, réussi, porteur de plaisir pour chacun.

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Part du maître


L'éducateur est avant tout l'animateur adulte de la classe coopérative Freinet. Les enfants sont les acteurs. Le rôle du maître consiste à accueillir, stimuler, valoriser et induire les enfants.

Accueillir : il est primordial d'accorder la place qu'ils méritent aux travaux d'enfants trop souvent négligés et considérés comme parasites du « vrai savoir ». L'activité « naturelle », au sens d'« habituelle », de l'enfant est riche car elle est mue par la volonté de l'individu. Elle exprime ce qu'il est, ce qu'il désire. Elle est révélatrice de ses motivations comme de ses capacités. Elle est le substrat naturel de qui veut travailler avec l'enfant. Aussi, nous travaillons avec les productions, les créations des enfants.

Stimuler : lorsque le mécanisme de création est grippé, notre rôle consiste à le relancer grâce à de petits artifices, des stimulants. Ces stimulants sont de deux ordres : celui de la recherche et celui du narcissisme. Nous pouvons stimuler les enfants... en les gratifiant pour leurs initiatives mais aussi en leur faisant pressentir des champs de recherche excitants qui leur sont encore étrangers.

Valoriser : la valorisation a pour fonction fondamentale de signifier à l'enfant sa place originale et indispensable dans le groupe. Elle est un outil de narcissisation. Elle consiste à pousser l'enfant à prendre place au sein du groupe. Elle tend à le rassurer quant à ses capacités et devrait le conduire à des démarches toujours plus assurées, le sécurisant afin qu'il ose, de lui-même, se lancer dans l'exploration hardie de terrains inconnus.

Induire : l'enfant ne peut pas tout réinventer. Pour lui faciliter la tâche, l'éducateur l'aiguille, l'informe. Ceci consiste en un savant dosage de laisser-faire et d'intervention de la part de l'éducateur qui doit intervenir ou se taire au moment opportun.

Confection d'un album

Décloisonnement entre la classe des petits et celle des grands.

L'après-midi, les petits étant moins nombreux (sieste à la maison ou à l'école) un groupe de grands, par roulement, va travailler chez ma collègue.

Atelier proposé :

Découpage-collage de petits morceaux de papiers colorés pris soit dans des catalogues, soit dans du papier-affiche pour remplir des surfaces représentant des dessins faits par les enfants. Ainsi se trouvent représentés des chevaux, des escargots, des maisons, un train, une tente et une énorme araignée, selon l'inspiration des enfants, au bout de deux ou trois séances.

Je propose alors :

« Et si on inventait une histoire pour savoir ce qui arrive à tous ces animaux ? »

Regroupement de tous les enfants et des découpages-­collages.

« Il était une fois une grosse araignée... »

L'histoire est partie. Très vite des idées fusent de tous côtés :

« L'araignée, elle habite dans un château. Elle fait peur à tout le monde.

- Oui, mais elle a des copains : le cochon, l'escargot...

-Et si la tente c'était une tente d'indien ?

-Il est où l'indien ? S'il arrivait en train !... » Très rapidement l'histoire se construit oralement avec les différents personnages déjà créés. Je prends des notes. Il manque des accessoires.

« Qui fait quoi ? »

« Si l'indien arrive en train, il faut faire les rails sous le train. Qui sait faire ? »

- Et l'araignée, elle est dans une toile. Qui se sent capable de réaliser parfaitement la toile ? »

Au gré des compétences, et des désirs, les rôles sont distribués. Les enfants qui ne se sentent plus concernés ont déjà décidé de faire autre chose qui ne demande pas mon aide. On se rend compte qu'il faudra refaire les « héros » de l'histoire plusieurs fois. Des commandes sont passées auprès de la collègue pour les jours suivants. Avec les volontaires (dix environ) on monte l'histoire feuille par feuille, mon rôle consistant à écrire le mieux possible, sous les personnages, l'histoire dictée.

« Il était une fois une grosse araignée... qui habitait dans un château sur une colline près d'un village.

-Moi, je fais la colline avec l'herbe.

