A la découverte de L'EXPRESSION CORPORELLE

L'offrande à la Maman

Le grand jeu dramatique : l’offrande à la maman, qui fut donné au congrès des écoles maternelles par 400 enfants de 50 grandes sections des écoles maternelles de Brest fut le témoignage émouvant de l'épanouissement de l'expression gestuelle devenue langage, messager de la sensibilité et de la joie enfantine.

Autour du thème central de l'offrande quatre jeux créés par les enfants, symbolisant ces prises de possession et ces offrandes du milieu qui est le nôtre : offrandes de la mer, des oiseaux, du printemps et du soleil. Quatre thèmes vécus dans toutes les classes au long de l'année qui correspondent à des moments divers de la vie des enfants et se rattachent également au cycle des saisons.

Voici les références musicales :

- pour le jeu de la mer : Purcell : ouverture à la trompette, acte III de la Reine Indienne (disque Erato EFM 42076) et Cimarosa : concerto pour hautbois et cordes (Erato Stéréo 60017) ;

- pour le jeu des oiseaux : Mozart : quatuor pour flûte et cordes en ré majeur, K. 285 par Rampal et trio Pasquier (BAM LD 055) ;

- pour le jeu du printemps : Vivaldi : concerto en ré majeur pour flûte, hautbois, violon et basses (Erato Stéréo 50.118).

Notre rôle fut essentiellement de recueillir et de mettre en place, puis en scène, par une collaboration constante entre les cinquante classes, les œuvres les plus heureuses de l'expression verbale, plastique, manuelle, graphique, gestuelle de nos petits, de bâtir à partir de ces œuvres le schéma de chacun de nos jeux (comme fut bâtie notre tapisserie, réplique sur la toile de notre fête), puis de rechercher la musique que chacun des jeux appelait pour un épanouissement maximum.

Ainsi les thèmes de la mer (le travail des pêcheurs, les mouvements des vagues, les jeux des enfants dans l'eau et sur le sable), des oiseaux (la vie vue par les enfants, des mouettes et des oiseaux des champs), du printemps et de l'été donnèrent-ils naissance, au fur et à mesure de leur déve­loppement en classe, à des textes, des jeux, des mimes inventés par les enfants et parmi lesquels nous avons choisi un certain nombre de « séquences ».

Le déroulement des jeux a été bâti par nous après choix des différentes partitions musicales, volontairement recherchées parmi les œuvres du XVIIe siècle, œuvres brillantes, légères, si bien accordées à la joie de vivre enfantine, qu'à les entendre, nos petits sont devenus tout naturellement oiseaux, vague bondissante, allégresse de printemps.

Ces « musiques » font désormais partie d'eux-mêmes, elles sont entrées dans leur tête, dans leur coeur, dans leurs muscles. Mon plus vif désir est qu'elles les éloignent des niaiseries sonores si abondamment dispensées par la radio et la télévision, et qu'ils éprouvent toujours, à les entendre, la même joie, la même allégresse, qu'ils prirent à les danser.

Pour marquer le départ et les thèmes de chaque jeu, nous avons enregistré au magnétophone et donné en préludes quelques réflexions enfantines recueillies lors de la préparation des jeux et au cours de la vie des classes.

   

L'OFFRANDE DE LA MER

I) Le départ des pêcheurs

« Ma mère m'a dit oui, je serai un marin. J'irai tout seul en mer, sur un bateau qui ne coule pas. J'aurai un chapeau de mer, une bouée, un ciré jaune, une moto.

Je serai un marin ».

(Ouverture à la trompette de Purcell).

Devant un décor de toiles bleues et de filets de pêche bleus, verts et bruns, trois bateaux et quinze pêcheurs entrent en scène, certains tirant les bateaux, les autres portant les rames, les paniers, les cordes, les filets.

Les pêcheurs s'activent autour et dans les bateaux : vérifier les filets, enrouler les cordages, nettoyer les bateaux, préparer les casiers, dérouler la voile, la hisser, jeter l'ancre, la ramener. Puis, ils montent dans les bateaux et s'éloignent. (Les bateaux ont été faits par un menuisier et gréés par nous.)

