Publication Mensuelle   n° 51  Avril 1950

 

Brochures d’Education Nouvelle Populaire

 

Raoul FAURE

La géographie vivante

 

 

Editions de l’Ecole Moderne Française

Cannes (Alpes-Maritimes)

   

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La géographie vivante

Préliminaire

« Un plateau c’est une plaine élevée » répètent encore à satiété de nombreux élèves de nos écoles, et cela même dans nos pays de montagnes où il n’y a qu'à lever la tête pour « voir » un plateau. Est-ce ainsi que nos élèves doivent apprendre de la géographie ? D’ailleurs doivent-ils savoir de la géographie, ou bien doivent-ils être aptes à comprendre la géographie ?

Nous apprendrons ce que c’est qu'un plateau en regardant d'abord un plateau du fond de la vallée. Nous le saurons mieux lorsque nous aurons gravi les pentes qui conduisent jusqu’à lui. Un plateau cela s’apprend avec les yeux, mais aussi et surtout avec les jambes et les bras. Quatre heures de marche et quelques rocs à escalader en s’aidant des mains, quatre heures d’efforts qui vous conduisent de Grenoble (215 m.) à Saint-Nizier (1.100 mètres) en passant par le Pas du Curé font plus, pour la compréhension de ce qu’est un plateau, de la vie sur ce plateau, que tous les discours.

De même il faut avoir cheminé à pied ou à bicyclette sur une longue route toute droite et en plein soleil pour comprendre ce qu’est la monotonie infinie de la plaine de Bièvre.

La définition n'apprend rien : ce n'est que paille vide de grain.

C’est d’abord en comprenant bien son propre pays que l’on arrivera à comprendre celui des autres. Pour l’enfant, pour celui qui n’a pas voyagé, surtout, il n’est de géographie que celle du milieu local, du milieu où il vit, qui l’imprègne tout entier ; milieu dont il a hérité en naissant.

Quoi de plus attachant que ce milieu, aussi déshérité semble-t-il être parfois !

Le milieu local c'est la maison où j’habite, ce sont les maisons voisines, c'est la route qui me conduit à l'école, ce sont les champs, les prés, les rigoles et les ruisseaux que je traverse, dans lesquels je joue avec mes camarades, où je travaille avec mes parents.

Le milieu local c'est encore l’atelier du forgeron, c’est l'usine où travaille mon frère, c’est le car qui m’amène parfois au marché avec ma mère, à la ville avec toute ma famille.

Quelle richesse dans sa pauvreté !

Le milieu local c'est la vie qui m’enveloppe et qui m'entraîne dans son tourbillon.

Le milieu local il est l'œuvre de ceux qui ont bâti ma maison, qui ont construit la route, le pont qui enjambe le ruisseau.

Il est devenu ce qu'il est parce que ceux qui maintenant reposent au nouveau cimetière ont travaillé, comme avaient travaillé ceux que l’on enterrait autrefois autour de la vieille église, juste à l'endroit où passe la nouvelle route qui a remplacé l'ancien chemin envahi maintenant par les ronces.

C’est ce « pauvre » milieu local qui imprègne tous ou presque tous les textes que nos enfants écrivent librement et qui constituent le centre même de l'enseignement à « l'Ecole moderne ».

Ecoutons parler nos élèves, et avec leurs petites histoires ils apprendront à lire puis à écrire.

Faisons-les et surtout laissons-les écrire. Donnons de la publicité à leurs écrits par l'imprimerie et les échanges interscolaires, tout notre enseignement prendra vie.

Les textes écrits, imprimés, diffusés et « leur exploitation » nous permettront d'ordonner peu à peu nos connaissances, de les orienter.

Quoi de plus passionnant que de parler de sa maison, de son chez soi ?

Lorsque l'intérêt est né, nous choisirons une maison bien caractérisée, assez près de l'école pour lui rendre visite de temps en temps. C’est à côté d'elle que nous observerons les travaux et les bêtes. C’est là que nous suivrons au fil des jours les travaux des champs.

Cette maison nous l'observerons, nous la dessinerons, nous la comparerons à d'autres maisons.

Les pierres dont elle est construite nous entraîneront vers la carrière voisine, les poutres de son toit nous guideront vers la forêt d'où elles proviennent.

Ses dépendances : étable, grange, cellier nous intéresseront par leurs dimensions qui dépendent des récoltes qu'on y remise, du fourrage dont on dispose, et de la ferme et de ses dépendances dont les matériaux nous avaient menés à la connaissance du sous-sol, nous irons dans les champs qui nous apprendront à regarder le sol.

Petit à petit aussi nous apprendrons que le toit, l'exposition de la maison, les ouvertures, l'épaisseur des murs sont fonction du climat dont nous observons chaque jour les manifestations.

C’est bien en écoutant « Ce que disent nos maisons », ce qu'elles disent du présent et du passé que nous apprenons la géographie locale.

C’est parce que nous savons que toutes ces études se groupent nécessairement autour de la maison, que le premier soin du maître - moderne qui arrive pour la première fois dans un poste nouveau est de s'imposer cette étude approfondie du milieu local. Et cette étude qu'il aura faite pour sa formation professionnelle, cette étude vivante lui aidera, au moment opportun, à conduire ses élèves dans les avenues du savoir. Comme avec les enfants, il n'est point de meilleure route que celle qui les entraîne à « l’école buissonnière », qui est l'école de la Vie, par la Vie et, pour la Vie, il cheminera avec eux en zigzag et il sera prêt à chaque instant à satisfaire et surtout à aiguiser leur curiosité.

Sans jamais rien imposer, il saura comment diriger tout « en se laissant mener ».

De l'échange des journaux scolaires, de la correspondance d'élèves à élèves naîtront des comparaisons. L’enfant fera des rapprochements, des comparaisons. Après avoir vu les différences, notre jeune élève recherchera les ressemblances entre son propre milieu et celui de ses amis lointains.

Bien vite une idée naîtra : Les autres pays ne ressemblent pas au mien. Rien que les noms de nos nouveaux amis, surtout s'ils sont Bretons, sont sujet d'étonnement, et portent à rire.

Il n'est pas de petits faits se rapportant aux coutumes, aux mœurs qui ne soient riches de conséquences.

Je me souviens de la surprise de mes petits Corbelinois lorsqu’ils apprirent que leurs camarades bretons se cachaient pour marauder quelques petits pois qu'ils avalaient goulûment en se caressant le ventre en signe de satisfaction.

« Marauder des petits pois », quelle drôle d'idée. Il n'y a qu'à ramasser des cerises en demandant l'autorisation et… même sans la demander.

Deux pays, deux genres de vie. Le petit pois cru est une gourmandise à Saint Philibert, et les cerises se gâtent sur les arbres parce qu'on ne les ramasse pas à Corbelin.

C’est cette notion que nos élèves ne trouveront nulle part ailleurs que dans leur correspondance interscolaire qui est la vraie notion géographique. La richesse ou la pauvreté en tel ou tel produit dépend du pays, de son sol, de son climat. Nous sommes surpris par une telle différence, nous voulons savoir pourquoi et nous posons des questions.

C'est parce qu'on a senti que « le petit rien » qui a motivé un texte libre est intéressant que les textes des enfants sont si lourds de sens pour eux. A nous de les solliciter et de les exploiter en surface et en profondeur.

