Les dossiers pédagogiques
Supplément à l’Educateur n°1 du 1er octobre 1967

 

 

 

 

 

L'organisation de la
classe de transition

Dossier réalisé par Maurice Paulhiès
et la commission de l'I.C.E.M.

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SOMMAIRE

1. AVANT-PROPOS                                 G.Lamireau
2. RELATIONS MAÎTRES-ÉLÈVES         A.Turpin
Une attitude nouvelle de l’éducateur est indispensable à la création d’un climat de travail et de confiance réciproque
5. L’EXPRESSION ÉCRITE                    H.Lestrade
Le texte libre, le journal scolaire, la correspondance inter-scolaire, disciplines de base du français
10. LA RECHERCHE                             G.Barrier
Disciplines d’éveil et travaux scientifiques expérimentaux: leur rôle original dans les classes de transition
19. L’ORGANISATION MATÉRIELLE     M.Nédélec
Elle conditionne les rapports maîtres-élèves et détermine le travail des élèves.
22. OBSERVATION DES ÉLÈVES           G.Bernade
connaître la personnalité de l’élève, son quotient intellectuel et son niveau scolaire.

 

L'ORGANISATION DE LA CLASSE

Conçu au Congrès de Tours, ce dossier documentaire n'a qu'un but: favoriser l'expérimentation des Techniques Freinet dans les classes de transition en les adaptant au tempérament de chaque éducateur et aux conditions particulières de son travail.

Toutefois, il est des choses qu'il convient de répéter, à savoir que les Techniques Freinet n'ont pas attendu l'expérience des classes de transition pour voir le jour et que les Instructions Officielles, en promouvant certaines réformes pédagogiques, ne font que rendre un discret hommage à celui qui consacra toutes ses forces et toute sa vie à l'épanouissement de l'enfant.

Au demeurant, je suis de ces naïfs qui persistent à penser que les classes de transition disparaîtraient d'elles-mêmes si des techniques naturelles d'enseignement étaient dispensées du cours préparatoire au cours moyen. Il ne resterait alors que des classes de perfectionnement (en moins grand nombre qu'aujourd'hui) et des classes normales, pour des enfants normaux.

«Les choses étant ce qu'elles sont», il n'en demeure pas mains vrai que des maîtres (jeunes débutants ou instituteurs chevronnés) se trouvent soudain aux prises avec des techniques nouvelles pour eux. Ils ont lu les instructions officielles, ont reçu les conseils - parfois contradictoires - des chefs des centres de formation et des inspecteurs spécialisés et les voici, un beau matin, aux prises avec les réalités quotidiennes. Et la bonne volonté alors ne suffit plus à pallier les quotients intellectuels déficients, le matériel rudimentaire et la classe surchargée.

Les conseils qui sont fournis dans ce dossier présentent au moins un intérêt : ils ont été écrits par des praticiens, par des maîtres qui connaissent les difficultés et qui se sont efforcés, au travers des Techniques Freinet et de leur personnalité particulière, de les résoudre.

L'important, dirait Freinet, n'est pas la vitesse mais le mouvement. Que chacun commence donc par ce qui convient le mieux à son tempérament : le reste viendra ensuite, tout naturellement.

GILBERT LAMIREAU
IDEP

 

RELATIONS MAÎTRES - ÉLÈVES

par Alexandre Turpin

Les élèves des classes de transition souffrent, sous des formes et à des degrés différents, d'inadaptation scolaire... On ne saurait à ce sujet, trop insister sur l'importance du climat que le maître créera dans sa classe; son affection apportera à ses élèves l'aide morale dont ils ont besoin.

(LO. du 15 juillet 1963)

L'organisation coopérative du travail dont il sera question plus loin est un facteur essentiel à la naissance de ce climat nouveau, mais elle ne suffira pas. C'est à une attitude nouvelle que sont conviés enfin les éducateurs. Dans l'école traditionnelle, l'enfant a jusqu'ici été habitué à subir l'autorité du maître omnipotent et infaillible. Il ne concevait pas qu'il pût y avoir une autre attitude que celle de la soumission à toutes les règles et sanctions artificielles; s'il s'y opposait, il ne pouvait être qu'un mauvais élève. Il faudra maintenant, et progressive­ment, l'amener à une attitude plus confiante pour qu'il puisse participer, s'exprimer librement, faire preuve d'esprit d'initiative. Cette transformation ne pourra s'effectuer que dans le « milieu aidant », que si le maître est entièrement disponible et convaincu des bienfaits de cette coopération.

1- Premier contact

Le maître doit se trouver au milieu de ses élèves, à leur niveau, pour être plus près d'eux et pour mieux les comprendre. Il ne doit plus chercher à dominer.

Le premier jour, il est indispensable qu'il se présente aux enfants et que chaque enfant se présente à son tour. Cette connaissance réciproque facilitera les premiers contacts entre maître et élèves qui viennent souvent d'établissements très divers.

2- Faire connaissance avec le local

- Les élèves circuleront librement dans la classe, poseront peut-être des questions sur ce qu'ils découvriront.
- Si la classe est déjà pourvue de matériel: fichiers divers, documentation, outils de travaux manuels, imprimerie, limographe, peinture, etc., nous serons amenés à expliquer l'esprit dans lequel nous allons travailler et à présenter le texte libre, le journal, la correspondance, les échanges, à montrer que nous «ne serons plus seuls».
- Il faudra également discuter de l'organisation matérielle de la classe: disposition des tables, répartition des ateliers.
- Si le démarrage a lieu sans matériel, après la présentation du travail qui nous attend, nous pourrons faire appel à la collaboration des enfants. Grâce à leurs apports, certains ateliers prendront vie: atelier de calcul, de peinture, documentation, vivarium.

3- Ce sera "notre classe"

Nous serons «chez nous». Chacun pourra dire ce qu'il pense, proposer des changements, exprimer ses désirs et faire appel à l'aide du maître qui est toujours disponible pour tous.

Mais il faudra beaucoup de bonne volonté de la part de chacun pour que s'établisse ce «climat de confiance et de       travail» (I.O.)

4- Le travail que nous ferons

- ne sera pas sanctionné par des notes et des classements,
- nous établirons nous-mêmes, ensemble, notre plan de travail que nous contrôlerons chaque semaine en réunion de coopérative. Tout le monde sera à même de juger les résultats et c'est cette appréciation collective que mentionnera le plan de travail adressé aux parents.
- «Il sera nécessaire que le maître établisse des relations avec les familles dès le début de l'année scolaire afin de les associer à l'effort entrepris... Un effort d'information des parents sera également nécessaire : on leur expliquera par exemple comment, dans les classes de transition, les classements mensuels établissant des comparaisons entre les enfants seront remplacés par l'appréciation des progrès personnels des élèves» (I.O.) (voir graphique du plan de travail).