2) La mer (Cimarosa - Larghetto)

« La mer, c'est de l'eau qui vient de loin, du côté des phares,

qui se roule sur les cailloux de grève et se cogne sur les rochers »

   

Vingt et une filles entrées en scène dans l'obscurité et allongées en trois lignes parallèles, occupant le fond de la scène, se roulent jusqu'au bas de la scène puis remontent toujours roulant jusqu'au fond.

Debout, elles avancent et reculent, glissent de côté, bras étendus, en marquant le balancement avec tout le corps.

Elles viennent se grouper autour d'un rocher imaginaire contre lequel elles cognent en sautant, puis se dispersent pour reformer au fond de scène les trois vagues.

3) Les enfants et la mer (Cimarosa : allegro)

« Quand il fait soleil, la mer est chaude. Les garçons sautent dedans ».

Une file de huit enfants débouche sur scène en sautant et vient se placer face à la mer. Le jeu consiste à avancer vers les vagues lorsque celles-ci reculent et à reculer lorsqu'elles avancent.

Une deuxième file passe entre les vagues en sautant, plonge dans les vagues qui l'encerclent et l'emmènent en se retirant.

4) Les jeux sur la plage (Cimarosa : sicilienne)

« Dimanche je suis allé à la pêche aux rigadelles. »

Seize enfants entrent en scène accompagnés de la maman et portant des paniers de coquillages, du goémon (raphia vert et brun en « queue »). Ils se dispersent et jouent par petits groupes assis ou debout ; les uns imitent les pêcheurs à la ligne, d'autres font des colliers de coquillages, d'autres des châteaux de sable, quelques-uns traînent le goémon, le poussent du pied, font dessus des galipettes, d'autres balancent leurs coquilles comme un bateau, etc...

5) L'offrande (Cimarosa : allegro)

Les enfants dansent librement, balançant leurs colliers, leur goémon, leurs coquilles qu'ils vont à tour de rôle offrir à la maman en sortant de scène.

   

L'OFFRANDE DES OISEAUX

I) Les oiseaux de mer : (quatuor en ré majeur de Mozart)

« Au-dessus de la mer, les goélands posent leurs ailes sur le vent. Ils se reposent à la queue-leu-leu sur la corde du bateau. J'ai voulu les attraper, mais ils se sont envolés ».

C'est là tout le jeu :

sur l'adagio, mouettes et goélands évoluent sur la scène, se posent près du bateau-décor (construit par nos petits et sur lequel ils ont hissé le grand pavois), plongent, repartent en volant ;

sur l'allegro, trois groupes d'enfants entrent l'un après l'autre en sautant et poursuivent les mouettes.

2) Les oiseaux des champs

« Dans le bois, j'ai vu un rouge-gorge, et un bouvreuil, et une mésange, et un pinson, et un merle ».

Toujours sur l'allegro, les oiseaux des champs entrent en scène, voletant, tournoyant, picorant, se groupant, se dispersant puis formant trois groupes qui seront eux aussi poursuivis par trois groupes d'enfants avec lesquels ils sortent successivement de scène.

3) L'offrande : (Rondo)

« Maman, je t'ai apporté un petit oiseau ».

La maman entre avec un groupe d'enfants portant des oiseaux (mouettes et oiseaux des champs fabriqués par les petits au moyen de papiers, tissus, feutrine, fil de fer). Les enfants dansent avec leur oiseau puis l'offrent à la maman. Offrande symbolique : l'oiseau est tendu vers la maman qui l'admire et le caresse.

L'OFFRANDE DU PRINTEMPS

Concerto de Vivaldi en ré majeur.

I) Les jeux traditionnels (allegro)

« Les arbres d'hiver ont mis leurs feuilles, 1e joli temps est revenu ».

Une vingtaine d'enfants va tour à tour en dansant tourner la ronde, jouer à « embrasser celle-celle », « au chat et à la souris », à « laisser passer les hirondelles ».

   

2) Le bouquet (largo)

« Pour la fête de maman je lui donnerai une belle fleur toute rose et qui sent doux et un arrosoir pour que la fleur pousse ».

La maman entre en scène avec quelques enfants portant un pot de grès et des fleurs. La maman fait 1e bouquet aidée par une vingtaine d'enfants qui en dansant librement lui apportent leurs fleurs.