- Quelle idée, dira le vieux ou le jeune maître, imbu de science toute faite, de perdre son temps à raconter et à imprimer une maraude de petits pois. Quelle hérésie de monter en épingle une action contraire à la morale, aucune part n'étant faite dans le texte à la sanction qu'a prise le maître contre l'auteur du vol. Et la morale, qu'en faites-vous, Monsieur... N’était-ce pas l'occasion d'une belle leçon sur le respect de la propriété, vous le féru de « méthodes actives » ?

- Non, Monsieur, nous n'avons pas de salive à gaspiller pour une bêtise pareille !

D'abord, qu'est-ce que deux gousses de pois pour un champ de pois ?...

Et puis... il y a une plus belle leçon de morale, que nous ne ferons pas d'ailleurs, mais qui se dégagera par la suite de nos curiosités et qui imprégnera, sans que nous insistions, tout notre enseignement.

Comme nous sommes curieux, nous voulons savoir comment on cultive les pois en Bretagne. Et... nous apprenons ce que nous ignorions : la récolte du goémon, la fumure des terres, la mise en valeur de terrain qui ne produirait presque rien sans cette lutte âpre de tous les moments contre un sol ingrat, la belle conquête des hommes qui dérobent à la mer ce qu'elle a en trop pour le transporter sur la mauvaise terre et lui taire produire de belles récoltes. Qui dira mieux, Monsieur le censeur ! Vos beaux discours ou bien la belle leçon d’énergie qui se dégage des faits ?

C’est cette étude désintéressée et sensible du milieu local qui sera pour nos élèves « un hymne à la gloire de l'homme et une reconnaissance de sa faiblesse », car ils comprendront vite que si ce qui a été fait est grand, ce qui reste à faire paraît encore infini,

L'enseignement de la géographie humaine par l'étude du milieu local et les échanges interscolaires nous permet de « préparer dans l'enfant d'aujourd'hui l'homme de demain. »

C’est pour cela qu’à l'Ecole moderne nous consacrons peu de temps à la géographie nomenclature, pas du tout à la géographie définition, juste ce qu'il faut à la géographie physique pour comprendre les différences entre les pays. C’est la géographie économique et surtout la géographie humaine qui nous sollicitent parce qu’ « elles remettent en p1ace l’homme dans son milieu, parce qu’elles font ressortir ses efforts, ses conquêtes sur la nature et apparaître les efforts qu'il reste à accomplir. »

Buts de l’enseignement géographique

Ces préliminaires nous permettent de fixer la valeur de l'enseignement de la géographie et les buts que cet enseignement se propose d’atteindre.

Les élèves adolescents qui nous quittent doivent pouvoir se débrouiller seuls dans la vie. Ils doivent être notamment capables de voyager seuls, de lire le journal et de le comprendre. ...

Ils doivent être capables de se perfectionner, de se cultiver.

Savoir lire un journal et comprendre ce qu’on lit alors que les différentes rubriques d'un quotidien nous entraînent, le 21 février 1950, de Washington à Valréas {Vaucluse}, de Lyon à Paris, de l'Alpe d’Huez à Roubaix, en passant par New York, l'Angleterre, Londres et Poitiers, rien qu'à la première page, cela représente déjà pas mal de connaissances.

Savoir établir l’itinéraire d’un voyage, tracer à l'avance ses étapes, étudier les excursions que l’on veut faire pour en tirer le maximum de profits et d'intérêts.

Et surtout avoir cette soif de connaissances, celle qui procure les plus grandes satisfactions lorsqu’on est capable de continuer « à se cultiver », posséder une certaine philosophie de la vie, qui ne devrait être qu’une lutte de la société pour le bien-être de ses membres (buts atteints par la géographie humaine). C'est vers ces buts que doit tendre notre enseignement et en particulier celui de la géographie.

Ce ne doit pas être un but lointain demandant une série de travaux fastidieux pour l’atteindre. Cet enseignement doit comme tous les autres apporter sa joie avec lui, sa satisfaction propre.

De même que l'enfant doit, dès qu’il lit, comprendre ce qu'il vient de lire, de même l'enfant qui  « fait de la géographie » doit sentir que ce qu'il a étudié est une nouvelle conquête, qui lui procure une satisfaction profonde.

Nos travaux de géographie doivent être, comme tous les autres, motivés. La motivation c’est : 1° la curiosité ; 2° les échanges interscolaires.

Eveillons la curiosité enfantine : curiosité pour tout ce qui l'entoure, curiosité pour tout ce qui est et un peu mystérieux, et notre enseignement sera donc naturellement basé :

1° Sur l'étude du milieu immédiat ;

2° Sur les échanges interscolaires.

Le rôle du maître – Sa formation

Le premier travail du maître est donc de se documenter sur le milieu local qu’il explorera avec ses élèves.

Chaque maître l’explorera pour son compte, suivant ses goûts, ses tendances personnelles. Pour ceux qui n’ont pas de techniques ou de plan particulier, voici un plan d’études de géographie humaine qui leur permettra de faire le travail approfondi et vivant et grâce auquel ils seront capables d'aiguiser la curiosité de leurs élèves et de la satisfaire.

(Il faut avoir du tact dans ses relations avec les paysans. Le paysan, méfiant, ne livre pas facilement ses secrets ; il se méfie des curieux. Il faudra confronter ses dires avec ceux de gens de différentes conditions : gros fermiers, ouvriers agricoles, artisans).

« Dis-moi comment tu te loges, je te dirai d’où tu es. » 

Le point de départ de l'étude c'est une maison : une ferme assez caractéristique du pays et dont la construction remonte à une centaine d'années au moins, au temps où la difficulté des transports ne permettait guère de construire qu'avec des matériaux trouvés à proximité.

Cette maison dépendait du sol et du sous-sol, du climat, et aussi d'une tradition artisanale qui marquait les pays (par exemple la forme du toit, des corniches, bandeaux, la décoration des linteaux, etc...).

1er GROUPE D'ETUDES. - LA MAISON ET SON GROUPE DEPENDANT (grange, étable, four, fontaine).

I. - La ferme c'est un atelier avec un abri pour le cultivateur et sa famille, un autre pour ses animaux et leur nourriture, des remises pour ses outils, des locaux pour ses travaux (pressoir, cellier, séchoir, etc...).

Emplacement, disposition générale des bâtiments et de la cour.

II. - La demeure du cultivateur. Dimensions, ouvertures, exposition ; le pourquoi ? La couverture, la forme du toit. Les matériaux de construction (bâtisse, toit, sol, plancher, plafonds, etc…).

IIbis  - Mêmes études pour les constructions annexes.

III. - D'où viennent les matériaux, carrières, sablières, gravelières, bancs d'argile, briqueterie, fours à chaux, si la maison est en pierres ? Bancs de terre, si la maison est en pisé ? Bois et forêts (charpentes).

Ceci amène à l'étude du sol, du sous-sol de la commune ou de certains cantons de la commune (terrains, roches, fossiles, relief).

2ème GROUPE D’ETUDES. - LA FORME DE LA MAISON. SA SITUATION (le climat),

Proximité ou éloignement des cours d’eau. Proximité ou éloignement des pentes de la montagne. L’orientation de la maison (l’ensoleillement).

La forme générale du toit, les détails, les protections (rideaux d'arbres, tuiles maçonnées, toits encastrés, etc...). Les ouvertures, grandeur, exposition, épaisseur des murs.