C'est dès les premières semaines qui suivent la rentrée (3 ou 4 au plus) qu'il est indispensable d'entrer en contact avec les parents (collectivement et individuellement). La connaissance de la famille contribue à une meilleure connaissance des enfants. Il a été constaté que tous les maîtres qui ont eu ces contacts voient leur travail facilité.

5- La libre discussion permanente

Elle ouvre également la voie à la confiance.

- L'entretien du matin, très ouvert, permet d'approfondir notre connaissance des enfants : il faut savoir écouter les élèves, accepter tous les sujets et ne refuser aucune discussion. Peu à peu ils ouvriront leur coeur.
- La discussion à la faveur de tous les travaux de la journée revêt autant d'importance. C'est souvent dans ce tête à tête avec le maître, au cours d'une aide occasionnelle que l'enfant se confiera volontiers.
- Le soutien individuel à tout moment : une parole, un geste, un encouragement auront une grande influence sur le comportement de certains qui apprécieront cette attitude, bien que le contact ne soit que fugitif.

Ces quelques remarques ne prétendent pas dicter une attitude, ni être une certitude de succès.

Chacun y puisera les éléments qu'il pense pouvoir lui être de quelque utilité.

Affection et confiance réciproques sont indispensables à la création du climat qui doit régner dans les classes de transition.

Le maître n'a plus la prétention de détenir seul la vérité, d'apporter tout à la classe.

Les élèves y feront entrer la vie avec tous ses problèmes et ensemble on essaiera de les résoudre.

A.T.

 

L'EXPRESSION ÉCRITE

par Hélène Lestrade

Bien qu'il ne faille pas dissocier les matières d'enseignement les unes des autres et en particulier l'expression orale de l'expression écrite, nous sommes amenés à présenter l'expression écrite en français dans notre optique de la pédagogie Freinet.

1- Le texte libre

Bien des choses ont été écrites déjà à propos du texte libre, de ses motivations, de son exploitation, de ses critiques.

Dans le bulletin de la commission (n° 13) A. Camille, de Pellegrue, a publié l'article suivant:

Le texte libre fait ses preuves dans des classes de plus en plus nombreuses. L'expression «texte libre» figure même dans les récentes instructions des classes de transition, il est officiellement recommandé dans les classes de perfectionnement.

Pourtant cette riche technique de l'École Moderne, créée par C. Freinet, soulève encore des controverses. Les discussions sont passionnées? Tant mieux! Elles montrent que le texte libre ne laisse pas indifférente 1a plus grande partie des éducateurs.

Rappelons brièvement cette technique. L'enfant apporte des textes écrits librement, à n'importe quel moment de la journée, chez lui ou à l'école, quand il en a senti la nécessité. Ces textes sont donc le reflet immédiat de la vie de l'enfant. Ils sont lus devant les camarades, l'un d'entre eux est choisi par vote. Il sera mis au point (orthographe, grammaire, paragraphes) par la classe, puis imprimé par une équipe. I1 sera joint aux autres textes qui composeront un journal vendu dans le village et échangé avec des correspondants.

Pourquoi laissons-nous nos enfants s'exprimer librement sur leurs joies, leurs inquiétudes, les événements de leur région et du monde? Parce que, comme tous, nous nous sommes inquiétés des maigres résultats obtenus en rédaction, du manque évident d'intérêt pour une dépense d'énergie assez considérable! Parce que nous avons constaté un courant d'expression parallèle à l'expression officielle de la rédaction (billets clandestins, journaux person nels...) Les enfants ne nous ont pas attendus pour écrire des textes libres! Irons-nous à contre-courant, ou au contraire notre pédagogie exploitera-t-elle ce désir de l'enfant de raconter sa vie?

Réponses aux objections

Pourtant on fait bien des reproche au texte libre. En particulier:

1. L'enfant raconte des banalités.
2. Les textes libres émanent souvent des mêmes élèves et les textes des plus faibles n'ont aucune chance d'être retenus.
3. Les nombreuses fautes, commises par les plus faibles, ne seront pas corrigées, ni jamais vues.
4. La vue des mauvaises graphies est nuisible à l'orthographe.
5. Une partie des enfants n'est pas concernée par 1a mise au point d'un texte qui n'est pas le sien. Étudions ces principaux reproches point par point.

1) Affirmer que l'enfant raconte des banalités, c'est contester au texte d'enfant ce qui fait sa richesse, sa supériorité sur la rédaction, c'est-à-dire sa liberté d'expression. Ces récits d'événements, que l'adulte considère comme des faits divers sans importance, apparaissent à l'enfant comme essentiels. Pour nous, c'est une indication précieuse sur sa richesse d'expression, quand il écrit sur un sujet qui l'intéresse. Non, ne reprochons pas aux premiers textes d'un enfant leur banalité.

C'est comme si nous reprochions au jeune enfant de ne pas savoir s'exprimer, tout de suite, correctement. Laissons-lui le temps d'expérimenter les différentes voies de l'expression. Un jour ou l'autre il en trouvera une qui attirera l'attention de ses camarades, et alors quelle victoire! Quelle joie d'écrire et de communiquer. En quelques mois, certains explorent déjà le domaine des sentiments, des grandes idées (la paix, la guerre, le devenir de l'homme, la conquête de l'espace...). Ils sont alors bien au-dessus des sujets de rédaction et nos journaux scolaires sont là pour en témoigner.

2) Bien entendu, des enfants écrivent beaucoup (jusqu'à quatre-vingt-dix textes par an!), d'autres bien moins. Peut-on cependant prétendre qu'il existe un seul exercice qui capte l'attention réelle de l'ensemble d'une classe? Ceux qui éprouvent peu d'attirance pour une technique d'expression qui les impressionne (il est si difficile d'affronter le jugement des autres), ceux-là se raccrochent aux autres moyens d'expression française dont nous disposons: la riche correspondance interscolaire, les enquêtes, les albums, les exposés...

Quant aux travaux des enfants les plus faibles, s'ils ne sont pas retenus, c'est que le maître n'a pas su ou pu apporter la part de mise au point qui lui revenait. Le contrôle du nombre des textes libres écrits et élus permet de détecter les enfants qui écrivent peu. Ces camarades seront encouragés en réunion de Coopérative. Ils sauront aussi qu'ils peuvent compter sur l'appui nécessaire mais discret (ô combien!) du maître pour améliorer des textes pauvres. Quelques discussions seront suffisantes pour enrichir certains textes. Alors, tous les rouages ayant fonctionné, il est bien rare que des enfants restent «sur la touche». Faisons confiance au sens de la justice chez l'enfant pour sentir qu'un jour, le texte d'un camarade, bien que pauvre, marque un réel progrès. La mise au point sera alors longue et laborieuse, mais qu'importe!

Disons aussi que les enfants tiennent plus souvent compte de l'originalité du sujet que de sa forme et qu'ainsi tous voient leurs textes élus un jour ou l'autre.