-Et moi, des fleurs qui poussent... »

Chaque page ainsi « fignolée » viendra s'ajouter au reste de l'histoire. Ainsi on essaie d'aller jusqu'au bout du mieux que l'on peut dans le détail, la beauté, la précision, pour que le texte, au vu de l'illustration, soit immédiatement retrouvé.

Affichée en bande dessinée dans la salle de jeu, les enfants tous réunis ayant retrouvé l'ordre, on la relira souvent. Plus tard, on l'enlèvera et, avec une couverture reliée et cousue par la dame de service, cela fera un bel album que l'on prêtera aux correspondants.

L'important pour que cela « accroche » :

Les enfants doivent savoir, dès le départ, que leur histoire fera un livre et qu'ainsi elle sera reconnue. D'où une écriture rapide, une mise en page sur du beau papier le plus vite possible, les détails et les fignolages venant après, pour parfaire.

Un album qui traîne démobilise les enfants. Un album réalisé en deux jours est une réalité que l'on montre volontiers aux parents ou visiteurs.

 

Tâtonnement expérimental

Une des idées-forces de la pédagogie Freinet, c'est le tâtonnement expérimental. Qu'est-ce à dire ?

A partir de l'idée qu'un enfant se fait d'un phénomène (« image mentale »), il fait une hypothèse opératoire et imagine le résultat attendu d'une action qu'il peut engager. Après être passé à l'action, il peut vérifier si l'hypothèse est juste, si ses images mentales étaient bonnes. Et ainsi, de proche en proche, il ajuste de façon réaliste sa conduite à son environnement.

La démarche de tâtonnement expérimental est ici considérée de façon très globale : démarche expérimentale dans les activités scientifiques mais aussi dans les autres domaines d'activités (artistique, communication, éducation corporelle...).

C'est par la mise en place d'un travail vrai que l'échec sera reconnu comme formateur et épanouissant et non plus vécu comme une expérience traumatisante.

Les erreurs passées peuvent être une source future de progrès. Un échec aboutit nécessairement, au moins, à la connaissance de cet échec. Il entraîne donc une attitude différente du sujet confronté à nouveau à une situation qui l'a conduit précédemment à un échec. Autrement dit, les échecs sont à l'actif du sujet autant que ses réussites. Il s'en sert. Le tout consiste à attribuer à l'échec une simple et saine valeur expérimentale et à ne pas le charger affectivement.

Voici ce que dit Bettelheim :

" L'apprentissage est difficile. Apprendre n'est jamais facile. Quand on présente l'apprentissage comme un amusement, l'enfant qui réussit n'a pas l'impression d'avoir accompli quelque chose. Celui qui n'y arrive pas est en très mauvaise posture puisqu'il ne réussit pas à faire ce qui est facile. Il pense : je suis bon à rien. »

L'individu ne doit pas être identifié, pire, s'identifier à son échec. Sinon, il se bloque et risque de compulser l'erreur. Se crée ou se confirme alors un net décalage entre la réalité et les fantasmes dus à l'échec. C'est cela le traumatisme.

Dans le domaine scientifique :

étude de déplacements

Dans une école maternelle de la banlieue grenobloise, l'école des Béalières, fonctionnant en équipe pédagogique, des expériences de technologie ont eu lieu avec l'aide du centre culturel scientifique et technique de Grenoble.

Les groupes étaient constitués de dix enfants encadrés par deux adultes.

Voici des recherches sur les déplacements qui ont pu être réalisées au cours de ces séances. Elles se situent dans ce qu'on appelle en pédagogie Freinet le tâtonnement expérimental.

Déplacements

 Objectifs

On demande aux dix enfants de trouver les différents moyens de déplacer une malle d'environ 40 kg d'une salle dans une autre.

Les adultes avaient imaginé différentes solutions : utilisation de cordes, de leviers et de rondins, puis réutilisation par groupes de deux, de rouleaux de carton sous des briques en plastique, pour simuler le déplacement de la malle.

Matériel

A la vue des enfants : la malle fermée.

Matériel prévu, mais non visible par les enfants, à donner sur demande

- des rouleaux (petits et gros)

- des manches à balai

- des cordes

- des briques de plastique.

Matériel non prévu, mais utilisé parce que présent dans la salle : des bancs.

