À Lons-le-Saunier

CLUB DU SOIR

LA PEINTURE À LA M.J.C

Madeleine BELPERRON

Actuellement à Lons-le-Saunier, à la suite d'une collaboration entre le Groupe Jurassien École Moderne (G.J.E.M.), la Maison des jeunes et de la culture et la section jurassienne de l'Office de la coopération scolaire (O.C.C.E.) ont été mis en route un certain nombre de clubs du soir, ouverts à tous les enfants de la ville pour une somme minime.

Fonctionnent régulièrement, à l'heure actuelle : trois clubs peinture, un club de danse, un club cuisine, un club mathématique, deux clubs poterie.

Tous ces clubs sont animés par des membres de l'I.C.E.M.

CLUB PEINTURE

L'enfant vient au club de peinture après une journée de classe. II est fatigué et il doit trouver pendant l'heure qui suit : joie, calme et bienfaisante détente.

Il arrive mâchonnant son pain, parfois il mange d'une main et déjà, de l'autre, il commence à peindre.

II ne vient pas subir une heure supplémentaire d'enseignement. II s'est fait inscrire en toute liberté : parce qu'il aime dessiner et peindre et que, à l'école et souvent à la maison par nécessité, il est sevré de cette joie.

Durant les heures de classe, l'enfant a écouté et essayé de retenir, il a récité des leçons, il a fait des devoirs. Il ne s'est jamais exprimé.

Au club de peinture il se donne entièrement, il s'exprime et il crée.

LES LOCAUX

Il a à sa disposition des pinceaux, du papier et une gamme aussi variée que possible de couleurs. (L'enfant complète sa palette en faisant lui-même des mélanges qui lui sont propres.)

L'atelier, au deuxième étage de la M.J.C., est vaste. Nous disposons d'un espace dé 8,5 m X 6,5 m bien éclairé par des fenêtres sur deux côtés, et de nombreux carrés lumineux au plafond, lorsque la nuit vient, et d'un grand panneau d'affichage sur le troisième côté.

Le quatrième côté est contigu au coin sérigraphie qui possède un excellent système de séchage des feuilles, que nous utilisons pour faire sécher nos peintures. I1 y a aussi un grand placard pour ranger tout notre matériel et les feuilles de papier format 110 X 70 : pas de papier canson, du simple papier d'imprimerie.

Les couleurs que nous employons sont des couleurs en poudre et de la gouache liquide. Les pinceaux sont des numéros 12, 14, 16.

Nous ne peignons pas au mur puisque le panneau est réservé à l'affichage, mais sur des tables laquées blanches de 1,50 m X 0,80 m facilement lavables. Il y en a onze. Si nous manquons de place sur les tables, nous disposons d'un espace de 5 m X 2,5 m sur lequel nous pouvons peindre par terre. Le sol est peint en vert et facilement lavable (l'atelier est en forme de L).

 

 
 

L'enfant, en général, peint debout. Il a des tabourets à sa disposition pour les dessins à l'encre de Chine et l'alu repoussé.

Il se déplace pour aller chercher ses pots de peinture.

Un évier, avec de l'eau chaude, se trouve à côté du panneau d'affichage.

LES LOIS DE L'ATELIER

Naturellement, si la liberté de l'enfant est totale dans la création, elle ne l'est pas dans l'utilisation des outils. En ce domaine, l'enfant doit se plier aux impératifs du travail en commun.

Il ne doit pas gêner les autres et donc accepter une organisation du travail la meilleure possible.

Il doit se plier aux exigences techniques telles que par exemple : remettre en place le pot de peinture après son utilisation, ne pas superposer des couleurs avant qu'elles ne soient sèches (les mélanges se font dans des coupelles et non sur le papier).

 

QUELLE EST LA PART DE L'ADULTE ?

L'éducatrice ne prend jamais la main de l'enfant pour le «guider» ; tout au plus, en passant, peut-elle déplacer cette main, d'un geste, pour lui donner une position plus favorable.

Elle ne fait pas de discours.

Elle ne fait aucun "cours" (pas de leçon sur la perspective, les ombres portées ou non, les lignes de fuite, sur la complémentarité des couleurs, etc.).

Elle ne met devant l'enfant, aucun modèle à reproduire «aussi fidèlement que possible» :

- Pas de cafetière sur une table...

- Pas de parapluie suspendu au mur...

- Pas de seau à charbon...

Le modèle, l'enfant le trouve en lui-même. Pas de sujet imposé.

Tout au plus, certaines fois, pour pallier une imagination affaiblie par six heures de classe et nonobstant le peu de temps imparti, donne-t-elle quelques suggestions vagues pour démarrer le travail : « Aimeriez-vous peindre des arbres transfigurés par le soleil ? »

Par contre l'éducatrice est là, disponible à tout instant.

A la disposition de chacun et de chacune, elle agit en sorte que l'enfant baigne dans un milieu aidant, ni rejetant ni sur-protégeant.

Ni «rejetant» par d'incessantes récriminations : « Tu tiens mal ton pinceau... Regarde tu as encore fait une tache... Tu ne vas pas mettre une couleur si vive... Tu es toujours aussi lent... »

Une pareille attitude de l'éducatrice serait absolument stérilisante pour l'enfant.

Ni sur-protégeant : Être toujours sur le dos de l'enfant, lui donner d'incessants et inutiles conseils, lui «mâcher» son travail, lui éviter toute initiative heureuse ou non, tout effort de recherche.

Une telle attitude de l'éducatrice serait non moins stérilisante. Laissé à lui-même, il serait incapable de parvenir à la création originale et personnelle.

La présence active de l'éducatrice est une des conditions primordiales pour un travail harmonieux du groupe.

Quel est donc son rôle ?

Elle prépare minutieusement le matériel : papier, pinceaux, peinture, encre, etc.

Elle dispose les postes de travail aussi bien que le permettent les conditions matérielles qui lui sont offertes.

Au cours du travail, elle donne les conseils qui sont sollicités, le plus souvent sous forme de dialogue ou de «débat» entre l'adulte, l'enfant concerné et ses camarades.

Le groupe, formé par les enfants et l'adulte éducateur, est à l'image d'une micro-société harmonieuse dont tous les membres communient dans la joie d'un travail qu'ils aiment, sans aucune hiérarchie de fonction ou de valeur... et qui atteint parfois dans les meilleurs jours, une sorte d'euphorie bienfaisante.

Certains jours il est arrivé que les enfants aient travaillé dans un silence religieux donnant le meilleur d'eux-mêmes. Nous n'échangions que des sourires heureux.

Et puis, au cours d'autres séances qui avaient mal débuté, le plus souvent parce qu'une personne étrangère était venue nous voir et avait bavardé, accaparant pour elle la disponibilité de la maîtresse... Alors, le climat de confiance et de travail ne pouvait se créer... Les enfants ne trouvaient rien à dessiner... Ils attendaient je ne sais quoi.

Le club peinture, ainsi que les autres clubs, pourraient être la première approche d'une future école où la peinture, le dessin, la cuisine, la danse... seraient au même titre que le français, les langues, les mathématiques ou la philosophie, matière à vivre, à éduquer...

Madeleine BELPERRON

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