3) Sur le plan de la correction, il est matériellement impossible de mettre au point de façon collective tous les textes. Les textes lus sont ramassés, les fautes d'orthographe et les tournures trop maladroites sont soulignées puis corrigées avec l'aide du dictionnaire et sous le contrôle de l'instituteur.

4) Durant la mise au point collective, l'enfant a sous les yeux un texte non dégrossi, aux graphies défectueuses. On pense que la vue de ces erreurs est nuisible. Pensez-vous vraiment que la vue de bonnes graphies amène automatiquement nos enfants à écrire correctement, et pensez-vous qu'il suffise d'énoncer des règles pour que les enfants les appliquent avec discernement? La pratique quotidienne de la classe renseigne vite sur la valeur de ce postulat...

Grâce au texte libre, nous partons des difficultés réelles, naturelles de l'enfant. Quel sera ensuite notre cheminement? Notre position est à mi-chemin entre la «pensée adulte» imposée comme modèle à des esprits qui ne comprennent rien à cette logique là et «une attitude qui consiste à dire que la pensée et même la syntaxe de l'enfant doivent être intégralement respectées, sinon il y a déformation, abus d'autorité». Nous aurons à la fois à corriger la construction, les fautes, et à garder la pensée enfantine dans ce qu'elle a d'original.

Cela nous demande une participation active et nuancée et non une démission devant le travail de l'enfant.

Toutes les fautes seront soulignées, discutées. Nous nous livrons à un tâtonnement orthographique comparable à tous les tâtonnements de notre vie, comparable aux tâtonnements du bébé qui apprend à marcher ou à parler, à établir des relations sociales et pour lequel il n'est pas question de règles préétablies. La loi viendra ensuite, naturellement, lorsque nous aurons buté sur des difficultés plusieurs fois. Grâce à ce travail de tous les jours, ce brassage continuel des difficultés de syntaxe et d'orthographe, nous nous acheminons vers une maîtrise naturelle de la langue. Alors nous n'aurons crainte de confronter les écrits d'enfants à ceux de la pensée d'adulte, les textes d'auteurs.

En définitive, quel jugement pouvons-nous porter sur le texte libre? Pour notre part, nous aimerions que ce fût celui de l'expérience, et, ajouterions-nous, celui d'une expérience poursuivie loyalement et correctement.

La pratique du texte libre est passionnante, simple aussi si on en a compris l'esprit. Mais elle est trop souvent déformée par ceux qui n'en voient que le côté attrayant et délaissent la partie éducative. Alors bien sûr, on crie «haro » sur le texte libre! Quand aura-t-il lieu le recyclage des maîtres dont on parle tant? Allons visiter les milliers de classes qui «font» du texte libre avec sérieux. Nous pensons qu'a­lors les quelques objections que des maîtres soucieux de l'intérêt des enfants nous opposent, et se posent, seront vite effacées, mieux d'ailleurs que par tous les discours... y compris ces quelques lignes.

A.CAMILLE

2- Le journal scolaire

Ce sont les textes libres ou les poèmes choisis et mis au point qui occupent la plus grande partie du journal scolaire. Selon les possibilités matérielles, les textes peuvent être reproduits :

- au limographe (voir références)
- au duplicateur
- à la machine à écrire
- à l'imprimerie

Nous pensons que lorsqu'on a la chance de pouvoir se procurer un matériel d'imprimerie, il a une place de choix dans nos classes. C'est une technique très formative et complète: lecture, orthographe, dextérité manuelle, travail coopératif, création esthétique sont développés. Le journal (surtout imprimé) valorise le travail des enfants:

- auprès d'eux-mêmes
- des parents
- des amis

Le journal scolaire est complété par les illustrations des textes (voir bibliographie), par les comptes rendus d'enquêtes, par la vie du mois, par la page aux parents. Il devient ainsi un lien entre l'école et la vie. Ainsi conçu il peut d'ailleurs être vendu aux parents, aux amis de l'école.

I1 est surtout échangé avec des écoles publiant le leur en France et à l'étranger.

3- La correspondance interscolaire

Elle est une motivation puissante de l'ensemble du travail scolaire et une préservation de l'affectivité de l'enfant souvent mise à dure épreuve.

On n'échange pas seulement le journal scolaire. Suivant une entente entre maîtres des deux classes correspondantes, un rythme s'établit pour s'envoyer:

- des lettres individuelles
- des textes
- des albums d'enquêtes (disciplines d'éveil) ou des lettres collectives
- des bandes magnétiques
- des colis d'objets fabriqués., de dessins, de produits régionaux, de collections.

Le voyage-échange est le couronnement de la correspondance.

Pour pratiquer la correspondance, point n'est besoin de matériel ni d'une longue pratique des techniques Freinet. Il ne faut que de 1a bonne volonté. C'est la technique qui permet le démarrage des débutants sans risque d'échec.

Les satisfactions seront plus ou moins grandes mais il n'y a pas d'erreur à commettre.

Celui qui débute doit:

- écrire à M. Poirot, CEG, 88 Darney, qui enverra une formule de demande à bien remplir et â retourner. L'adresse du correspondant sera assez vite connue. En sollicitant un correspondant «régulier», vous vous engagez à remplir le contrat d'échanges aux conditions suivantes :

1°. Se mettre, dès avis, en relations personnelles avec 1e correspondant pour information réciproque sur les conditions, les désirs, les buts, les moyens divers d'échanges: en un mot, établir, entretenir l'harmonie et la richesse du travail commun. Garder ce contact entre maîtres en permanence.
2°. Adresser, au moins une fois par quinzaine, tous éléments d'échanges riches d'intérêt et de vie, constituant un lot en rapport constant avec les effectifs et, éventuellement, avec les envois déjà reçus: autrement dit, assurer l'équivalence, la régularité et l'intensité des échanges.
Tout nouvel adhérent qui sollicite une correspondance scolaire doit se faire connaître au délégué du groupe de l'École Moderne Française de son département: il y recueillera bien des avis et des informations élémentaires très utiles.
4°. En cas d'interruption momentanée ou définitive de l'échange, adresser dans la semaine, aux correspondants, un avis motivé et circonstancié, si possible.
5°. Veiller à ce que dans chaque envoi, chaque élève de la classe correspondante ait sa part (si un élève est absent, le signaler par un petit mot rédigé par les camarades). Aucun enfant ne doit être déçu quand un paquet arrive.

Si un cas de force majeure vous empêchait de donner suite à la correspondance demandée, il est de la plus haute importance d'en informer immédiatement, par lettre en double exemplaire, votre correspondant et le responsable du service : M. Poirot, CEG, 88 Darney.

Nous vous rappelons que le groupe départemental de l'ICEM (au besoin demandez à Cannes l'adresse du dé­légué départemental) peut vous aider à résoudre vos problèmes de démarrage et vous procurer, ou même vous prêter, les ouvrages dont vous trouverez la liste à la fin de cette brochure.