Déroulement de la séance : comment peut-on déplacer la malle ?

Les enfants font plusieurs propositions

1. La porter

• C'est lourd, il faut avoir des muscles. » (Florian)

• En la portant, je sais qu'elle sera trop lourde. » (Brice)

On essaie:

• Ça fait mal aux mains! »

• Pfh ! on n'en peut plus ! »

• On peut enlever ce qui est dedans »

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2. La tirer ou la pousser

 • On n'a qu'à la traîner. » (Philippe)

• Quand on pousse, on est derrière. » (Martha)

• Quand on tire, on est devant. » (Chloé)

 3. La tirer et la pousser en même temps

• Quand il y a beaucoup de monde à tirer et à pousser, ça va mieux. » (Philippe)

• Ça va mieux quand il y en a qui tirent et d'autres qui poussent, ça va plus vite. » (Mélissa) Instinctivement les enfants sont tous allés dans la même direction pour déplacer la malle.

4. Utiliser des cordes

« On va attacher une grande corde pour la tirer. » (Ludovic) Les enfants s'aperçoivent que faire un noeud, c'est difficile, ça ne tient pas bien. Ils ont l'idée de remplacer le noeud en doublant la corde.

Ils observent que les cordes sont tendues quand ils tirent :

« Les cordes sont tendues comme les cordes d'une raquette. » (Julien)

Ils mettent une corde aux deux manettes de la malle et tirent de chaque côté :

« Elle avance et elle recule, c'est parce qu'ils tirent des deux côtés. » (Mathieu)

Les enfants veulent déplacer la malle vers la porte, attachent les cordes à la poignée opposée, et prennent conscience par leur erreur du sens du déplacement.

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« Il faut mettre les cordes dans l’autre sens. » (Mathieu)

Ils trouvent plusieurs manières de tirer la malle.

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Ils remarquent que la malle frotte sur le carrelage :

« ça va rayer le carrelage. »

 « Sur le carrelage, ça glisse mieux que sur la moquette. » (Corinne)

En tirant en biais sur un côté seulement, le déplacement est différent :

« Avec les cordes, ce qui est bien, c'est qu'on fait bien tourner la malle. » (Julien)

5. Utiliser un levier

« On pourrait mettre un truc en fer dessous, et on essaie de soulever.. parce que si c'est pas en fer, ça casserait. » (Sébastien)

En fait, on a utilisé des manches à balai... et ça n'a pas cassé !

Pour que le manche à balai soit plus facile à faire glisser, Adrien s'assoit sur la malle en croyant faire contrepoids.

6. Utiliser une surface plane et lisse, pour faciliter le déplacement

« On prend un banc à l'envers, et on met la malle dessus. » (Ludovic)

7. Utiliser des rouleaux :

*Propositions des enfants 

« On n'a qu'à prendre un truc rond, et on le met dessus. » (Sébastien) : « Un ballon, ce n'est pas assez solide. »

« Pour la faire rouler, on pourrait mettre des rouleaux dessous. » (Philippe)

« A un moment, les rouleaux ils s'enlèveraient », répond Brice qui anticipe.

* Essai : les enfants s'aperçoivent vite que les rouleaux sous la malle doivent être placés dans un sens bien précis ; ils se heurtent au problème envisagé par Brice :

« Les rouleaux, ils s'enlèvent tout le temps. » (Gaëlle)

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Nouvelles propositions :

a) « Il faudrait coller les rouleaux sous la malle. » (Brice)

« Si on les colle, ça va pas rouler. » (Mathieu, qui démontre aux autres que ça ne peut plus avancer.) b) « On peut mettre un bout de bois de chaque côté, pour pas qu'ils roulent. » (Philippe propose en fait un système de rails pour canaliser le déplacement.)

c) « Il faut mettre des vraies roues. » (Adrien)

d) « Moi, j'ai une idée, quand il n'y en a plus, on en remettrait devant. » (Ludovic)

On essaie, la malle avance mais c'est difficile de lui faire garder la bonne direction, et ça ne va pas vite.

e) Dans un autre groupe, au départ, les enfants n'utilisent qu'un seul rouleau. Ils s'aperçoivent qu'en plaçant un ou deux rouleaux sous la malle, elle bascule, et ne peut pas rouler.