Ces formes dépendent du climat (pluie, vent, chaleur) ; elles dépendent aussi des traditions artisanales et d'influences extérieures.

Caractéristiques de celui-ci : pluviométrie, enneigement, ensoleillement, vents dominants.

Les ruisseaux et les rivières (utilité, dangers peut-être). L’hydrographie. L’eau à la maison, l’eau dans la commune.

 

3ème GROUPE D’ETUDES. - LES DEPENDANCES DE LA FERME, CE QU’ON Y ABRITE, CE QU’ON Y FAIT.

 Ce qu'on abrite dans la grange nous conduit aux cultures principales, à l'importance du bétail, à son rôle. Le tas de fumier, la fosse à purin, etc...

Recensement des cultures, de leur importance. Recensement du cheptel. Pourquoi ce cheptel ?

(Se méfier des statistiques agricoles communales qui sont fausses.)

 

4ème GROUPE D’ETUDES. - LE TRAVAIL HUMAIN.

La culture et l’utilisation des produits. Vente.

Monographie d'une ou deux cultures dominantes.

Les industries artisanales qui en sont la conséquence.

Les autres industries. Importance. Raison de leur installation.

Monographie d’une de ces industries.

Le commerce local : marchés et foires.

Répartition des propriétés.

Types caractéristiques de travailleurs, d’hommes.

Dispersion au groupement. Pourquoi ?

5ème GROUPE D’ETUDES. - LA VIE SOCIALE.

Relation des maisons, des groupes de maisons, des quartiers de la commune les uns avec les autres ; le commerce local ; le rôle du bourg du centre du village.

Les terrains communaux, utilisation. Eglise. Ecole.

6ème GROUPE D’ETUDES. - LES HABITUDES DE VIE.

Les appartements ; répartition ; disposition. Pourquoi ?

Importance. Pourquoi ?

Le mobilier, son adaptation aux exigences de la vie ; l’éclairage, le chauffage (dépend de la richesse ou de la pauvreté en bois, tourbe, charbon, etc...).

Les repas, les coutumes, les fêtes, les choses du passé (transformations progressives, histoire des routes, des chemins de fer ; influence). Le luminaire, les plaques foyères, les cadrans solaires ; les influences des coutumes, des traditions dans l’art de construire ; les influences venues d'ailleurs.

7ème GROUPE D’ETUDES. - LE VILLAGE ET LES PAYS VOISINS. LE VILLAGE DANS SON MILIEU GEOGRAPHIQUE. LA PETITE REGION.

Ressemblances et différences de ses différents éléments. Rôle du centre régional le plus proche. .

La préparation de la classe

Cette étude que le maître poursuivra (parfois avec le concours de ses élèves qui lui apprendront plus que les bouquins) basée sur la maison de l’homme, permet de faire le tour des points les plus importants de la géographie locale, et d’être prêt à les étudier avec les enfants au moment opportun.

Ces travaux du maître, qui exigent du temps et de la patience, constituent la vraie préparation de la classe.

Cette monographie qu'il établit peu à peu (elle comporte une partie historique) est pour lui plus fructueuse, plus passionnante que 1a préparation au jour le jour d’un travail divisé en tranches horaires.

Seuls ces travaux préliminaires comptent et lui permettent de dominer son enseignement. Ils lui permettent de noter ensuite au jour le jour l'avancement des travaux de ses élèves et de parer par quelque chose de vivant, de substantiel, d’attrayant à une carence enfantine momentanée (pas de textes libres, ou textes libres sans intérêts majeurs certains jours).

Il lui est facile alors de susciter une étude laissée en réserve ou simplement entrevue.

Comment aborder ces études avec les élèves ? Y a-t-il un ordre à suivre ? Non, et surtout pas avec les plus jeunes. C'est le texte libre qui fera naître l’intérêt, et lorsque l’enfant sera éveillé rien n’empêchera de pousser à fond une étude jusqu'à ce qu'un autre centre d'intérêt naisse qui accapare à nouveau.

Nos enfants aiment découvrir pour satisfaire leur curiosité et pour satisfaire celle des autres.

Nous ne faisons pas de géographie systématiquement à heure et date fixes.

Il. se peut qu'un texte libre nous entraîne immédiatement à une étude géographique. Il se peut aussi que l’intérêt pour d’autres disciplines passe avant : Calcul, Dessin, Histoire, Sciences, etc..., et ne laisse qu’une toute petite place à la géographie… Nos élèves ne passent-ils pas huit ans avec nous ? En huit ans nous avons bien le temps d'équilibrer notre enseignement - même en un mois... D’ailleurs, les dernières instructions, les nouveaux programmes ne nous laissent-ils pas une certaine latitude à ce sujet ?

La géographie trouve sa place dans nos complexes d’intérêts.

I. LES COMPLEXES D'INTERETS. – Ils dérivent, avec les plus jeunes, d’un texte libre ; avec les plus âgés, quelquefois d’une étude que l’on s'est imposée, pour satisfaire une demande de correspondance, ou pour la justification de questions qu'on s'est posées.

UN COMPLEXE - La grange de Marc.

Marc, ce matin, nous a appris par son texte qu’hier jeudi, en jouant dans sa grange, il était passé à travers l'abat-foin jusque dans le râtelier des vaches.

Nous décidons d’aller chez Marc.

Cette grange abrite de grandes quantités de foin. Deux grandes piles égales, l'une de trèfle, l'autre de foin, provenant de ses pâturages du flanc de la montagne. Une troisième pile plus petite est constituée par du foin de marais qui ne convient que pour la litière des bêtes.

Nous nous promettons d'aller voir les « passières de trèfle » entre les vignes de la plaine, d’étudier ses marais, et de nous rendre à « sa montagne ».

Trois sorties en perspective que nous ne pourrons faire tout de suite à cause de l’éloignement des lieux, que nous inscrivons à notre plan de travail, et que nous ferons en temps opportun. Aujourd’hui ce sont les bêtes qui nous intéressent et qui deviennent notre centre d’études : c'est un complexe qui sollicite des études scientifiques, du calcul, des études géographiques.

Les vaches, une vache, l’élevage, le lait, la vente du lait, etc...

Après études des conditions d’élevage réalisées chez Marc, bien entendu.

Par association d’idées dans l’espace, nous essaierons de nous représenter des pays d’élevage... de plaine, comme la plaine de Marc... des pays d'élevage de montagnes, de « remues », de transhumance.

Par association d’idées dans le temps, nous essaierons de comprendre ce qu’était le pays… quand mes parents étaient jeunes, quand il n'y avait qu’une vache et... des chèvres à l’étable, quand mon grand-père s'en allait pendant quatre ou cinq mois se louer comme pâtre, etc...

Nous partirons toujours de ce que nous connaissons pour imaginer ce que nous ne connaissons pas, et c’est ici qu’intervient le matériel d’enseignement. Nous devrons avoir à notre disposition un matériel d’enseignement varié : gravures, films fixes, films animés, bibliothèque de travail, des  textes extraits de nos journaux scolaires, des fiches, des Enfantines, des disques.

II. LES IMAGES. LES PHOTOS. - Ce sont les images, surtout les photographies qui parlent aux enfants, qui les font s'évader du milieu ambiant vers des horizons lointains, imprécis d'abord, acquérant de la netteté peu à peu, se fixant dans la mémoire, se mettant en place dans l'espace.

