L’exposition de la salle Gaillard à Clermont-Ferrand

C’était très chouette ! Cette exposition a permis de découvrir les activités dans les classes qui pratiquent la pédagogie Freinet. Nous avons été surpris de voir sur les photos des enfants et des adolescents au visage heureux.

Je suis séduite par l’aspect de vérité et d’authenticité de votre exposition.

L’éducation anti-autoritaire est un premier pas vers une société socialiste libertaire, donc humaine.

Enfin ! Nous allons faire de l’enfant un individu !

On n’a pas besoin de lire les panneaux pour comprendre. La forme même de la salle fait vivre la pédagogie Freinet.

   

J'ai le coeur à rire
car mon coeur est flamme
J'ai le cœur à rire de ma peine
                           de ma peur
                          de ta joie
à rire de l'homme
à rire des hommes
J'ai le cœur à rire en voyant
                          ton visage
            à rire lorsque tu m'aimes des yeux
J'ai le coeur à rire
pour m'abriter des larmes
J'ai le cœur à te dire en longs
chuchotements l'histoire d'hier
grâce aux mots de demain
J'ai le coeur à ouvrir
les volets des bourgeons
à peindre tous les langages
à caresser les prairies
J'ai le coeur à aider le vent
à pousser la mer
à marcher sur un fil
à renverser les traditions
à construire l'amitié
J'ai le coeur à arrêter
le balancier du temps
à gommer les souffrances
à dessiner l'avenir et la paix

 

J'ai le coeur à comprendre, à apprendre, à entendre, à attendre
             à démolir l'impossible.
J'ai le coeur arrimé à la terre entière
J'ai le coeur à aimer la nature
de l'homme au coquillage qui dort dans la mer.
J'ai le coeur à vivre
vivre de coeurs ouverts
J'ai le coeur à vivre d'une angoisse folle
d'un soleil de joie
J'ai le coeur à taire mes rêves parce que je suis un exilé
J'ai le coeur à vivre des nuages, du vent, du sable, de la mer
J'ai le coeur à vivre ma vie avec toi
J'ai le coeur à crier
crier que je suis là
que nous sommes là
que nous voulons vivre
J'ai le coeur à crier mon désir de partir
J'ai le coeur à crier les années, le vide et le silence
Nous avons le coeur à crier ce qui se dit tout bas

CRÉATION COLLECTIVE DES ÉLÈVES DE 3e D

   

Songerie

Vendredi pendant le circuit-dessins,le président nous montra une peinture.
C'était un merveilleux paysage d'automne paisible. Moi, je me suis évadé de la classe. Sur le dessin, on me voyait pêcher dans une mare,déguster les premiers fruits sur une branche très haute, grimper sur un tas de bûches mal emlilées. Je suis entré dans une petite maison au toit rouge et je me suis assis sur une chaise en écoutant mes camarades parler. Tout était calrne, on entendait quelques oiseaux siffler leurs adieux. À la cave,des rats grignotaient du pain dur.
La solitude m'envahit et je m'endormis sur la chaise à bascule.

Denis (13-3)

   

Je suis seul
dans un univers
je suis seul
abandonné de la vie
je suis seul
je marche pas à pas
je suis seul
et l'absolu me poursuit
je suis seul
je voudrais connaître
l'impondérable qui fuit
je voudrais fuir.

VINCENT

T'es un homme inlassable,
Tu marches des jours entiers
sur ce chemin
Tu marches devant toi
comme un homme sans foi
qui demande la liberté.
Tu voyages dans le monde.
Tu chevauches
des villages de chimères,
tu chevauches des villes entières
à la recherche de liberté
et de bonheur.

JEAN-MARC

Dans le brouillard, des hommes noirs
avançaient, tout près
de moi.
Je ne pouvais plus fuir,
l'angoisse me prenait,
 j'essayais de fuir,
mais ils m'ont saisi
et un horrible scrupule
La mort, j'en avais peur.
Jamais, elle n'avait été si près de moi,
si près de mon coeur essoufflé
qui battait fort.
Puis ce fut un cri déchirant.
Tout a disparu, la mort,
les hommes, la peur.
C'était la première fois qu'une pensée affreuse
s'emparait de moi.
Dans le lointain,
dans le printemps qui arrivait,
elle avait disparu.