« Il en faut au moins trois. » (Thibaud)

On essaie avec trois rouleaux. C'est vrai que ça va mieux.

f) « On met des rouleaux, on pousse très fort, zoom et on recommence. »(Adrien)

 On essaie : la malle se déplace, mais elle ne garde pas la bonne direction

 

Bilan des enfants

 

Dans tous les groupes, et contrairement aux prévisions des adultes, les enfants ont convenu que tirer avec les cordes était la solution la plus efficace.

 

Prolongement

 

Dans une deuxième partie de la séance, les enfants, seuls ou par deux, ont pris une brique de plastique et des rouleaux. La consigne était de faire avancer la brique sans qu'elle touche le sol.

 

Schématisation

 

Après chaque séance, dans la classe, l'enseignante demande aux enfants de représenter à l'aide d'un schéma la manipulation qu'ils viennent de réaliser.

 

Ensuite, individuellement, ils lui commentent leur schéma. Elle note textuellement, près des dessins, ce que disent les enfants. Cette phase de verbalisation oblige l'enfant à utiliser un vocabulaire précis et permet à l'enseignant de mieux saisir ce que l'enfant a compris de l'expérience.

 

Dans un autre temps, par petits groupes, nous observons et critiquons une série de schémas relatifs à une même expérience. Certains enfants ayant compris l'expérience, mais malhabiles dans leur représentation graphique, trouvent par contre assez vite les erreurs de schématisation de leurs camarades.

 

Parfois aussi, nous reprenons une expérience en la réalisant à partir d'un schéma inexact pour faire prendre conscience aux enfants de l'importance de la précision dans la représentation graphique.

 

En analysant les schémas nous constatons que certaines erreurs reviennent souvent. Dans ce cas, nous essayons, par des exercices plus systématiques de manipulation, de faire mieux comprendre aux enfants des phénomènes simples (tension d'une corde par exemple).

 

Ensuite, pour contrôler l'acquisition de ces phénomènes, nous leur demandons une nouvelle représentation graphique de ces exercices.

 

Les schémas qui suivent sont des exemples d'erreurs le plus fréquemment rencontrées.

 

Représentations du déplacement de la malle sur les rouleaux

Erreurs :

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Conclusion

 

Dans ces séances, les enfants ont été très actifs et se sont bien amusés. Ils ont proposé et essayé de nombreuses solutions. Ils étaient motivés face à un problème réel à résoudre. Ils ont utilisé vraiment toute leur énergie.

 

Pourtant, l'objectif que nous nous étions fixé n'a pas été atteint : les enfants trouvent que tirer avec une ficelle, ça va mieux. En fait, la malle n'était pas encore assez lourde pour que les rondins soient indispensables.

 

Remarque: La même séance a été proposée par la maîtresse en section de petits.

 

Les enfants ont trouvé les mêmes solutions, cependant il y avait confusion entre les mots tirer et pousser, et amalgame entre force et vitesse : les petits de trois ans couraient avec la corde à côté ou devant la malle, utilisant davantage leurs jambes que leurs bras.

« ... L'acquisition d'une véritable pensée scientifique doit s'appuyer sur un tâtonnement manipulatoire

orienté par un problème à résoudre que s'est posé l'enfant, ou auquel il a été confronté... Il semble donc important de connaître les représentations desquelles il est parti, qui peuvent faire obstacle et qui peuvent lui masquer ses propres cheminements et finalement retarder ou fausser l'accès à l'esprit scientifique... » « ... Une connaissance beaucoup plus précise de ce qui se passe dans la tête des enfants est indispensable pour que le maître puisse orienter les progrès de chacun... »

(Extraits du n° 108 de Recherches pédagogiques).

 

 

A travers des exemples de la vie quotidienne en classe

 L'école oublie souvent l'essentiel : la vie. S'occuper seulement d'instruction consiste à occulter des pans entiers de la vie du sujet. De plus, comment instruire lorsque l'on méconnaît la culture de base de l'enfant ?

 Le travail vrai s'organise autour de situations réelles. C'est ainsi qu'on permet aux enfants d'expérimenter de façon concrète.