L’enfant retient ces images, surtout si elles reviennent périodiquement sous ses yeux.

Notre collection collective et permanente de photos doit être simple, complète, mais limitée. Les photos sont classées de telle façon qu’elles peuvent servir à plusieurs fins. (Voir B.E.N.P. « Pour tout classer »).

Au sujet du complexe Elevage, nous avons par exemple une photo représentant un pâturage en Sologne, avec vaches, arbres, étang ; une deuxième avec pâturage dans le Jura, troupeau, montagne boisée dans le fond et maison de montagne. Ces deux photos sortent. Mais la photo Sologne sortira lors du complexe étangs, pays d'étangs ; celle du Jura lors du complexe : le relief de chez nous, montagnes, pays de montagnes, mais aussi lors du complexe : le toit de nos maisons, et toutes deux réapparaîtront lorsque nous étudierons plus tard et plus systématiquement: les régions de chez nous.

Cette manipulation, cette observation souvent répétées de quelques images bien choisies permettront aux enfants de se faire une idée de plus en plus nette, plus précise des formes du relief ; des influences de la nature du sol, du climat sur la végétation, sur les cultures, sur l'exploitation par l’homme des ressources naturelles qui s’offrent à lui, de sa lutte incessante contre la nature parfois hostile ; en même temps que les images se mettront en place dans l’espace, là d’où elles viennent, et qu'elles se placeront d'elles-mêmes, sur la carte qui est une représentation figurée d'un coin de la terre.

Quand le mot Bretagne sera prononcé devant l'enfant, immédiatement ce mot s'associera à des images de Bretons, à des bateaux, à une côte rocheuse ; il entendra mugir une mer furieuse. Il aura présente à l'esprit la forme bizarre et découpée de cette presqu'île qui s'avance dans la mer comme pour partir à sa conquête. Il y associera quelque chant de marin ; un air de biniou et, dominant le tout, le bruit des flots qui viennent se briser sur les récifs.

L’étude de nos complexes fait appel à tous les moyens techniques dont nous pouvons disposer : photos, films, phonographe, radio, cartes.

Moyens mis en œuvre après étude des documents provenant de notre correspondance interscolaire, de nos B.T. et de nos Enfantines.

Où se procurer ces images, ces photos exactes, caractéristiques ? Jusqu'ici, l'Institut n’a pu envisager la publication de vues géographiques. L'édition immobiliserait de gros capitaux et nous avons plus pressé à faire. Nous nous les procurerons dans le commerce. Il nous faut des images assez grandes, format 18/24 ou 24/30. Le 24/30 surtout permet une bonne observation d'ensemble et de détail. On classera ces vues dans le fichier fourre-tout ou bien dans un classeur spécial.

Un panneau d'affichage, où elles resteront plusieurs jours, est nécessaire. Une plaque de contreplaqué, trois baguettes à feuillures, deux élastiques permettront d'en construire un très facilement. Il pourra recevoir des images de toutes dimensions, depuis les fiches jusqu'au format 24/30, sans le recours des punaises qui les détériorent.

A défaut de tableau d'affichage, un simple fil tendu contre le mur, des pinces à dessin permettront de suspendre les photos comme le linge qui sèche.

Les gravures sur bristol ou carton souple conviennent mieux que les photos sur papier qui coûtent moins cher mais s'usent plus vite. Des protège-vues en matière transparente : celluloïd, rhodoïd, permettent l'examen individuel des photos à leur place, sans risque de les salir, de les endommager. Leur achat constitue une économie.

Quelques collections de vues géographiques intéressantes

Le Manuel général a édité avant-guerre plusieurs séries de vues géographiques.

France, le Monde et les Colonies françaises, l’Europe.

Tirage sur papier nécessitant un collage sur carton. 24 X 30.

Vues assez bien choisies, très nettes, chacune comportant un petit commentaire.

Nous ignorons si Le Manuel général en a repris l’édition.

La Documentation Photographique, publication bimensuelle, publie chaque mois une série de vues scientifiques ou géographiques sur des sujets variés.

Grandeur des vues : 20 X 24 ; en héliogravure, sur papier assez fort ; avec quelques lignes de commentaires sous chaque photo et une ou deux pages documentaires.

Editions de la Présidence du Conseil.

Direction de la Documentation : 14-16, rue Lord-Byron, Paris (8e):

Les Editions « pour l'Enseignement Vivant ».

L. Beau, rue Henri-Cœur, Domène (Isère), ont trois collections de « vues géographiques » :

1° Géographie générale ;

2° La France vivante (en cours d'édition) ;

3° L'Empire Français (épuisé).

Chaque collection comprenant 100 vues 24/30, sur bristol souple et fort, avec en haut et à gauche un cadre pour recevoir le numéro de classification décimale. Quelques lignes de texte facilitent la compréhension de la photographie.

La notice est éditée sur fiche 21/27, carton souple, imprimé sur les deux faces.

- La collection « France Economique », épuisée en grand format, existe en pochettes format bon-point, avec commentaire au dos.

Pour les prix et conditions de vente, s'adresser à l'Editeur,

- Une collection « Les grands pays du monde » est en préparation.

Collections de films fixes.

Assez nombreuses. Celles de chez Larousse sont adaptées aux manuels que cette maison édite.

L’ancienne édition « Photoscope » est trop touffue.

Nous avons nettement l'impression que de nombreux films ne sont qu'un assemblage de photographies de valeurs très inégales.

MATERIEL INDIVIDUEL. - Il est bon que les élèves disposent d'un matériel individuel de plus petit format : cartes postales, vignettes... bons points. Si ce matériel est la reproduction réduite du matériel collectif, cela sera parfait. L’élève sort et examine à volonté ses images. Il les compare aux images affichées, constitue un album illustré personnel. Son bagage s’enrichit et alors seulement les mots deviennent évocateurs.

III. LES BROCHURES BIBLIOTHÈQUE DE TRAVAIL surtout sont précieuses. Elles viennent préciser, expliquer certains détails de nos études et nous donnent des vues d’ensemble. Grâce à elles, nos complexes se développent harmonieusement.

ACTIVITÉS ANNEXES, LE MUSÉE VIVANT, LES COLLECTIONS. - La constitution de notre Musée Scolaire (voir B.E.N.P. « Le Musée Scolaire ») à laquelle nous travaillons toujours car notre Musée est essentiellement mobile, transformable, contribue elle aussi à la formation géographique.

MUSÉE TECHNOLOGIQUE, MUSÉE HISTORIQUE, MUSÉE GÉOGRAPHIQUE sont des réalités vivantes qui nécessitent des recherches, des mises en place dans le temps, dans l'espace (granit provenant de Bretagne, basalte d'Auvergne, porcelaine de Limoges, bouchons des Landes, eucalyptus d'Hyères, algues de Bretagne, papillons d’A.E.F., plumes métalliques de Boulogne, etc...).

LA COLLECTION DES ÉTIQUETTES, des annonces illustrées, des parties d'emballage, des prospectus, des dépliants du Syndicat d'Initiative passionne les élèves. A l’école, tous ces documents sont classés dans de grandes enveloppes : produits végétaux, produits industriels, paysages, etc...)."

Au fur et à mesure des besoins, on vient y puiser et ils servent à la confection des cartes imagées et vivantes qui illustrent les travaux des élèves.