PASCAL

II était là
II était fou
II criait
II cassait tout
II ne se nourrissait même plus
Et un jour,
ils l'ont retrouvé
sur les pavés
couché par terre, mort.
II était mort
car il était maltraité
rejeté des villes
Alors,
il est devenu fou
avec ce qu'on lui avait fait
II était fou
mais il ne l'est pas resté
longtemps
c'est un homme qui n'a pas
eu de vie.

JEAN-MARC

Bande dessinée et poèmes de Jean-Marc (9 ans), Pascal (10 ans) et Vincent (10 ans). École de Saint-Laurent-la-Conche (Loire), classe de Renée COCQUARD

 

Ta vie
est une solitude
incompréhensible
fermée entre quatre murs
d'acier.
Seule,
une misère dépouillée
a réussi
à y pénétrer ;
et à s'emparer de ton
âme.

JEAN-MARC

On l'a vu passer
On l'a vu questionner.
Aucun sourire
sur son visage sombre
II m'a dit :
«Je cherche le meurtrier
de ma famille,
tous, ils ont été tués
par un homme,
je veux le retrouver,
et alors
je les vengerai
je cherche autour du monde,
s'il le faut.»
II a défié ceux qui m'étaient chers
II m'a dit ça, cet étranger.
II pleurait, il s'en est allé seul,
sans sa vengeance.

PASCAL

Déclaration.
Songez à tous ceux qui meurent de faim.
Vous, les gros riches,
vous gagnez et restez assis
toute une journée
dans un fauteuil moelleux.
Songez à ceux qui doivent travailler dur.
La vie n'est pas égale,
une partie du monde souffre de la faim,
l'autre a tant qu'elle veut.
Beaucoup voudraient entrer
dans la civilisation
mais on les rejette.
Tous les jours, là-bas,
dans le désert, un homme,
le regard désespéré
se regarde mourir. Réveillez-vous, aidez-les
pour qu'ils aient
le même tempérament que nous.

PASCAL

Je ne suis qu'un balayeur,
mais un homme heureux
qui ne demande rien
je prends ce que je gagne
je ne cherche pas la richesse
à dévaliser
à brutaliser
à avoir un cadavre sur la conscience
à être jugé, condamné.
Je ne suis qu'un balayeur
qui respecte tout
un homme sans rancune
un homme sans vengeance
qui aime l'humain
je ne suis qu'un balayeur
je symbolise la vie.

PASCAL

Aujourd'hui
il faut que je m'arrête.
La vieillesse
m'a surpris.
Cette vie est trop fatigante.
Elle était pour ma jeunesse.
Je la regretterai
pourtant je la quitte
et pour deux raisons
pour la vieillesse qui vient
doucement
et parce que cette vie
n'est plus pour mon corps.

VINCENT

Dans cette vieille rue,
je l'ai vu.
II me faisait pitié
cet homme
tout le monde passait
à côté de lui,
faisant comme si
on ne l'avait pas vu.
A moi, il me faisait pitié
il se traînait
par terre
alors, je l'ai emmené avec moi
et je l'ai gardé avec moi.

JEAN-MARC

   

DES OISEAUX

Dans la classe, nous avions un couple de serins, ils faisaient vraiment partie de notre vie. «Il y a une machine derrière l'école, elle fait du bruit, elle nous fait mal à la tête, elle énerve nos petits serins.»
Eux aussi faisaient du bruit, ils nous agaçaient ou nous les écoutions.
II y a eu !es oeufs... la maman les a couvés ; les oisillons sont nés, ont grandi...
Alors, les enfants ont dessiné beaucoup d'oiseaux.
A la fin de l'année, j'ai gardé quelques-uns de leurs dessins qui témoignent, par leur variété, de l'approche du concept oiseau...
Chaque enfant «prononce» le mot oiseau d'une manière originale, il dessine aussi l'oiseau selon une conception particulière et qui lui est propre.
Nous aimerions recevoir ainsi du plus grand nombre de classes possible des dessins d'oiseaux d'enfants différents. Les adresser à Mado MERLE, 13, chemin de !a Croze, Ceyrat 63110 Beaumont.