H. L.

 

DISCIPLINES D'ÉVEIL
TRAVAUX SCIENTIFIQUES EXPERIMENTAUX

par Gabriel Barrier

Peut-être avez-vous trouvé dans le texte libre et les techniques artistiques, le moyen de faire entrer la vie avec les enfants dans la classe ; peut-être vous êtes-vous engagés suffisamment dans cette voie afin d'établir avec vos élèves les relations affectives nécessaires et suffisantes pour renouveler l'atmosphère éducative, réconcilier les écoliers avec l'usage fréquent, sensible et naturel de la langue dans ses formes orales et écrites?

Mais peut-être aussi, votre tempérament ne vous a-t-il pas permis d'établir la plénitude de ces relations, peut-être cherchez-vous encore la technique qui pourrait vous conduire à votre propre réussite d'éducateur auprès d'enfants difficiles ou délicats?

Peut-être encore, connaissez-vous des élèves qui ne semblent pas accrochés, que l'entretien ou la pratique du texte libre ne semblent pas avoir touchés, des élèves qui semblent rester en dehors de la coopération souhaitée et dont on peut penser qu'ils n'ont pas trouvé leur voie?

Nous vous offrons de penser, pour eux comme pour vous, à un mode nouveau d'expression personnelle dans les activités dites d'éveil et comprenant les travaux de recherche, individuels ou en équipe (étude du milieu géographique et économique, le mot milieu étant pris dans son sens le plus large -le monde d'hier et d'aujourd'hui-), les travaux scientifiques expérimentaux, débouchant sur l'exposé ou conférence d'enfant qui en est, avec parfois l'album ou le dépliant, l'aboutissement nécessaire.

Il apparaîtra que ces disciplines d'éveil sont peut-être la grande originalité et la marque particulière des classes de transition. Souhaitons qu'elles se répandent à toutes les classes.

Quels buts

nous proposons-nous?

Le but des disciplines d'éveil n'est ni de traiter un programme ni de faire acquérir des connaissances, mais:

1°. De permettre à l'enfant de satisfaire une curiosité naturelle mais endormie, étouffée par des années d'enseignement formel.
2°. D'offrir la possibilité de se révéler et de s'épanouir à ceux dont l'intelligence concrète a été paralysée dans les cadres d'une école trop intellectualisée. Nous savons par expérience qu'il existe certains enfants à la sensibilité peu éveillée qui s'expriment fort mal de façon littéraire ou poétique; mais par une sorte de compensation, leurs doigts ont des yeux et le geste conduit leur pensée.
. De donner le moyen de communiquer aux autres le résultat des recherches individuelles, enquêtes ou expériences; par là de valoriser bon nombre d'enfants en position d'échec et en même temps de soumettre le travail de chacun à la critique collective (socialisation indispensable).
4°. De cultiver le goût de la recherche et du travail bien fait.
5°. Surtout de pratiquer une pédagogie de la réussite, qui redonnera à l'enfant confiance en lui, éveillera le désir de réussir en des activités bien différentes, telles que textes libres, activités artistiques.

Il faut donc :

a) Éveiller ou réveiller chez les enfants le désir d'entreprendre des recherches ou expériences: motivation.
b) Leur donner les moyens de les mener à bien et d'aller aussi loin que possible : documentation, outils, organisation matérielle de la classe.
c) Les aider, car il faut éviter à tout prix le découragement, l'abandon: part du maître.

Quels sont les points de départ?

Nous les rechercherons dans la sensibilité de l'enfant car elle conditionne son attention. Ne négligeons pas cette constatation: il a une mémoire prodigieuse pour ce qui le captive et cette mémoire est une résultante d'une meilleure compréhension du monde extérieur social ou naturel.

Pour être plus précis, dans la pratique nous découvrirons leurs intérêts vitaux:

- dans le texte libre,
- dans l'entretien libre spontané (du matin ou d'autre temps, en classe ou en dehors). L'entretien porte sur la vie familière et l'observation naturelle, sur la vie sociale et l'actualité. Son champ est infini,
- dans la correspondance interscolaire - soit qu'elle suscite de nouvelles curiosités à propos du milieu dans lequel on vit, les questions des camarades lointains poussant à remarquer ce que l'accoutumance cachait,
- soit qu'elle excite la curiosité des enfants vis-à-vis d'un pays et d'une société différents des leurs par certains aspects et communs par d'autres,
- dans l'objet lui-même, que l'enfant apporte en classe et fait connaître,
- dans l'enquête également car nous n'aurons jamais terminé: la recherche et l'expérimentation font naître de nouvelles curiosités, de nouvelles expériences, les premières conclusions font rebondir l'intérêt.

Quel serait le programme?

Trop libre! Livré au gré du maître, au caprice de l'enfant, aux rigueurs des circonstances ou des saisons? Qu'importe! Le but fixé n'est pas l'étendue des connaissances mais l'acquisition d'habitudes de travail et de réflexion.

Quel serait le programme à reprendre en chaque circonstance, à quelques variantes près?

- profiter de la sensibilité naturelle de l'enfant; elle aiguise sa curiosité et développe ses facultés d'observation. Mettre en route le travail de recherche par une causerie sur le sujet: questions posées par les camarades, recherche immédiate des documents, intérêt étendu au plus grand nombre possible d'élèves.
- ne jamais délimiter a priori le champ des recherches et expériences tâtonnées. Laisser à la causerie la possibilité d'ouvrir toutes les voies possibles d'enquête, de prévoir toutes les expériences; c'est un stimulant pour l'élève ou l'équipe qui va prendre le travail,
- ensuite, faire agir la coopération des élèves pour ordonner ces voies possibles: amorcer le plan de recherche qui évite l'éparpillement, définir l'idée directrice, l'hypothèse provisoire,
- guider délicatement: la part du maître peut et doit varier selon le niveau des enfants, la période de l'année. Si certains enfants, par exemple, sollicitent une fiche de travail, une fiche guide, ne pas la leur refuser. Mais alors il serait souhaitable de l'établir en collaboration avec eux, afin de sauvegarder leur liberté et de leur apprendre d'autre part à faire l'effort d'organiser et d'ordonner leur travail.

C'est affaire de psychologie et de disponibilité. Il faut se retenir de peser sur le travail des enfants.

- lorsque l'activité créatrice a fait surgir les premières conclusions ou hypothèses intermédiaires, exiger plus de rigueur, de contrôle, de critique. Présenter à toute la classe les travaux et recherches effectués, critiques, ques­tions, demandes de supplément d'in­formation, etc.; synthèse ; décisions collectives concernant la trace que doit laisser le travail (par exemple: synthèse collective pour le journal, album, dépliant, et plus tard peut-être, brevets),
- repartir, si c'est nécessaire au possible. On peut considérer que l'enquête aboutit définitivement dans la conférence d'enfant, le tableau synoptique. Au contraire les travaux scientifiques, par leurs premières conclusions, font rejaillir l'intérêt et le besoin d'expériences nouvelles.