LA COLLECTION DE TIMBRES-POSTE, si elle est bien conduite, si les timbres sont bien classés, est particulièrement enrichissante.

Du plan à la carte

Ces images il faut les mettre en place, à leur place exacte sur la terre, à leur place exacte sur la carte qui est une représentation figurée du monde ou d’une partie du monde.

C’est ici qu’intervient la CARTOGRAPHIE, et c’est par la CARTOGRAPHIE que nous apprendrons la NOMENCLATURE.

1. DU MODELAGE AU DESSIN. - Après notre première sortie faisant suite aux observations de notre maison, nous la modelons en terre glaise et la mettons en place sur un carton - un plateau.

Par modelages successifs et faisant suite à nos acquisitions, nous mettrons en place en essayant de respecter les proportions, les dépendances, de la maison, la grange, les remises, les jardins, les maisons voisines, les chemins, l’école si possible...

En retirant de la planche, du carton nos maisons, nos chemins, nos jardins, ils y laisseront leur trace (projection verticale de leur contour). Notre plan se sera dessiné tout seul et nous saurons le lire. En procédant ainsi, nous atteindrons la perfection pédagogique.

Souvent, hélas, la place nous manquera, nous serons peut-être obligés de brûler les étapes. Il nous sera difficile de conserver pendant des semaines un travail qui s’étendra de plus en plus en surface.

Dans tous les cas, il faut commencer par le modelage d’un petit quartier avant de passer au dessin.

II. LE PLAN. - Nous avons donc obtenu le dessin représentant sur une surface horizontale la protection verticale ou vue de dessus (ces mots sont pour le maître, non pour les élèves) des maisons, granges, rues, jardins, champs, de la partie du pays que nous avons prospectée. Nous avons dessiné notre plan ; c’est lui maintenant qui va nous servir.

Les rectangles de nos maisons nous les colorierons, tous de la même façon, rouges ou gris comme leurs toits ; les jardins, les champs en jaune ; les bois en verts ; les chemins sont réduits à deux traits parallèles ; les ruisseaux sont en bleu.

Notre dessin est à grande échelle. Nous nous y reconnaissons facilement, nous apprenons à voir les choses « par-dessus », à réduire leur représentation à un seul contour.

Comme la maison que nous étudions n’est pas trop loin, notre dessin comprend peut-être la maison et l’école, mais notre carton sera vite trop petit. Nous n’aurons plus de place pour y figurer les champs, l’étang, la rivière, les villages, l’usine que nous allons prospecter peu à peu. Il convient de trouver une solution. Notre dessin ne peut s'agrandir, nous allons le faire plus petit. Si les dimensions que nous donnons à notre maison sont deux fois plus petites, nous y mettrons quatre fois plus de choses. Nous acquerrons, peu à peu la notion d'échelle, et comme nos acquisitions en calcul vont de pair, cette notion d'échelle se précisera. Si les dimensions de nos dessins sont dix fois plus petites, cent fois plus petites que les dimensions réelles, nous avons un plan cent fois, dix mille fois plus petit que la réalité.

Au début; notre plan était approximatif, mais maintenant que nous savons nous servir d'un mètre, d’un décimètre, maintenant que nous savons prendre et lire des mesures, nous ferons des plans aussi exacts que possible. D'ailleurs, au cours de nos promenades, nous avons appris à nous servir de la boussole, nous avons appris à nous orienter. Nous connaissons les points cardinaux. Nous savons que la maison de Marc est à l'est de l'école, et qu’à l’est de la maison de Marc, il y a la rivière, qu'au nord de sa maison se trouvent « ses îles », et qu'au sud il y a ses « bauchères ».

Sur notre plan, nous placerons donc les indications de la boussole. Une petite étoile à quatre pointes ou simplement une flèche avec les initiales N. et S. en place. Nous orienterons notre plan pour le lire. Nous apprendrons aussi à le lire sans l'orienter. En avançant ainsi peu à peu nous serons capables de lire le plan cadastral, le plan des sections qui nous intéressent, des massifs, le plan de la commune.

Ces études progressent lentement. Elles ne peuvent aller que de pair avec nos connaissances en calcul. Nous nous servons pendant longtemps peut-être de notre premier dessin mais nous progresserons a coup sûr.

III. DU ROLE DE LA CARTE D'ETAT-MAJOR. - Quand nous comprendrons bien le plan de notre petit pays (cela demande plusieurs années) nous passerons à l'étude de la carte d'Etat-major, qui nous permettra alors en sens inverse de préparer à l'avance les itinéraires de nos promenades un peu plus longues.

La carte d'Etat-major est une représentation exacte du terrain au moyen de signes conventionnels ; ce sont ces signes qu'il faut comprendre. Nous les étudierons sur le terrain. Si nous avons la chance de nous trouver dans un pays dont la carte en couleur existe, le travail sera plus aisé, plus évocateur.

Ce sont les routes, les villages, les rivières, les champs qui nous frappent d'abord.

Nous reconnaîtrons d'abord notre école, notre église, nos chemins familiers, nos maisons.

Nous remarquerons vite les courbes du niveau et le dessin qu'elles font, lorsqu'elles se rapprochent ou s'éloignent. Nous vérifierons ces caractéristiques du relief sur le terrain.

Nous apprendrons à lire cette carte en nous en servant (*). - Nous ne ferons plus une sortie, une excursion, sans en préparer l'itinéraire.

Ce sera le travail des grands élèves, alors que les plus jeunes en seront encore à 1a joie créatrice du plan par modelage.

(*) C'est toujours l'histoire de la bicyclette. Il ne s'agit pas de la démonter avant de s'en servir, mais bien de l'enfourcher, de s'y tenir en équilibre tout en avançant.

IV. CAISSE A SABLE, PLANS EN RELIEF. - Nous pourrons alors passer au plan en relief.

Nous pouvons matérialiser notre pays au moyen de la caisse à sable. C'est un tiroir garni de sable humide auquel il est facile de donner approximativement la forme que l'on veut. Des cailloux, des morceaux de roches facilitent la mise en place de gros reliefs, collines, montagnes. De petits cubes coloriés, de petites pyramides de bois, de la fine frisure de bois, de plus gros copeaux colorés eux aussi permettront la mise en place des villages, des cultures, des forêts, des lacets ; des rubans bleus serviront pour les ruisseaux; de la poussière de craie blanche pour les routes et les chemins.

La caisse à sable permet ainsi la figuration de paysages connus, étudiés. En aucun cas, elle ne permet l'acquisition de notions inconnues jusqu'alors. Ce n'est pas la caisse à sable qui nous apprendra quoique ce soit de nouveau. La caisse à sable ne doit pas remplacer le livre de définitions : définitions stériles et nuisibles.

Employée trop tôt, la caisse à sable risque de fausser les idées des enfants si on lui demande trop. Elle peut et doit nous permettre de matérialiser quelques formes de relief que nous avons étudiées et aperçues, entrevues lors de l'étude de nos photographies, lors de la projection de nos films.

LE PLAN EN RELIEF. - a) Nous pourrons modeler d'une façon approximative, avec de l'argile ou de la pâte plastique, les formes du relief comme nous le faisons avec la caisse à sable, puis laisser sécher et peindre.