 

Le livre de vie

 Sur un grand album de tapisserie, nous notons les événements qui ponctuent notre vie scolaire.

 Chaque soir, au bilan, nous exprimons ce qui a été marquant dans la journée. En début d'année, c'est moi qui le rédige après la classe, demandant parfois aux enfants de l'illustrer soit par des dessins, soit par des collages en rapport avec ce qui est écrit.

 Petit à petit, ils écrivent eux-mêmes les textes que je prépare, et cela est l'objet d'un atelier « Livre de vie » pour le lendemain. Des volontaires s'inscrivent donc le soir pour le lendemain dans cet atelier. Nous essayons au maximum d'illustrer le texte pour qu'ils puissent, au regard de l'illustration, situer dans l'espace les événements de leur vie.

 Ce livre, mis sur deux tables dans le couloir, peut être lu avec les parents (je le leur recommande particulièrement). Cela confirme, s'il en est besoin, que l'écrit a une signification et qu'il n'est en aucun cas un acte gratuit.

 

Correspondance maternelle-CM2

 Des élèves de CM2 (dix-sept nationalités différentes dans ce groupe scolaire) correspondent avec des enfants de maternelle de petite section de milieu favorisé. Ils échangent des histoires, des dessins, des questionnements. Voici un exemple de correspondance qui montre que les questionnements « vrais » ont eu des répercussions autant chez les petits que chez les grands.

 De Saint-Ismier comme de Grenoble s'échangent des lettres collectives. Dans ce cadre-là, les plus jeunes avaient vu un plan de mosquée envoyé par une autre classe correspondante.

 Comme il n'y a pas d'enfant musulman dans leur classe, ils ont interrogé leurs amis grenoblois. Aussitôt, les enfants algériens du village olympique ont répondu à la question : qu'est-ce qu'une mosquée ?

• Dans une mosquée, on prie.

• Pour prier, on se met à genoux sur des tapis.

• On entre pieds nus dans une mosquée.

• C'est un lieu sacré, alors avant d'entrer, on se lave le visage et les mains.

• La mosquée, c'est l'église des Musulmans.

• Les femmes n'ont pas le droit d'entrer en même temps que les hommes. Elles ne sont pas dans la même salle.

• Les mosquées sont souvent à la campagne.

• Le vrai nom du prêtre est taleb.

• Les garçons peuvent entrer avec leur père et les filles ont le droit d'entrer avec leur mère.

 Chez les CM2, le désir d'informer les plus jeunes a permis de valoriser deux garçons algériens. Dans ce domaine, c'étaient eux qui détenaient le savoir le plus complet. Ces rapports avec les petits de maternelle ont aussi entraîné des échanges entre Hakim, élève de CM2, et son père. L'enfant l'a en effet interrogé et il y a eu valorisation, mais de l'adulte cette fois.

 

Le journal quotidien en maternelle

 Au départ, des questions :

- Comment aborder et pratiquer l'écrit en maternelle ?

- Comment améliorer l'organisation de la classe ?

- Comment mieux communiquer avec les familles ?

Et un outil : le livre de vie de la classe.

Transformer le livre de vie, mémoire de la classe, en journal quotidien, outil de communication avec l'extérieur (autres classes, familles), me semble une piste intéressante que je propose aux enfants.

Se met alors en place, petit à petit, l'organisation suivante (notre journal existe depuis trois ans) :

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Cela implique une gestion du temps rigoureuse (dont je suis le garant) pour que chacun puisse partir le soir avec sa feuille :

 Calendrier - Menu : présentation du travail avant midi.

Bibliothèque : le livre est lu après la récréation du matin, il doit donc être choisi avant la récréation.

 Météo - Absents/Présents - Nouvelles : début d'après-midi.

 Avant la récréation de l'après-midi, la feuille est présentée à tout le groupe par le responsable des nouvelles pour modifications éventuelles avant tirage.

 Le journal quotidien permet aux enfants de

S'exprimer.

Communiquer leur travail aux autres

- dans le groupe-classe

- aux autres classes

- aux familles

Coopérer :

- en travaillant en équipes

- en aidant ponctuellement un copain

- en expliquant une démarche

- en respectant les lois notamment au niveau du temps.