Cette démarche est une vérité qui est familière aux adeptes de 1a pédagogie. Freinet. Ce dernier l'a inscrite dans deux de ses livres : Essai de psychologie sensible appliquée à l'éducation ; L'éducation du travail.

Nous ne saurions trop vous en conseiller la lecture, à vous qui désirez vous engager dans cette voie. Cette absence de manuels, de programmes, de directives, cette trop grande liberté ne vous donnent-elles pas le vertige? Craignez-vous de vous laisser griser par une liberté illusoire et peu constructive? Freinet lui-même a écrit un Dit de Mathieu sous ce titre: « Ne vous lâchez jamais des mains, avant de toucher des pieds».

Si vous voulez avancer avec quelque sécurité dans cette voie nouvelle, lisez avec attention les deux livres cités ci-dessus ainsi que les Dits de Mathieu,

Est-ce toujours possible?

La vie active de la classe nous offre tous les jours de nombreuses pistes qu'il serait tentant de suivre. Il nous faut nous organiser.

Si vous devez tenter l'expérience, limitez-vous d'abord à un premier essai lorsque vous vous sentirez pénétrés des principes énoncés plus haut. Par ailleurs vous conserverez le cadre des techniques déjà éprouvées et de vos habitudes. Mais n'hésitez pas à faire ce premier pas et donnez-vous tout entier pour qu'il vous conduise à une réussite. Vous recommencerez et bientôt la joie et le dynamisme de vos élèves ne vous laisseront plus le choix.

Surtout, n'oubliez pas vos outils.

Inutile de les avoir tous à la fois, ni même le premier jour. En vérité, nous les avons nous-mêmes créés au fur et à mesure de nos travaux; c'est peu à peu que nos classes modernes ont pris cet aspect bien connu qui les fait ressembler davantage à des ateliers qu'à l'auditorium traditionnel. Ne vous préoccupez de plan de travail que lorsque le travail sera devenu complexe.

Mais que faut i1 installer?

Supposons qu'un enfant ait apporté des chrysalides et que la sensibilité éveillée des autres (ou de quelques-uns) ait suscité des questions et une volonté d'expérience; supposons qu'il ait été décidé d'observer dans les chrysalides, l'éveil du papillon. Vous donnez carte blanche à l'enfant ou à l'équipe pour réaliser le plan de travail ainsi esquissé. Il lui faut

- du temps libre (ses camarades occupés à d'autres travaux profiteront indirectement de l'expérience, notion de travail individualisé),
- quelques outils élémentaires, une table, sinon un établi, quelques ma­tériaux, pour réaliser un vivarium. (Faites confiance aux enfants, ils vous aideront à cette réalisation: voir la construction de la cabane dans la Guerre des boutons),
- quelques livres et fiches documentaires vous seront utiles.

La BT n° 544 •Élevages      d'insectes, vous donnera les schémas et indications nécessaires pour réaliser un vivarium et vous en servir; d'autres BT vous apporteront une documentation complémentaire :

642 Amati, grillon d'Italie
550 Dans le pré 10 insectes
507 Barbacane le grillon
576 Les bourdons
372 Le hanneton
343 La chasse aux insectes
316 Quelques insectes
274 Collectionne des insectes
264 Guide pour l'étude des insectes
249 Les papillons, détermination
1e SBT n° 156 : Le vivarium
le SBT n°     80 : Chenilles et papillons etc., car je ne les saurais citer qu'au hasard faute de savoir sur quels chemins vous vous serez engagés.

Et vous trouverez encore des schémas directement utilisables dans les fiches techniques des CEMEA.

Il n'est peut-être pas indispensable d'avoir tout, mais il est naturel de profiter des efforts de ceux qui nous ont précédés.

Alors vous aurez besoin de l'aide et des encouragements des camarades. Ne travaillez pas seuls, associez-vous au groupe des collègues de l'École Moderne. Vous y trouverez un ami, un parrain. Ce que vous ne possédez pas, on vous le prêtera ou on vous l'indiquera. Ils sont d'infinie ressource et sagacité. Ils font paraître des bulletins d'information tels que Étude du milieu; ils animent des réunions et des stages.

Mais que deviendra votre expérience? Quelle trace écrite en restera-t-il? Ce que vous voudrez. Il en restera une trace, oui!

- d'autres nichoirs, vivariums ou aquariums s'adjoindront à l'avenir au premier, pour former le coin, l'atelier «Observation de la vie».,,
- à la première table et aux quelques outils élémentaires s'ajouteront de nouveaux instruments qui formeront une panoplie et vous créerez dans l'avenir votre atelier de travail manuel...
- les premiers livres isolés sur un rayon d'armoire formeront au fil des crédits une bibliothèque de travail, un fichier documentaire qu'organisera le Pour tout classer...

Tout cela créera à son tour de nouvelles activités manuelles de recherche et de conception. Alors naîtra le Plan de travail qui ordonnera le complexe.

Si vous n'en êtes pas encore là...

Tant mieux ou tant pis. Mais vous avez fait le premier pas et il vous faut approfondir les techniques. Elles sont tout ou rien; elles ne sont rien sans la pensée directrice qui les anime et que contiennent les livres de Freinet mentionnés plus haut ; elles sont tout parce que sans elles, il n'y aura que verbiage et expériences avortées.

Dans la pratique il nous les faut revoir, prendre en détail, les roder à notre entendement. Ce travail a été fait, esquissé pour vous, dans de petits livres qu'on appelle les BEM (Bibliothèque de l'École Moderne).

10 : Milieu local et géographie vivante
13 L'enseignement des sciences
33 Le fichier documentaire
4: Moderniser l'école

C'est par ces livres que vous entrerez dans le détail des pratiques scolaires quotidiennes ; ils vous fourniront des exemples précis de réalisations faites dans les classes de camarades.

Vous pourrez lire également les Dossiers pédagogiques :

9: Exploitation pédagogique des complexes d'intérêts
12 : Sciences au degré
14 Brevets et chefs-d'oeuvre

et puis les bulletins régionaux et les bulletins de commissions.

De toute façon, il faudra vivre vous-mêmes votre expérience et vous accommoder des circonstances qui vous seront faites. Vous profiterez des essais des camarades contenus dans ces livres, vous profiterez de leur présence et de leur enthousiasme, puis vous participerez à votre tour, car la pédagogie que nous vous proposons est coopérative.

Voici quelques exemples - bien peu - mais les meilleurs viendront de votre réussite. Bon courage !

LA CLASSE ATELIER COMMENT L'ENVISAGER ?

Ce qui suit est un exemple entre d'autres et qui n'a que la valeur d'un exemple.