Ce procédé aura un avantage : celui de pouvoir conserver la maquette réalisée.

b) Nous pourrons réaliser un plan plus exact en partant de la carte d'Etat-major et de ses courbes de niveau.

A paraître : Les recettes diverses seront rassemblées en une B.E.N.P. : « Plans et Cartes en relief ; Techniques diverses de construction ».

V. DE L'EMPLOI DES CARTES GEOGRAPHIQUES. - Dès que notre étude du milieu local s'avance, dès que nous avons des correspondants disséminés à travers la France, nous avons recours à la carte murale.

Nous y placerons les pays de nos correspondants en disant simplement : c'est ici sur la carte qu'il faut les placer et savoir les retrouver. .

Cette carte restera quelque chose de magique pour nos jeunes élèves, mais ils se rendront vite compte qu'il y a beaucoup de choses sur une carte : de grandes étendues vertes, de grandes étendues marron, de grandes étendues bleues. Des mots écrits en grosses lettres, des mots plus petits, des cercles, des points.

Nous leur dirons simplement, au fur et à mesure de leurs découvertes : ce qui est vert ce sont les plaines, le bleu c'est la mer, etc... Cela nous suffira pour quelque temps, surtout si nous n'en sommes encore qu'au stade de la confection avec de petites .maquettes d'argile de notre premier plan. Nous nous servirons de la carte dès que nous ferons une acquisition nouvelle par association dans l'espace.

Nous mettrons nos paysages en place... et peu à peu la forme même de la carte deviendra familière.

Un temps viendra où nous expliquerons d'autres détails de la carte parfaitement inutiles au début et pendant longtemps (méridiens, parallèles, etc...). De même nous apprendrons à nous servir du globe.

VI. LA CARTOGRAPHIE. - Peu à peu nous comprendrons la carte, nous saurons la lire, et nous comprendrons aussi comment elle a été faite. Notre premier plan, qui était très grand, était une reproduction réduite, très réduite, d'un petit coin de notre pays. Dans le plan cadastral, la représentation est encore plus petite parce qu'il contient un plus grand pays.

La carte d'Etat-major, son échelle, son carroyage nous apprennent plus tard comment on fait les cartes. La carte devient une réalité très vivante car au fur et à mesure de nos conquêtes, nous l'avons habillée. Nous y avons associé toutes les images, toutes les idées  acquises.

Nous y aurons mis les vignes, le blé, les rivières, les mines, les grandes usines, le nougat de Montélimar et la moutarde de Dijon, les automobiles Peugeot, les avions de Toulouse. Nous serons beaucoup plus loin puisque les fourrures nous auront entraînés dans les forêts du Canada ou de Russie, les oranges nous auront conduits en Afrique et les baleines tout près des pôles, le corned-beef jusqu'à Chicago.

Nos connaissances se seront précisées dans notre esprit car au fur et à mesure nous aurons fait notre propre carte, que nous conservons dans notre livre de vie.

 

LE ROLE IMPORTANT DU LIMOGRAPHE. - C'est là que le Limographe nous rendra de grands services. Il nous procurera des cartes exactes, nettes et en nombre indéfini.

Un croquis par décalque sur les stencils papier est très vite dessiné. Un grand élève peut s'en charger. Il transporte sur papier transparent le croquis à reproduire, sans oublier l'échelle (tous les croquis de la France à la même échelle autant que possible).

A l'aide de papier carbone il la décalque sur le stencil. Le trait est très apparent, les contours sont très nets. Il n'a plus qu'à les graver avec le poinçon.

Le tirage des vingt, trente, quarante exemplaires nécessaires est vite fait et chacun, grand et petit, se trouve en possession d'un croquis qu'il n'a plus qu'à compléter, colorier, habiller de petits dessins et classer dans son livre de vie.

Grâce au Limographe (les stencils peuvent se conserver entre buvards et servir pour plusieurs tirages) nous pourrons, par répétitions variées, devenir « très forts » en nomenclature. Sans être obligés d'apprendre de mémoire des définitions déroutantes et des listes de mots sans vie : La Seine a pour affluents rive droite l'Aube, la Marne, etc... ".

On trouve dans le commerce, sous le nom de « Géocontour », des timbres de caoutchouc qui donnent rapidement des croquis géographiques qu'il n'y a plus qu'à compléter. Mais le Limographe les remplace à un meilleur prix.

Cette mécanisation, nous la varierons dans ses formes. Certains croquis limographiés ne contiendront que quelques points de repères. Les enfants devront, s'ils le peuvent, les compléter sans aide. Les croquis à compléter serviront au maître de moyen de contrôle efficace et rapide.

LE PICHIER DE CARTOGRAPHIE. - Si nous le désirons, il sera facile d'établir un fichier de cartographie. Sur fiches, nous dessinons des croquis aux formes simplifiées avec indications de l'échelle et carroyage, carreaux de 2 cm. par exemple (échelle l cm. pour 25 km.). L'enfant les reproduit avec le carroyage qui lui plaira suivant la grandeur de la carte qu'il veut faire.

Il a un grand papier, il peut faire des carreaux de 4 ou 8 cm., et il aura des cartes. à l'échelle de 2 cm. pour 25 km., ou de 4 cm. pour. 25 km. Il sera bon de numéroter les carreaux sur la fiche à gauche, et en haut.

LA CARTE ÉLECTRIQUE. - LE PUZZLE GÉOGRAPHIQUE.

FAISONS LE POINT DES CONNAISSANCES ACQUISES À 11 ANS OU 12 ANS PAR LES ENFANTS. - Sans faire de géographie systématique, sans programme rigide, que savent les enfants de 11 ou 12 ans ? Ils ont cinq ou six ans de pratique. Ils ont par associations d'idées fait plusieurs fois le tour du monde. Leurs connaissances sont assez étendues, leurs idées géographiques assez claires ;

les mots du vocabulaire géographique ont un sens. Les noms des pays s'associent à des images précises.

Ils connaissent leur petit pays. Ils ont compris que la vie y est conditionnée par le sol et le sous-sol ; par le relief, par l'eau, par l'industrie des hommes.

Il sait que les relations avec les pays voisins dépendent des moyens de communications et aussi des divisions administratives et qui, aussi illogiques soient-elles, conditionnent une partie de la vie (chef-lieu de canton, gendarmerie, postes, chef-lieu du département, etc.).

Ils se sont rendu compte du rôle de l'homme qui, dans son pays et dans d'autres pays, a su plier les éléments naturels à sa fantaisie pour les asservir à ses besoins. Il a compris le sens de cette lutte éternelle de l'homme qui n'a jamais terminé sa conquête.

Ce côté humain de la géographie les a frappés, les a captivés.

En même temps, ils ont acquis des notions de plus en plus précises, les exercices de cartographie leur ont appris à « se débrouiller » avec une carte. Ils sont aptes à étudier la géographie d'une façon plus systématique.

A 11, 12 ans, nos élèves vont se diriger les uns vers l'enseignement du second degré, les autres vers la classe de fin d'études. Les méthodes de travail qu'ils ont employées doivent leur permettre des études profitables, car ils commencent à être maîtres de leurs techniques.

Le plan de travail

I. COMMENT ENTREPRENDRE ET ORGANISER L'ÉTUDE SYSTÉMATIQUE DE LA GÉOGRAPHIE ?

Le rôle du plan de travail est capital.