Vélos aux Fabrettes

Nous ne recherchons pas la polémique: personne ici n'est mis en cause ! Mais nous devons mettre en cause des tabous, des habitudes, des injustices ; il nous faut affirmer que les mineurs, les enfants, les adolescents ne sont pas des sous-êtres des quantités et des qualités négligeables. Nous devons dénoncer aussi l'exploitation que peuvent faire des adultes du travail et des oeuvres des enfants.
Un thème imposé par la T.V : « Des machines pour produire »
-                      ça veut dire quoi ?
-                      Simplement, on te donne un objet, tu t’en sers pour faire ce qui te chante …
L'OBJET : des vélos - le tien, le mien, ceux des autres.
DES ENFANTS : ceux d'une unité « pédagogie Freinet ».
DES MAÎTRES (C.E.2 et classe de soutien) : consentants, puis dubitatifs, puis enthousiastes.
DES PARENTS : hum ! hum 1 Laisser les vélos des gosses à l'école ? Les transformer ?
Puis DEUX PARENTS : décidés collaborer en classe même.
UN MÉCANICIEN (du quartier) : ( ?) (ah 1) (ça marche !).
LES RÉALISATEURS ET TECHNICIENS de la T.V. à l'école : d'abord effarés, puis intéressés, puis enthousiaste tes envers l'ambiance de l'école.
SEMAINE DE TRANSFORMATION DES VÉLOS A L'ÉCOLE
Communication en hausse sous tous rapports
CONTACTS PHYSIQUES                                         DÉCOUVERTES
Monter à vélo                                                              Mis à l'envers, le vélo
faire des tours                                                                donne envie de faire
foncer, tomber                                                                tout autre chose que du vélo.
et cela dans la cour                                                      Sur papier, on peut tout Inventer !
Sur le vrai vélo, on découvre les contraintes de la technique, chaîne, engrenages, pédales...
ENFANTS  ENFANTS, on collabore dans les projets, le travail, les réalisations, les réussites, les échecs.
LA COMMUNICATION est
- émotion          avec les maîtres
- solidarité        les deux parents
- partage          les techniciens T.V.

LE GRAND JOUR de l’enregistrement en studio
DÉCOUVERTE D' UN NOUVEAU MILIEU
- 25 enfants sur le plateau dès 8h30.
- Rien de prêt.
- Piétinement.
- Les «besoins naturels» ? Qui pense ?
Seule, une jeune actrice s'inquiète maternellement.Cafétéria, toilette, passe-temps...
- 2 «animatrices» de 15 ans (pour quoi faire ?) mal intégrées aux enfants , nous sont imposées.
- Des techniciens repris par leur «langage leste».
- Les brusqueries du travail, des contre-ordres.
Six heures en tout sur le plateau, pas de communication.
Même entre eux, les enfants changent d'attitude, puis à 18 h : " Ça suffit !› Parce qu'une autre école arrive...
C'est la révolte !
- Il faut argumenter pour avoir un accompagnateur, des boissons, un au revoir...
« On n'a même pas fini nos sketches !"
Cri du coeur ...
Le lendemain, en classe, un débat où les enfants démystifient la T.V., mais restent objectifs envers les choses et les gens :
* Ils sont choqués du manque de la parole donnée : "on nous avait pro­mis de nous faire jouer tous nos sketches pour que le réalisateur choisisse... »
* Mais ils envoient de beaux dessins à l'actrice ;
* Remercient pour les belles diapos reçues ;
* Présentent un rodéo-vélo endiablé à la kermesse et... attendent le passage à l'antenne.
... Septembre, octobre, novembre...
* Un matin, une mère d'élève dit : " Vous êtes passés à la T .V., à 19 h hier soir... "
Explosion : personne n'a été averti ! Personne n'a vu !
Les services de F.R.3, malgré les promesses, n'ont même pas décroché le téléphone !
* Les maîtres écrivent la déception des gosses et joignent les quatre lignes de GUY (une réaction viscérale, bien sûr !) : «On a travaillé pour rien !»
Réponse de F.R.3 : un long topo de compliments, puis vlan ! la gifle! "je n'ai guère apprécié les quelques lignes que l'on a fait écrire au jeune GUY... auquel il semble que l'on n'ait même pas fait ressortir l'aspect positif de sa participation à une création. ".
Alors, nous posons «LA» question :
* Quand un enfant crée, est-ce pour «faire plaisir aux adultes» ?
* Ou est-ce tout simplement dans la lancée de l'épanouissement de sa personnalité ?
 Et s'il crée, n'est-ce pas parce qu'un climat de liberté lui est donné ?
Alors, n'a-t-il pas droit, comme tout être humain, à la parole pour dialoguer avec ceux qui se servent de ses créations... et au besoin, ensuite, les critiquer ?
Mais le 26 avril 1976, nouvelle diffusion !
Là encore, nous ne sommes pas prévenus... Et le générique ne portait pas, paraît-il, nos références...
Nous préférons «oublier» !

Paulette QUARANTE

 
 
 
 
 

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