La classe est du type des classes démontables qu'on a vu se dresser un peu partout en France. Le mobilier est essentiellement l'apport de l'administration et quelquefois de la fabrication des élèves (présentoirs - technique propre aux CEMEA) ; les appareils ou outils proviennent de l'administration, des élèves ou du maître. L'activité créatrice des élèves et du maître est un des facteurs de l'aménagement.

Voyez le plan p. 17­

1 - Établi, casiers, panoplie

L'établi est une longue table de bois blanc, peu fragile et rigide, que nous avons équipée nous-mêmes en dessous pour recevoir les matériaux et en surface d'un étau et d'une presse (mais de bons serre-joints peuvent utilement servir à fixer sur la table les objets qu'on travaille).

Les casiers, nous les avons trouvés dans la classe; chacun d'eux est destiné à recevoir une catégorie d'outils ou matériaux (plâtre, chiffons, métaux, électricité, emballages, pots en verre, récipients, peintures, clous et colle, etc.).

La panoplie est un ancien tableau remonté de la cave, chaque outil y a sa silhouette dessinée. Ainsi, l'élève sait où ranger l'outil et l'absence de celui-ci est immédiatement visible.

À cet atelier les enfants construisent des maquettes, des dioramas, montent des expériences, démontent un moteur, réparent une bicyclette, préparent des bois pour l'imprimerie, etc.

2 - Électricité

La CEL vend une boîte scientifique n°1 qui permet de nombreuses expériences. La pièce essentielle de cette boîte est un transformateur qui débite à partir du secteur un courant alternatif de 6, 12, 18, 24 volts à chacune de ses prises. Les enfants peuvent donc utiliser cet outil pour de nombreuses expériences tâtonnées sans danger. Nous avons adjoint à ce transfo, un voltmètre emprunté au CEG, un transfo récupéré d'un train électrique et un redresseur de courant pour le continu (électrolyse par exemple). Certains camarades ont fabriqué eux-mêmes un transfo débitant du 6 volts en modifiant légèrement un transfo récupéré d'un vieux poste de TSF.

Nous avons fabriqué une boîte de 6o x 40 x 40 cm à 3 compartiments:

1er compartiment : transfo, redresseur et voltmètre, filicoupeur.

2e compartiment:

a) fils, fiches, prises, etc.

b) fer à souder, tournevis, pinces, etc.

3e compartiment: matériaux divers, ampoules, fusibles, fil verni, électroaimants, écouteurs, transistors, diodes, interrupteurs, etc.

Par leurs apports les enfants enrichissent ce trésor.

La boîte ainsi équipée est installée près de la prise de courant: c'est l'atelier électricité. Les enfants y ont fait maintes expériences par exemple la détermination du fonctionnement du volant magnétique de la mobylette.

3 - Bibliothèque

C'est une armoire.

1er rayon en haut : manuels et spécimens.

2e : la série complète des BT (bibliothèque de travail éditée par l'ICEM) disposées par 10 dans des chemises en carton et équilibrées toutes les 50 brochures par une planchette. Il y a actuellement 65o numéros qui constituent une véritable encyclopédie immédiatement à la portée des enfants.

3e: Le reste des BT et les SBT (suppléments aux BT). Dans ces derniers sont publiés des textes d'auteurs, ou des plans de montage de maquettes ou d'expériences.

Les BTS (BT sonores) sont une édition des BT sous forme d'un complexe: disque et diapositives.

4e : Les livres de lecture, mais les enfants utilisent davantage et avec profit la très bonne bibliothèque municipale.

5e : Les manuels scolaires divers. Lorsque les enfants viennent consulter la bibliothèque ou le fichier scolaire documentaire placé à côté, ils s'assoient à une table réservée, recouverte d'une nappe ornée d'une céramique, d'un bouquet. C'est la table de lecture, coin préféré.

4 - Fichier documentaire

Il s'est constitué au fil des jours par les apports divers du maître ou des enfants, il existe un fichier de base, embryon, édité par la CEL (Fichier scolaire coopératif).

L'essentiel est de classer ces documents de diverses provenances afin de les utiliser immédiatement en cas de besoin ; nous nous servons alors d'une brochure appelée Pour tout classer.

La BEM n° 33-34 donne tous les renseignements pour constituer le fichier, le plan du meuble réalisable, la manière d'utiliser la classification décimale (Pour tout classer).

5 - Exposition de documents et travaux

Nous avons emprunté aux CEMEA leur technique de fabrication des présentoirs (à la portée des enfants). Une surface d'affichage en isorel mou permet d'épingler les documents, des tablettes de contreplaqué reçoivent les objets, le tout est monté sur un cadre en tube d'acier d'électricité (1).

Nous utilisons ces présentoirs pour exposer les expériences en cours, les boîtes d'élevages, les plantes, les cartes en relief les plans cadastraux ou autres plans, les cartes d'état-major, la correspondance interscolaire, les réalisations des enfants qui appuient leurs conférences, les documents d'actualité, etc.

 (1) Voir les articles de P. Rose dans les 110, 111, 113 de " Vers l'Éducation Nouvelle". CEMEA, 55, rue St-Placide, Paris 6e.

En observant le plan ci-contre, vous remarquerez que je me limite à l'aménagement du local en ce qui concerne les travaux expérimentaux ou disciplines d'éveil. Ce qui est écrit ci-dessus ne cherche pas à donner un modèle mais à montrer comment nous nous sommes équipés peu à peu dans une classe quelconque, avec les moyens dont nous disposions. Par ailleurs, on pourra vous donner (écrire à la CEL) une liste de matériel minimum avec budget d'installation et de fonctionnement. Elle est assez décourageante. Pensez plutôt que chaque activité entreprise sera créatrice d'équipement et laissera sa trace réutilisable pour d'autres activités. La coopérative, à la fin de l'année scolaire, pourra laisser à la promotion suivante un véritable héritage.

La classe-atelier organisée comme nous l'avons montré permet de nombreux travaux. Bien sûr, s'il fallait y loger 40 élèves, tout serait remis en question mais vingt élèves y sont actifs et à l'aise.

Chacun trouvera sa solution en s'aidant des diverses publications de l'ICEM qui reprennent les techniques en détail avec des exemples à l'appui.

Nous avons déjà cité, à mettre directe­ment dans les mains des enfants, les BT, Supplément BT, BT Sonores, fichier documentaire, les 100 fiches-guide de TSE, les bandes enseignantes et programmées de TSE, d'histoire, géographie, la boîte électrique.

Et pour les maîtres les BEM qui donnent le détail des techniques et des exemples, les diverses publications : Éducateur et bulletins de région ou de commission.

Organisons la classe en ateliers différenciés et mettons les outils aux mains des enfants :

«La pratique, d'abord instinctive et empirique, devient lucide et scientifique sous la logique des faits. Cette logique, Freinet la découvrit dans une loi vieille comme la création : le tâtonnement expérimental dont il fit l'élément de structure d'une psychologie de sensibilité et de mouvement.»