Créer : histoires, dessins

 Évaluer le travail de chacun

- reconnaissance des compétences

- « aujourd'hui, je veux faire tout seul »

- participation des plus petits : dessins.

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Conclusion

 La pédagogie Freinet a pour ambition d'aider l'enfant à devenir un citoyen. Elle essaie de le sensibiliser dès son plus jeune âge aux principes démocratiques. Elle tente de lui enseigner le respect en le respectant, de lui donner des responsabilités institutionnelles et individuelles. De favoriser la coopération au détriment de la compétition. De pousser à l'interrogation quant à la transgression des lois avant d'accepter une sanction.

 Célestin Freinet a eu le mérite avec sa pédagogie et ses techniques, d'ouvrir la voie, anticiper, appliquer ses idées. Plus que jamais sa pédagogie est d'actualité.

 Des chercheurs de plus en plus nombreux confirment le bien-fondé de ses idées novatrices. En respectant la globalité de l'enfant, en estimant que le savoir-être est prioritaire sur le savoir-faire, en affirmant là nettement notre idéal social et politique (au sens large du terme) nous nous retrouvons entre autre, sur le terrain pédagogique de Legrand et de Claudie Ramond, psychologique de F. Dolto, sociologique de Maslow.

 Legrand disait : « ... En élaborant une communauté éducative qui requiert la participation active, libre et progressivement responsable de tous les enfants, à tous les niveaux de la scolarité... En considérant d'abord l'enfant dans l'élève, en lui donnant la parole, en lui permettant d'exister avec sa culture propre, son langage, ses coutumes, ses aptitudes et ses désirs... En partageant avec lui, dès la maternelle, le pouvoir ; pouvoir de gérer son temps en participant à l'élaboration de l'emploi du temps de la journée, de gérer l'espace en l'associant à l'organisation matérielle de la classe... »

 L'exemple de E Dolto et de sa Maison verte avec l'importance qu'elle donnait à l'émergence de la parole est là également pour nous conforter dans nos pratiques.

 Quant à Maslow, de nombreux ouvrages présentent sa pyramide qui comporte cinq niveaux de besoins, des besoins physiologiques aux besoins d'autoréalisation. Ces cinq sortes de besoins selon Maslow se hiérarchisent, c'est-à-dire ne se manifestent que si ceux qui les précèdent sont satisfaits.

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Claudie Ramond adapte dans son livre Grandir cette pyramide sociologique à des fins pédagogiques. Pour nous, en nous inspirant de Maslow, nous avons essayé d'établir une pyramide concernant plus particulièrement les enfants de maternelle en correspondance avec ce qui se fait en classe coopérative (cf. schéma ci-dessus). I1 va sans dire que nous sommes conscients que ce dossier est loin d'être complet. Il se veut démarreur de recherches. Mais ne sommes-­nous pas des praticiens-chercheurs au sein du Mouvement Freinet ?

 

 


Bibliographie

·       Françoise Dolto :La cause des enfants – Tout est langage – La difficulté de vivre , Livre de poche

·       Claudie Ramond : Grandir, Education et analyse transactionnelle, La Méridienne, Editeur Erès

·       Catherine Pochet – Fernand Oury – Jean Oury : L’année dernière, j’étais mort, signé Miloud, Editions Matrice

·       Marilyn Ferguson : Les enfants du verseau, Editions Calmann-Lévy

·       Revue Autrement : La maternelle, série Mutations, n°14, avril 30

·       Nicole Bouyala et Bernadette Roussille : L’enfant dans la vie, une politique pour la petite enfance, Documentation française

·       Pierre Guérin : Importance des représentations mentales initiales dans un processus d’apprentissage et expression libre, Nouvel Educateur, Document n°196, mai 1988, PEMF, Cannes

·       Madeleine Porquet : Un certain goût du bonheur, Editions Casterman

·       Célestin Freinet par lui-même, document sonore et livret de 48 pages – PEMF (Cannes)

·       Pourquoi-Comment ? La pédagogie Freinet : L’aménagement des cours d’école et Comment démarrer en pédagogie Freinet ? – PEMF, Cannes

 

 

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