Ecole maternelle de Saint-Cado - Morbihan

Tapisseries

C’est vrai, c'est prouvé, les tout petits de la Maternelle peuvent déjà, réaliser des tapisseries. Bien sûr, ce ne sont pas des tapisseries de St-Gobain, mais de jolies choses mises ensemble et qui font plaisir à l'oeil.

C'est simple : tous les enfants aiment découper ; à la maison, ils découpent tout ce qu'ils trouvent : catalogues du Bon Marché, des Galeries Barbès, de Manufrance ou journaux illustrés. Chaque petit découpage est entouré de rêve, L'enfant est parti vers un monde qu'il invente, lui-même. Je me souviens des robes que je découpais, que j'ornais, que j'embellissais et que je destinais à des poupées que je n'avais pas.

Oui, la tapisserie, c'est simple : il suffit d'organiser un atelier semblable aux ateliers de peinture, d'imprimerie, de céramique, de menuiserie dans lequel on trouvera tous les matériaux qui serviront à la confection de la tapisserie : échantillons d'étoffes, tissus variés sortis des armoire s, laines de couleurs et de grosseurs différentes, feutrine, étoupe, chanvre, etc... et bien entendu, des ciseaux pour tailler dans tout ça ; de la colle, de grosses aiguilles, de l’étoffe de fonds sur laquelle seront posées avec délicatesse toutes les richesses choisies,

Alors, tout le monde est au travail : on découpe, on colle, on coud. Les bébés qui ne savent pas encore manier les ciseaux, déchirent et froissent et finissent par coller leurs matériaux sous un amas de colle. Ce ne sera pas tout de suite un chef-d'oeuvre mais un bon commencement.

Les occasions de faire de belles tapisseries ne manquent pas. Il faut seulement les permettre et y croire.

   

Chez nous, la tapisserie a commencé par ce dont nous avions besoin :

- des rideaux pour la salle de repos et le vestiaire ;

- des dessus de lit et des tapis de sol ;

- des tentures pour les murs de la salle de jeux ;

- des coussins pour la fête des mamans.

Je me souviens des coussins faits par Robert pour la Fête des Mères.

- « J'ai une idée :
Tu vois, je dessine avec de la laine,
Tu mets les épingles sur la laine
Pour ne pas qu'elle bouge et puis, moi,
Je couds dessus ».

   

Ce fut une belle aventure qui se termina par une réussite qui enchanta la maman.

Tous les enfants se lancèrent à la suite de Robert. Chaque coussin était d'abord un graphisme avant d'être une broderie avec des laines de couleurs différentes, simplement fixées par de gros points maladroits.

Nous avons pris plaisir à faire d'autres tapisseries. Les plus belles sont les tapisseries gratuites ; celles qui viennent toutes seules, quand l'enfant a une idée bien à lui et que tout seul, il s'en va farfouiller dans les boîtes de tissus et de laine après avoir réalisé un beau dessin qui sera le point de départ de la tapisserie qu'il voit déjà en rêve.

Je pense à. la merveilleuse tapisserie de Simonne (6 ans). Un matin, elle me dit :

- « Je fais une belle tapisserie aujourd'hui. J'ai déjà fait le dessin ce matin ».

Elle place sous mes yeux un dessin au crayon gris qui n'est qu'un dessin comme les autres, mais qui devenait extraordinaire en l'imaginant « en tapisserie ».

   

La Dame part se promener.
Ses cheveux touchent la route.
Les étoiles touchent ses cheveux.

Sur le papier, du crayon gris, des taches de crayons de couleurs, du stylobille vert et sur la tapisserie, je retrouve les mêmes lignes, les mêmes couleurs, le même souffle et pourtant, Simonne s'est à peine appuyée sur son dessin en travaillant sa tapisserie.

Toute seule, elle a cherché ses matériaux du feutre orange, la palette laine, la palette tissus, les meilleurs ciseaux et s'organise dans un coin au soleil.

J'étais, moi, très occupée dans « le coin Didier ». Il avait mis lui aussi, sans crier gare, sa grande tapisserie de 2 m², posée par terre et qu'il fallait préserver des va-et-vient des nouveaux bébés.

Simonne, toute à son affaire, découpait ses laines, ses tissus, mêlant le tout à la fois, dessinant à nouveau pour remplir les vides.

Et là, l'observant, j'ai pensé qu'il y avait à compter - au-delà de la matière, de sa manière de travailler - avec son style personnel, son souffle, son bonheur, qui se retrouvent dans tout ce qu'elle crée en textes libres, en poésie, en chant libre, en danses spontanées.

Elle chantait, improvisait. C'était très beau, assuré, joyeux.

Je sais bien que ce sera beau,
Que ce sera très beau.
J’ai bien fait de prendre des laines.
J’ai trouvé de la bleue pour le ciel,
Des feuilles de tissu pour l’arbre…

Très vite, tout était posé : UNE MERVEILLE !

   

Il fallait ensuite fixer les éléments sur le tissu, soit avec de la colle, soit avec l'aiguille. C'était un bien long travail. Coin par coin, toutes les deux, on a collé, cousu, et la tapisserie apparaissait merveilleuse.

J’ai bien fait de faire une tapisserie,
Hein, Madame ?
J’ai bien fait de faire une tapisserie,
Elle sera la plus belle de ma vie...

La tapisserie de Simonne fut en effet une des plus belles réalisations de la classe. Elle obtint un grand succès dans les expositions. Mais ce que l'on ne pouvait voir, c'était la création de Simonne, sa joie, son style.

Il ne faut pas croire au miracle, ni au calcul, ni à l'apprentissage laborieux sous la direction du maître.

Il faut croire simplement à l'improvisation, à la longue expérience tâtonnée qui en découle, faite chaque jour et qui ouvre le coeur, l'intelligence et appelle le don de l'enfant vers le chef-d'oeuvre.

BREVET DE TAPISSERIE A SIMONNE !...

Hortense ROBIC,

Ecole Maternelle de St-Cado (Morbihan).

Photo H. Robic

 

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