La pédagogie Freinet est à base de travail et de création.

Vous vivrez votre expérience pédagogique, et vous créerez votre classe de transition, vous ne commencerez ni par la technique, ni par la philosophie, mais par les deux simultanément; dès le premier pas, dès 1e premier essai il vous faudra agir et comprendre.

Nous avons fait ainsi et les enfants nous y ont aidé.

G. B.

 

L'ORGANISATION MATÉRIELLE

par Michel Nédelec

L'organisation matérielle d'une classe de transition est radicalement différente d'une classe traditionnelle.

- dépouillez la classe de son caractère traditionnel, donnez-lui l'allure de «club», d'ateliers,

La disposition du matériel scolaire conditionne les rapports maître-élèves, détermine et conditionne le travail des enfants.

Influence sur les rapports maître-élèves

Il existe deux solutions lorsqu'on réfléchit au problème de cette. installation. Le maître peut, dès la rentrée, adopter une certaine disposition et bénéficier ainsi d'un effet de «choc», mais il peut également, modifier pro­gressivement l'installation de la classe au fur et à mesure que la nécessité s'en fera sentir.

Que l'on choisisse l'une ou l'autre de ces solutions, il faut bien se dire que cette disposition peut être remise en question, modifiée, et ce sera là l'occasion d'activités coopératives.

Ceci posé, voici quelques conseils

L'installation matérielle doit traduire un changement des méthodes pédagogiques (ce que les I.O. nomment «un climat nouveau») ;

- reprenez le conseil de Freinet: « supprimez l'estrade»,
- modifiez aussi la disposition des tables. Celle que vous adopterez doit inviter à la fois:
- au travail par groupes
- au travail individuel
- à la libre circulation dans la classe.

Si vous n'avez pas encore changé la disposition de vos tables, et si vous croyez que cela n'a pas d'importance, persuadez-vous bien du contraire. Il est certain que changer la disposition des tables conduit à un changement d'attitude du maître.

Vous disposez peut-être de crédits pour l'équipement de votre classe? Nous rie vous' conseillerons aucun modèle déterminé. Selon votre caractère, vos goûts, la surface de votre classe, choisissez des~tables individuelles ou de grandes tables légères, mais que toujours vos tables soient facilement et silencieusement transportables. Quelques tables élémentaires, rustiques, peu fragiles, peuvent servir à l'installation des ateliers.

Peut-être vous inquiétez-vous de la place de votre bureau? Vous y serez rarement, sa place n'a donc pas d'importance, mais vous aurez votre coin personnel de rangement.

Influence sur le travail des élèves

La classe doit également offrir, dans la mesure de sa possibilité, un certain nombre de «coins» ou  ateliers».

Nous vous conseillons un ordre de priorité. En effet, il est probable que vous ne pourrez pas tous les disposer:

1. Documentation

2. Imprimerie, limographe

3. Les autres «coins »: dessin, calcul, lecture, travail manuel, sciences, ma­gnétophone, etc.

I. La documentation. Il en a déjà été question au chapitre précédent. Si l'on ne peut pas se procurer l'ensemble de la collection BT, un choix peut être fait selon les goûts et les intentions du maître.

Vous compléterez votre documentation en constituant un fichier documentaire.

II. Limographe et imprimerie. Selon vos moyens vous vous procurez seulement un limographe, ou une imprimerie si vous êtes plus riches, ou les deux si vous le pouvez. Songez à utiliser pour ce coin des revêtements facilement lavables ; placez si possible ce «coin » dans un endroit bien éclairé.

III. Ateliers

- Dessin: Une grande table plate, des feuilles de grand format, feutres, pastels, peintures CEL, brosses et pinceaux. Vous ne pourrez pas obtenir de bons dessins sans un matériel de qualité.
- Calcul: Reportez-vous à la première bande programmée «atelier de calcul ».
- Sciences-Travail manuel: Voir le chapitre précédent.
- Lecture - Préparation des conférences : Prévoyez deux ou trois tables en plus du nombre normal où les élèves pourront s'installer pour lire. Placer ce «coin» dans l'endroit le plus calme. Vous rangerez à cet endroit la visionneuse, le tourne-disque éventuellement, qui permettront à vos élèves de préparer leurs exposés loin des allées et venues de leurs camarades.
- Magnétophone: La CEL vend un excellent appareil conçu tout spécialement pour l'usage scolaire. Méfiez-vous des appareils à bon marché. Lisez la BEM n° 18-19 sur les techniques audiovisuelles. Renseignez-vous avant tout achat auprès de l'un des responsables de la commission audiovisuelle de votre région ou écrivez à Dufour, Goincourt, 6o - Beauvais, qui peut aussi vous donner un correspondant si vous comptez procéder à des échan­ges magnétiques - ou à Guérin, BP 14 10 - Ste-Savine.

Vous pouvez aussi utiliser (sous certaines conditions, que le responsable vous fixera), la sonothèque de la CEL pour compléter les documents sonores apportés déjà par les BT sonores dont la valeur et l'intérêt sont inestimables.

Important: Travaillez en 19 cm-sec. (votre appareil devra donc pouvoir travailler à cette vitesse de défilement).
Autres ateliers possibles : réduit noir, pour la photo, coin de l'émaillage sur cuivre, pour la poterie, le modelage, etc., cette liste n'étant pas exhaustive.
Aménagement des murs: Prévoyez de nombreux panneaux pour l'affichage des travaux, dessins, enquêtes, du journal mural, de la correspondance, des plannings, etc.
Des étagères facilement accessibles seront nécessaires au rangement des fichiers autocorrectifs ou des casiers de bandes programmées.
Le coin exposition avec tables, étagères, vitrines (où fossiles, naturalisations, pierres, etc. pourront être exposés et classés) sera le "musée» de la classe.

Conclusion

Nous avons donné une liste assez complète des différents ateliers possibles; il ne nous semble pas qu'un débutant doive introduire d'emblée dans sa classe toutes ces techniques. Nous ne dirons jamais assez qu'une technique d'expression ou de recherche libre ne doit jamais être introduite dans une classe sans que le maître l'ait assimilée ni qu'il dispose du matériel et de la place nécessaire à son introduction.

M. N.

 

OBSERVATION DES ÉLÈVES

par Georgette Bernade

Nous pouvons nous placer à trois niveaux:
- connaissance de la personnalité de l'élève,
- connaissance du niveau intellectuel de l'élève,
- connaissance du niveau scolaire de l'élève.
- les renseignements médicaux ; fournis par le dossier médical de l'élève;
- une fiche remplie en début d'année: ce que j'aime, ce que je n'aime pas, ce qui m'est indifférent, les écoles fréquentées (beaucoup d'élèves ont changé souvent d'école).