Nous établissons notre plan d’études pour l'année en tenant compte des programmes, mais comme des sujets d’études peuvent surgir qui ne sont pas prévus, nous ménageons des cases blanches, que nous garnirons au fur et à mesure.

Ce plan est communiqué aux élèves si on ne l'a pas établi avec eux. Il est affiché dans la classe, à côté du journal mural.

Si un texte libre, ou une question de nos correspondants, nous amène à étudier tel point de notre plan de travail annuel, nous l’inscrivons sur notre plan hebdomadaire.

Si le texte libre ne nous invite pas particulièrement à des études géographiques, nous choisissons une question sur notre plan annuel, ce sera notre tâche de travail.

COMMENT ACCOMPLIR NOTRE TACHE DE TRAVAIL ? - Nos grands élèves ont des techniques de travail, ils ont le matériel indispensable à leur disposition.

Leur travail consistera surtout en l'ordonnancement des connaissances qu'ils ont acquises les années précédentes ; il ne sera fructueux que si leur bagage est riche et abondant. Leur travail sera un travail de synthèse, une révision de ce qu'ils savent et un approfondissement de leurs connaissances. Ils essaieront de se représenter d'une façon aussi précise que possible le milieu étudié, son aspect physique, les conditions de vie des hommes, qui y habitent, leurs caractéristiques générales. Toutes conclusions provisoires appuyées sur des documents.

II. TRAVAIL DANS UNE ECOLE À TOUS LES COURS OU DANS LES ECOLES OU LE GROUPE DES ELEVES DE FIN D’ÉTUDES N’EST PAS AUTONOME.

CONFÉRENCES D'ÉLÈVES - EXPOSÉS. - Le Groupe de Fin d'Etudes est chargé de présenter à ses camarades le pays, la région, l'activité humaine, dont le plan de travail a prévu l'étude.

Bibliothèque de travail, fichier, cartes géographiques, images, musée, sont mis à contribution.

Les divers atlas qui sont à la B.T. (les élèves n'en ont pas de particulier) peuvent fournir un schéma de travail ; le maître, interrogé, indique en gros les tâches à accomplir, souligne les points faibles au fur et à mesure de leur réalisation ; il signale de nouvelles sources de documentation, communique celles de sa bibliothèque personnelle...

Le chef de groupe distribue le travail à ses équipiers.

1° LA CARTE A GRANDE ECHELLE {Nous recommandons le papier à couvrir bulle ; une grande feuille de même format que nos différents panneaux d'affichage).

La carte sera dessinée sur la partie gauche (procédé du carroyage) avec indication de l'échelle ; les contours, les fleuves seront très nets et tracés de préférence à la plume-bâton. Les montagnes indiquées, par gros massifs coloriés avec indication des lignes de faîtes. Les inscriptions de la nomenclature écrites en script assez gras, très lisiblement.

La partie de droite sera réservée pour la notation des idées essentielles, pour les schémas, les statistiques, le tout écrit avec la plume-bâton.

Cette carte sera habillée avec tous les documents qu'elle pourra contenir : vignettes et photographies, étiquettes, dessins, doivent en faire une carte parlante très vivante.

Les fiches de renseignements, les fiches folkloriques, les B.T., les réponses aux demandes de renseignements faites aux écoles correspondantes, les grandes vues géographiques extraites du fichier spécial étaieront l'exposé, qui devra être prêt pour la date prévue.

 

AFFICHAGE DES TRAVAUX. - La carte et le topo qui l'accompagne, après leur présentation, prendront place au panneau d'affichage et y resteront jusqu'à ce qu'un travail suivant vienne les remplacer.

La présentation par les enfants sera complétée par la projection de films fixes et animés, par l'audition de disques folkloriques si possible.

Dans une classe autonome de Fin d'Etudes le travail pourra être effectué de la même façon ; les travaux particuliers de chaque élève du groupe devenant dans cette classe nombreuse des travaux de groupes. Mais nous exigerons que chaque élève, en plus de sa participation aux travaux de groupes confectionne une petite carte vivante qui prendra place dans le livre de vie, alors que dans les classes sans « fin d'Etudes autonome » les élèves se contentent d'un croquis, étant davantage occupés par le travail collectif.

Pour varier le travail, l'exposé ou la conférence pourront s'intituler parfois :

III. COMPTE-RENDU DE VOYAGE OU PRÉPARATION DU VOYAGE.

Ces conférences comporteront :

1° L’étude des moyens de communications pour se rendre dans le pays à visiter. (Utilisation du livret Chaix, des cartes routières, horaire, changement de train, kilométrage, coût, durée du voyage.)

2° Indication des paysages à voir.

3° Visites particulières à entreprendre (usines, travaux, etc…).

4° Fêtes locales, coutumes, mœurs particulières.

Le tout accompagné des documents, cartes, travaux exécutés.

IV. LES LEÇONS DU MAITRE. - Si le maître « fait encore des leçons, celles-ci présentant le travail des élèves, qu'elles soient brèves.

Qu'elles consistent surtout dans l'indication des travaux que les élèves auront à faire pour justifier ses affirmations.

LEÇON. - LE JURA.

Aujourd’hui, vous étudierez le Jura.

Situation dans l'espace, sur la carte.

Dimensions (un élève les mesure grâce à l'échelle de la carte).

Observations particulières : une partie est en Suisse.

Quels documents possédez-vous ?

Les journaux scolaires.

Que savons-nous déjà ?

Formes particulières du relief : rappel, croquis au tableau.

Les principaux sommets (voir la carte), cols.

Allure générale du massif, coupe.

Le climat, les vents qui amènent la pluie.

Il faut s'attendre à trouver un pays de montagnes, un pays aux faibles ressources naturelles (hormis du sel, il n'y a pas de matières premières, pas de houille, l'altitude n'est pas assez élevée pour y trouver de houille blanche en quantité).

Cependant le Jura est une région prospère grâce à l'opiniâtreté et l'initiative des hommes. Contrairement à ce que l'on peut croire, c'est la partie aux reliefs les plus accusés, la partie que l'on nomme « la montagne » qui est la plus riche. La grande industrie, l'industrie lourde n'a pas pu s'y installer. La caractéristique c'est l'industrie artisanale, avec coopératives de production travaillant les matériaux du pays (bois, lait) ou des matériaux représentant une grande valeur sous un faible volume (pierres précieuses, horlogerie), utilisant la force motrice naturelle des rivières, industrie installée ou à domicile et de caractère familial, ou auprès des rivières dans la vallée. (Unité géographique : le val).

Pas de grandes villes (le val est trop étroit) mais des centres actifs, sur les plateaux ou dans la montagne : Oyonnax, Saint-Claude, Morez, Pontarlier, Lons-le-Saunier en bordure.

La seule ville, Besançon, au pied de l'extérieur du massif, doit sa richesse au travail du montagnard (mise en place des pièces d'horlogerie, fabriquées par les Jurassiens).

Un changement cependant se manifeste : des fabrications nouvelles (matières plastiques, par exemple) exigent de plus gros capitaux. L'industrie a une tendance à revêtir une forme capitaliste (Oyonnax). Les coopératives fruitières se voient remplacer par de grosses firmes qui achètent le lait et le transforment en beurre, gruyère, etc..., dans de véritables usines.

Ce court exposé n'est qu'un canevas, un plan général de travail, indiquant les recherches et travaux à exécuter comportant pour les élèves :

Un modelage des formes du relief.