3) Jeux de fleurs et offrande (allegro)

« Les fleurs du dimanche font leur tour de jardin »

- Joyeux « défilé » d'enfants porteurs de fleurs ;

- entrée par couples pour former deux rondes concentriques ;

- jeux des filles autour des garçons et inversement ;

- danse libre de quelques enfants autour des cercles ;

- les couples passent sous un grand pont de bras fleuris et viennent offrir leurs fleurs à la maman.

   

L'OFFRANDE DU SOLEIL

Concerto de Corelli en fa op 6 n. 2 (RCA, A 630.226 artistique)

« Le soleil descend sur la brume, la brume se ramasse.

Il fait jour : un peu de blanc, un peu de bleu, un tout petit peu de rose.

Le soleil s'est posé sur les trottoirs, sur les toits des maisons, sur les bateaux, sur la mer.

Allons le chercher ».

1° séquence (Vivace Allegro)

Un immense mobile-soleil construit par nous en corde armée à partir d'un soleil fabriqué par les enfants au moyen d'un panier, de fil de fer et de papier crépon et dont les rayons furent ornés par les enfants de fleurs de papier crépon descendait et montait des cintres au moyen de cordes.

Le soleil descend lentement, éclairé peu à peu pendant le vivace. Puis les enfants entrent des deux côtés de la scène, courent vers le soleil, tendant les bras vers lui et tournent autour de lui, avançant et reculant puis formant la ronde, ils attrapent les rubans dorés posés sur les rayons, dansent et jouent avec eux, puis sortent cependant que le soleil remonte.

2e séquence : Même jeu (repère du thème musical Vivace-Adagio).

3e séquence : (Allegro)

Les enfants entrent en scène un rayon à la main, les uns par la droite, les autres par la gauche, forment deux lignes se faisant vis-à-vis, les enfants de chaque ligne étant reliés entre eux par les rayons.

Les deux lignes vont l'une vers l'autre en dansant, puis s'écartent, répétant ce mouvement en suivant le rythme musical. Puis les deux enfants du fond de scène se donnent la main, descendent entre les deux lignes jusqu'au devant de la scène, tournent à droite et vont en dansant offrir leur rayon à la maman.

4e séquence : (Grave)

Danse libre avec les rayons.

5e séquence : (Allegro)

« Quand il fait soleil

il n'y a rien, rien que le soleil ».

Entrée en farandole de 24 enfants, qui après un tour complet de scène se placent en demi-cercle, changent de place avec le vis-à-vis, forment un faisceau au centre de la scène, s'assoient en petits groupes, cependant qu'à tour de rôle, par groupes de deux ou trois ils danseront librement puis offriront leurs rayons à la maman (sur le vivace du concerto Grosso en Fa op 6 n. 9 que nous avons dû ajouter à l'allegro du concerto en Fa op 6 n. 2 pour terminer le jeu.)

Aucun pas ne fut enseigné aux enfants qui furent toujours libres de leurs mouvements et qui inventèrent constamment de nouveaux gestes. Nous avons par contre réglé les entrées et les sorties, les figures des jeux et des danses et habitué les enfants à utiliser tout l'espace scénique.

Les costumes furent volontairement dépouillés de tout artifice afin de respecter l'aisance et la grâce naturelle des enfants, ainsi que le caractère même de la fête où les enfants jouaient leur propre rôle : tuniques courtes, légères et souples, bleues et vertes pour la mer, roses et vertes pour le printemps, bleu foncé et jaunes, grises et blanches et compliquées d'une quille plissée et d'ailes (simples morceaux de tissu attachés dans le dos et maintenus au poignet par un ruban) pour les oiseaux des champs et les mouettes ;

- robes-trapèzes de feutrine jaune et orange et petites robes à jupe froncée en percale glacée vert foncé, décorée de pommes éclatantes pour le jeu du soleil. Les garçons de ce jeu étaient en short anthracite et chemisette citron ;

- enfin les enfants jouant avec les oiseaux étaient en capuchons gros-bleu ou rouge-orangé, ceux jouant sur la plage en slips de bain bleus, roses, oranges ;

- et les pêcheurs vêtus des traditionnels cirés jaunes, marinières et pantalons retroussés rose foncé et orangé.

MADEMOISELLE PORQUET

Inspectrice des Écoles Maternelles

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