1 - Connaissance de la personnalité de l'élève

C'est nécessaire et utile mais, en aucun cas, notre travail ne doit être celui du spécialiste (psychologue, conseiller d'orientation) qui applique des tests et interprète ensuite des résultats. Nous ne sommes pas formés pour cela.

Par contre, nous pouvons constituer un dossier par élève.

Ce dossier pourrait comprendre:

- les renseignements familiaux: nom, profession des parents, nombre d'enfants, avec place de celui qui nous intéresse dans la fratrie, conditions de logement (avec beaucoup de discrétion) ;

Le dossier pourrait s'enrichir au long de l'année scolaire de dessins ou de textes libres qui nous paraissent caractéristiques; de notations sur des observations que nous aurons pu faire: attitude générale et comportement en classe, envers le maître, envers les camarades, comportement dans la cour.

- Vous pouvez aussi, lorsque les élèves se connaissent bien entre eux, leur faire remplir une fiche portant d'une part le nom des élèves avec lesquels ils aimeraient travailler, ceux par qui ils pensent être choisis pour travailler. Il est facile alors de schématiser la classe (sociogramme).

Ceci peut vous aider dans la composition des équipes.

Bibliographie

Essai de psychologie sensible, C. Freinet (Delachaux). Il serait bon de lire comme introduction l'article du Dr Maurice Maer: Les techniques Freinet et la psychologie de l'enfant, n° 494 du bulletin de la Société Binet-Simon, 47, rue Philippe de Lassalle, Lyon, 4e.

Le temps de l'adolescence, G. Avanzini (Éditions Universitaires).

Sociométrie scolaire à l'usage des en­seignants, Norshway et Weld (Éditions Universitaires).

2 - Connaissance

du niveau intellectuel

Tout enseignant porte - qu'il en soit conscient ou non - des jugements de valeur sur le niveau intellectuel des élèves qui lui sont confiés; il estime que Paul est intelligent, que Jacques est très peu doué, fondant son opinion sur des critères empiriques qui, même s'ils paraissent confirmés par l'expérience et le temps - ne constituent jamais un support suffisant pour une connaissance objective du niveau intellectuel de -l'enfant.

Comment pouvons-nous procéder?

Il faut faire appel à des spécialistes qui disposent du matériel et des techniques nécessaires.

Les tests (ou épreuves standardisées) que passeront nos élèves soit lors d'un examen individuel (pour les "cas» qui nous posent une énigme), soit lors d'une épreuve collective (avec le concours du psychologue scolaire ou du conseiller d'O.S.P. de votre circonscription) permettront d'établir le quotient intellectuel (Q.I.) de chaque enfant. Ce Q.I. présenté sous une forme numérique se situe en général - pour les sujets d'intelligence normale - entre 90 et 110. C'est dans cet intervalle que se trouvent, ainsi que l'a montré une enquête conduite par le laboratoire de Pédagogie expé rimentale de Lyon, 70 % environ des élèves du cycle de transition.

L'importance du quotient intellectuel ainsi défini est grande. Sans vouloir pour autant attacher une valeur précise et définitive à cette appréciation, il reste, et ce n'est pas là le moindre de ses avantages, qu'elle nous permet de mieux adapter notre enseignement non seulement au niveau de tel ou tel élève, mais plus encore aux diverses formes qu'il peut revêtir. Ainsi pourrons-nous, au moyen d'exercices appropriés, développer les aptitudes in­tellectuelles qui nous sont signalées ou remédier à certaines déficiences.

Vous pouvez vous procurer au CRDP de Lyon) 47 rue Philippe-de-Lassalle, l'étude intitulée Les classes de Transition.

3 - Connaissance

du niveau scolaire

1) Vous pouvez procéder de façon occasionnelle et noter pour chaque élève les fautes d'orthographe qui re­viennent souvent, les mécanismes de calcul peu assurés, les erreurs de lecture.

2) Vous pouvez aussi, mais dans un climat de détente d'où vous éloignerez toute idée de jugement, procéder de façon plus systématique.

Calcul

- exercices de numération
- opérations (nombres entiers avec et sans retenue, nombres décimaux, nombres complexes)
- sens des opérations: petits problèmes conduisant à une seule opération, l'élève ne doit qu'entourer le signe de l'opération à faire.

Dictée

- Liste des sons
- Liste de quelques mots
- Liste de quelques phrases avec difficultés croissantes mais simples (accord verbe-sujet, phrases au pluriel).

Lecture

- Lecture à haute voix.
- Lecture silencieuse avec 1 ou 2 questions portant sur la compréhension du texte lu.

3) Il existe des tests :

- Ferré : les tests à l'école (Bourrelier).
- Questionnaires de connaissances scolaires CM2 (INOP, 41 rue Gay Lussac, Paris 5e)
- Tests d'acquisitions scolaires CM2-6e (calcul, français différenciés). Editions du Centre de Psychologie appliquée, Square Jouvenet, Paris 16°.
- Tests de la société Binet-Simon, 47 rue Philippe-de-Lassalle, Lyon 4e. Si on utilise ces tests, il faut le faire en respectant le rythme propre de chaque enfant (il n'y a pas de limite de temps pour les tests de connaissance).

BREVETS

Ils permettent de poursuivre l'observation et de noter les acquisitions dans le domaine des connaissances (brevets tests) ainsi que de valoriser des élèves peu doués intellectuellement en révélant des goûts et des aptitudes (brevets chefs-d’œuvre).

Voir dossiers n° 14 Brevets et Chefs-d’œuvre.

G. B.

 

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages de C.FREINET
            Les techniques Freinet de l’École Moderne       Bourrelier
            Les dits de Mathieu                                          Delachaux et Niestlé
            L’Éducation du travail                                                    « 
            Essai de psychologie sensible                                         « 

Dossiers pédagogiques                                      (1,50 F ou 2,50 F)
            8 L’imprimerie et les techniques annexes
            11 Naissance et évolution d’un journal scolaire
                        (Second degré)
            19 Mémento de l’École moderne
            23 Gerbe de journaux scolaires
            14 Brevets et chefs-d’œuvre

BEM (Bibliothèque de l’École Moderne)                     (3 F ou 5 F)

            3 Le texte libre
            39 L’expression libre (en classe de perfectionnement)
            4 Moderniser l’école
            10 Milieu local et géographie vivante
            11-12 L’enseignement des sciences
            13-14                    «      du calcul
            33 le fichier documentaire
            17 La grammaire
            15 les plans de travail
(à paraître) La correspondance scolaire

Bibliothèque de travail                              35 F par an (Le numéro de 1,50 à 2,50)

            BT Junior                         18 F par an              (Le n° 2,50)
            SBT                                  20 F par an              (Le n° 1,20)
            BT Sonore                        65 F par an              (Le n° 25 F)

Pour toute commande ou renseignement s’adresser à la CEL – BP 282 – Cannes 06

 

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