Une coupe à travers le Jura, le rapprochement des photographies. (Jura-Chartreuse, par exemple, précisant l'aspect physique du pays).

Recherches de tous documents donnant un sens aux affirmations du maître : 1° Fiches météorologiques ; 2° Graphiques des superficies recouvertes d'arbres, d'herbe (photos) ; 3° Une seule  petite région cultive la vigne (photos, étiquettes) c'est celle des mines de sel (photos, étiquettes) ; 4° L'importance du val (photographies, lectures à trouver) ; 5° Rechercher et justifier l'activité des villes indiquées (photos, produits, étiquettes, réclames, emballages ; 6° La vie humaine (lectures) ; Les coopératives (documents : emballage de beurre en particulier) ; La tendance à la concentration capitaliste (les grandes marques de fromages : « La vache qui rit », « Gruyère Comtois », « Nestlé »).

Deux produits différents, deux époques différentes.

L'argenterie du Jura : couverts en bois vendus autrefois par les colporteurs ;

Les matières plastiques : couverts en galalithe.

(Sous-produits du lait).

Les couverts de bois faits à domicile pendant l'hiver.

Les couverts de galalithe, produit de l'industrie capitaliste ; les seconds ayant tué les premiers.

Tout ce travail effectué par des groupes différents. Chaque groupe ayant à justifier, avec tous documents à l'appui recherchés dans le fichier, dans les B.T., les affirmations du maître.

Nous pensons cependant que la leçon du maître précédant le travail des élèves doit être une exception. La part du maître étant assez importante après les exposés de groupes. Le maître questionné par les élèves après la conférence aura assez d'occasions pour parler - s'il y tient.

V. LES SYNTHESES. - La plupart des synthèses, qui ne sont le plus souvent sur les manuels que sèches énumérations, doivent être entreprises et faites par les élèves. Elles seront toujours riches et fécondes grâce à la documentation abondante du fichier des B.T.

Quelques-unes sont simples et faciles pour eux : l'agriculture française, blé, vigne, élevage, forêts, pêche, etc...

L'industrie, le commerce, les ports.

Elles comporteront de grandes cartes illustrées, imagées, et seront par conséquent l'occasion de révision des connaissances acquises.

Des synthèses plus complètes seront faites maître et élèves travaillant ensemble. Le maître apportant des documents nouveaux, suscitant des initiatives aidant à la confection des graphiques.

Situation de la France dans le monde, son importance, son industrie, son activité comparées à celles des autres pays...

Tendances actuelles, etc... Rôle de la France dans 1e monde.

VI. LES PROMENADES, LES VOYAGES, LES TRANSPORTS DE CLASSE.

Dans beaucoup d'écoles on organise pour la fin de l'année une excursion, une sortie en car le plus souvent, qui survient à ce moment comme la suprême récompense de l'année scolaire, celle que l'on a espérée, celle dont on a rêvé une année durant et qui vient ouvrir la période des vacances.

Certes cette sortie laisse une profonde impression ; elle sort de leur milieu les enfants ; elle est parfois le seul voyage que l'on fait. On peut encourager cette pratique, mais nous, à l'Ecole moderne, nous demandons plus à ces grandes promenades, et si nous les maintenons comme récompenses nous les préparons soigneusement et nous en faisons d'autres beaucoup plus profitables :

LES SORTIES D'UN JOUR :

Nous organisons parfois des sorties d'une journée qui nous emmènent hors de notre milieu familier, à quelques kilomètres.

Nous en préparons soigneusement l'itinéraire, les temps de marche, les temps de repos, les études particulières qu'on se propose.

Partis de bonne heure, sac au dos, on chemine aux heures fraîches. Aux haltes, on examine les plantes nouvelles, les pierres ramassées en chemin, on fait de petits croquis qui rappellent les observations faites.

Et le lendemain notre bagage de géographes explorateurs s'est enrichi de nouvelles images précises, de nouvelles idées qui viennent s'ajouter à celles déjà acquises.

On fait facilement 15 km. dans sa journée, et à 7 ou 8 km. de l'école le champ à explorer est déjà vaste et varié.

LES TRANSPORTS DE CLASSE : Nous recommandons, toutes les fois c'est possible, d'avoir une école correspondante attitrée assez près de la sienne : l00 km. au plus. Dans un rayon de 100 km. les paysages et les habitudes de vie diffèrent sensiblement en France. La correspondance est fructueuse, la comparaison des modes de vie intéressante... et la distance n'est pas telle qu'elle devienne un obstacle aux transports successifs des élèves dans les familles des correspondants, le transport ne coûtant que le prix du voyage, les enfants étant dans les familles de leurs correspondants.

Voyages de deux, trois ou quatre jours, les classes correspondantes travaillant en commun pendant ces journées, les recevant, devenant les guides des arrivants ; les enfants vivant ainsi en commun, ils se quittent riches de souvenirs précis, souvenirs de jeux et d’études nouvelles qui viennent compléter, préciser les acquisitions dues à la correspondance qui avait précédé.

Ces transports successifs doivent se placer de préférence au second trimestre, le premier ayant permis de prendre connaissance et de préparer les « transports » ; le troisième trimestre permettra de préciser, d'exploiter les acquisitions nouvelles.

« Les longs voyages », « Les caravanes d'enfants » (Voir B.E.N.P. n° 48).

CONCLUSIONS. - Nos élèves ayant appris avec joie à travailler seuls (nous disons bien travailler, leur travail n'ayant pas de valeur qu'au point de. vue scolaire), ayant avec ferveur étudié leur milieu local, ayant pratiqué les échanges interscolaires, ayant sans scolastique, sans dogmatisme étudié la géographie selon les normes d'une Ecole moderne,  avec un matériel moderne, sans s'être lassés ni  abêtis à apprendre de mémoire des listes de mots et autres résumés, ont des connaissances solides. Ils auront appris à se connaître eux-mêmes, à connaître les autres.

Ils auront pris connaissance de leurs possibilités.

Ils sauront se débrouiller dans la vie pratique, ils sauront préparer un voyage, ils s'intéresseront au reste de l'humanité. « Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m'est étranger ». L'Ecole les aura préparés à la vie... et la soif de connaître qui les a animés à l'école continuera à les posséder.

Nous ne disons pas « ils pourront entrer dans la vie » puisque l'Ecole moderne n'est pas séparée de la vie. Nous disons : « ils pourront continuer et poursuivre leur vie d'une façon harmonieuse sans que se produise cette cassure qui marque la vie des enfants à la sortie des écoles traditionnelles. Ecoles où l'on travaille, certes, où on a tout au moins l'apparence du travail, mais en vue des résultats qui n'intéressent pas la majeure partie des élèves tellement ils paraissent lointains, nébuleux - voire inaccessibles à la plupart. »

A l'Ecole moderne on « ne fait pas de géographie sur commande » mais on comprend ce que l'on fait quand on satisfait un besoin immédiat, aussi terre à terre paraisse-t-il.

Les études imposées par la vie font partie de la vie même. L'élève ne « fait pas de géographie », mais il comprend ce qu'il étudie.

La Géographie à l'Ecole moderne, qui étudie « par la vie, pour la vie » mérite bien son bon nom de Géographie vivante. La Géographie contribue, en laissant vivre l'enfant à l'école, à former en lui l'homme qu'il doit être demain.

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